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Les Chemins du Cœur

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Les Chemins du Cœur   Empty Les Chemins du Cœur

Message  Oiseaubleu Jeu 21 Aoû 2014 - 5:41

Titre : Les Chemins du Cœur  
Auteur : Oiseaubleu
Date de publication : 21 août 2014
Avertissement : PG
Catégorie : T, S
Mots clés : MSR
Ship : + +
Résumé : Parcours initiatique, d’ordre affectif et amoureux, suivi par Mulder et Scully avant qu’ils n’osent s’avouer leur amour et s’aimer.

Disclaimer : Les personnages de la série X-files ne m’appartiennent pas. Ils sont la propriété de Chris Carter et de son équipe. J’écris cette fanfic dans un but purement créatif et non commercial.


AVANT DE COMMENCER

Cette fanfic a pour centre d’intérêt principal la relation qu’entretiennent Mulder et Scully, et vient compléter les épisodes de la série qui concernent ce thème. Elle aborde aussi la mythologie d’X-files, à laquelle je tente d’apporter certaines réponses.


Les cinq épisodes de ma fanfic sont distincts et se déroulent sur plusieurs années. Ils possèdent chacun une unité et une tonalité qui leur est propre. Cependant ils forment un tout et sont reliés entre eux, par un même fil conducteur : le cheminement affectif que suivent Mulder et Scully, avant de former un « vrai » couple, une vraie famille. Ce cheminement, qui est pour moi un véritable parcours initiatique, va les conduire à se découvrir eux-mêmes, à se réparer, à réparer certaines blessures de leur passé et à découvrir l’autre.


Au fil de mon histoire, j’ai poussé les personnages dans leurs retranchements pour les obliger à se livrer, à craquer, beaucoup plus qu’ils ne le font dans la série. Je crève l’abcès… pour mieux les libérer de leurs démons et leur permettre d’évoluer. Je me suis donc focalisée sur des moments de crises où Mulder et Scully, poussés à bout, à fleur de peau, deviennent particulièrement fragiles, vulnérables, incontrôlables parfois. Il me semble que ce sont ces moments qui sont les plus intéressants à explorer.


Ma fanfic ne prend pas en compte la saison 10 d’X-files, sortie en BD.


BONNE LECTURE !


 
Le premier épisode se déroule pendant la Saison 6, juste après l’épisode 10 : « Photo Mortelle »
 
EPISODE 1 : EMY
 
 « Entrez, je vous prie », dit Walter Skinner, en faisant signe à l’agent Mulder de venir s’asseoir, sur le fauteuil qui se trouvait face à son bureau. Et tandis qu’il refermait la porte du bureau du directeur adjoint du FBI, Mulder s’interrogeait toujours sur les raisons qui avaient poussé celui-ci à le convoquer. En effet, depuis qu’on lui avait retiré le service des "Affaires non classées", il ne travaillait plus sous les ordres de Skinner. Il avait été contraint d’intégrer le service du directeur adjoint, Alvin Kersh, qui ne lui confiait plus que des enquêtes de routine, sans aucun intérêt. Que pouvait donc bien lui vouloir, aujourd’hui, Walter Skinner ? Sa secrétaire n’avait donné aucune explication au téléphone, lorsqu’elle l’avait appelé, pour fixer leur rendez-vous.

Mais, cette petite incursion dans le bureau de son ancien directeur, n’était pas sans déplaire à Mulder. Elle lui rappelait le bon temps, celui où il était affecté avec Scully aux "Affaires non classées". Scully… En pensant à sa coéquipière et amie, Mulder sentit un frisson le parcourir. Il avait failli la perdre, quelques jours auparavant, alors qu’elle enquêtait, sans lui, sur une série de meurtres. Le jeune agent avec lequel elle travaillait, lui avait malencontreusement tiré une balle en plein ventre… Un vrai miracle qu’elle s’en soit sortie...

« J’ai quelque chose pour vous, annonça Skinner, une fois que Mulder se fut installé sur le fauteuil, quelque chose qui pourrait vous permettre de vous aérer l’esprit et d’oublier un peu, l’ennui du poste qu’on vous a attribué !

- Eh bien, je crois que rien ne peut être pire que ce que je suis en train de vivre en ce moment, déclara Mulder. Perdre sa journée à passer des coups de fils bidon, pour des enquêtes de routine sans intérêt… Je vous avoue que j’ai la nostalgie de mon sous-sol…

- Je comprends Mulder, mais je n’y peux malheureusement rien. Par contre, j’ai réussi à obtenir une affaire, pour vous. Il ne s’agit que d’un détachement temporaire, et vous retournerez ensuite dans votre nouveau service, mais je pense que cela devrait vous intéresser.

- Une affaire non classée ?

- Non, pas exactement, rectifia Skinner. Mais il s’agit d’un cas qui sort vraiment de l’ordinaire: une série de meurtres très particuliers, qui laisse la police et le FBI complétement désarmés. À l’heure actuelle, aucun agent n’a été en mesure de trouver la moindre piste valable ou de dresser un profil convaincant du tueur. Cela fait presque six mois maintenant, que l’enquête a été ouverte, mais elle en est toujours au point mort. Il nous faut donc des agents de taille…

- De mon côté, je suis opérationnel, avança Mulder, mais Scully est à l’hôpital. Le directeur adjoint Kersh lui avait confié une mission avec un autre agent, mais les choses ont mal tourné. Et je crains qu’elle n’en ait encore pour deux bonnes semaines d’arrêt.

- Je sais, Mulder. Mais il ne s’agit pas de Scully, cette fois. J’ai quelqu’un d’autre avec qui je voudrais que vous collaboriez. Certes, c’est l’une de ses premières enquêtes de terrain au FBI, mais on me l’a vivement recommandé. C’est une personne très compétente, semble-t-il, et je voudrais que vous suiviez l’affaire ensemble. De plus, je voudrais avoir votre avis sur sa qualité en tant qu’enquêteur, et sur sa fiabilité sur le terrain.

- Ah, je vois…, constata Mulder, d’un ton désabusé. Qu’est-ce que j’ai encore fait pour mériter ça ? Il me semble, pourtant, que je me tiens tranquille ces temps-ci.

- Mulder ! s’exclama Skinner. Il ne s’agit absolument pas d’une sanction ! Prenez-le plutôt, comme une chance… Une chance qui pourrait, peut-être, prouver à certains que vous êtes toujours dans le coup et qu’en se privant de vous, le FBI perd un atout précieux. »

Mulder semblait songeur. Il n’avait pas envie d’accepter cette mission que lui proposait le directeur adjoint Skinner. D’abord, cette proposition lui semblait surprenante. En effet, quelques mois auparavant, alors qu’il était affecté dans un autre service que celui des "Affaires non classées", on lui avait formellement interdit d’entretenir le moindre contact avec son ancien supérieur. Et voilà que maintenant, on donnait l’autorisation à Skinner de le reprendre dans son équipe. Depuis longtemps, Mulder savait que certains responsables du FBI cherchaient à se débarrasser de lui. Aussi pensait-il que cette affaire avait peut-être pour but de le piéger. Et puis, il n’imaginait pas enquêter sans Scully. Travailler avec un autre agent était à ses yeux, une preuve d’infidélité envers sa coéquipière. Et ça, il ne pouvait l’envisager. D’un autre côté, il ne s’agissait que d’une seule mission et rien de plus…

« Je vous assure que vous ne le regretterez pas, Mulder, insista Skinner. Et sachez que j’ai dû batailler ferme avec mes supérieurs pour obtenir votre détachement dans mon service.

- Bon, de quoi s’agit-il ? s’enquit finalement Mulder. Et qui est cet agent avec lequel je vais travailler ?

- Ah, venons-y, commença Skinner, un brin d’enthousiasme dans la voix. Il s’agit d’un nouvel agent qui vient d’entrer dans mon service. Des diplômes en pagaille… Vous verrez par vous-même. Je vais vous remettre son dossier. C’est épatant ! Major de promotion depuis ses débuts à l’université et à l’école du FBI. Spécialisé, comme vous, dans l’élaboration des profils psychologiques de criminels. Redoutable tireur… bref, un agent de grande qualité. Mais…

- Mais…, reprit Mulder, intrigué.

- Je vous lis ce qui noté dans son dossier : "agent impulsif ; tendance à l’indiscipline;  difficultés à travailler en équipe". 

- Bon, eh bien, en voilà au moins un, avec qui j’ai des points communs, murmura-t-il. On devrait pouvoir s’entendre… »

Skinner prit le téléphone et un moment après, le nouveau coéquipier de Mulder faisait son entrée dans le bureau.

« Je vous en prie, entrez ! » lança Skinner en direction de l’agent qui venait d’ouvrir la porte. Mulder se retourna. Oh, oh ! se dit-il. L’agent Mulder va jouer les baby-sitters pour agent fédéral en culottes courtes… Et elle est indisciplinée, avec ça ! Voilà qui promet…

Mais Mulder fut vite interrompu dans ses réflexions. Le directeur adjoint entamait les présentations : « Agent Fox Mulder, je vous présente l’agent Emy Watson.

- Enchanté de faire votre connaissance », déclara Mulder sans conviction, en serrant la main de la jeune femme. 

Environ un mètre soixante-cinq, corps svelte, longs cheveux bruns, grands yeux marron, visage candide… Emy avait des allures de poupée… Une poupée qui semblait à peine sortie de l’adolescence… Mulder était surpris de se trouver face à un agent aussi jeune. Il lui donnait vingt et un ou vingt-deux ans, tout au plus. Mais ce n’était pas pensable. Le parcours était long avant d’intégrer le Bureau de Washington. Comment avait-elle bien pu atterrir si jeune dans ce service ?

Une fois sortis du bureau de Skinner, Emy remit à Mulder le dernier rapport concernant l’enquête : « Voici le dossier Fox, annonça-t-elle énergiquement, en lui tendant le document. Je vous laisse commencer son étude et je vous retrouve dans dix minutes, au parking. Je vous conduirai ensuite chez vous, pour que vous puissiez prendre quelques affaires, puis nous filerons à l’aéroport. Notre avion décolle dans deux heures… Ne faites pas cette tête ! Oui, tout était déjà prévu. Le directeur adjoint Skinner était certain que vous ne refuseriez pas sa proposition et il a fait réserver deux places ce matin, dès son arrivée au Bureau.» Elle avait parlé avec un aplomb qui trahissait une forte personnalité. Mulder l’avait déjà senti dans sa poignée de main. Un petit gabarit qui ne se laisse pas marcher sur les pieds et qui prend le dessus tout de suite, observa-t-il, en lui-même.

Quelques minutes plus tard, Emy et Mulder étaient en route. « Fox, je vous…, commença-t-elle.

- Mulder, coupa-t-il. Et c’est « tu »… Nous formons une équipe, désormais. Du moins, pendant le temps que durera cette enquête…


- Bien, Mulder. Mais moi, c’est Emy.

- Pas de problème, répondit-il. »

Cette affaire était une aberration pour Mulder : Scully hospitalisée, et lui, réquisitionné par Skinner pour accompagner un nouvel agent dans une de ses premières enquêtes… Cela le ramenait dans le passé… quelques années auparavant… C’était ainsi que tout avait commencé avec Scully… S’éloigner d’elle, en ce moment, lui était difficile. Il avait l’impression de l’abandonner, même s’il savait qu’elle était hors de danger. Et puis, cette fille était tellement différente de sa coéquipière... A peine quelques mots échangés, depuis qu’ils avaient quitté le Bureau. Elle avait tout juste répondu à ses questions. Elle se montrait distante à son égard, peu communicative, renfermée sur elle-même. Elle avait un air rigide, trop sérieux, presque hautain…

Et puis, tout avait mal commencé pour les deux agents. D’abord, ils étaient partis sous une pluie battante. Puis, arrivés à l’entrée du hall d’embarquement, on leur avait annoncé que leur avion aurait plusieurs heures de retard, du fait des fortes intempéries qui frappaient la région. Avec ça, il y avait un monde fou dans l’aéroport car on était en pleine période de vacances scolaires, et Mulder avait eu quelques difficultés à se concentrer sur son dossier.

Une fois arrivés à l’hôtel, les choses ne s’étaient pas arrangées. « Je suis vraiment désolé, annonça l’hôtelier aux deux agents, d’un air confus, mais cette rupture de canalisation a entraîné l’inondation de plusieurs chambres, et sur les deux qui étaient réservées, il ne m’en reste qu’une seule de disponible. Et c’est la dernière de tout l’hôtel! Mais… le lit est assez grand pour deux…

- On prend, lança Emy, sans hésiter.

- Quoi ? rétorqua Mulder. Mais enfin Emy, c’est formellement interdit !

- Alors qu’est-ce que tu proposes, Mulder ? Qu’on passe la nuit dehors, sous une pluie battante, qu’on dorme dans la voiture, ou bien qu’on aille, à presque vingt-trois heures, faire le tour de tous les hôtels de la ville, en espérant trouver deux chambres libres ? Je te rappelle que nous sommes attendus demain à huit heures, au bureau de police, pour faire le point sur cette affaire ! »

Et voilà comment on se fait clouer le bec par une petite écervelée, sans expérience, qui pense avoir tout compris à la vie ! Mulder commençait à être agacé par l’attitude de la jeune femme. Mais il n’avait pas envie de s’énerver. Il avait besoin de tranquillité pour étudier de plus près le dossier de l’enquête, et il espérait également profiter de quelques heures de sommeil... Enfin, de quelques heures de repos, si la chambre possédait au moins un fauteuil confortable…

*




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Message  Oiseaubleu Jeu 21 Aoû 2014 - 5:44


Il était en train de travailler, assis face à l’unique bureau de la chambre, quand elle rentra. Elle s’était absentée, un moment. Ses bras étaient encombrés de grosses couvertures et elle tenait un sac en papier dans la main. « Le lit de madame et le sandwich de monsieur ! » annonça-t-elle. Puis, en tendant le paquet à Mulder : « Tiens c’est pour toi !

- Pour moi ? reprit Mulder, non sans cacher une certaine surprise.

- Eh bien oui, il fallait bien que quelqu’un pense à acheter de quoi manger ! » déclara-t-elle, sur un ton de reproche.

Puis elle s’installa, sur les trois grosses couvertures qu’elle avait empilées sur le sol, et enleva ses chaussures.

« Tu ne vas quand même pas dormir par terre…, observa Mulder.

- Et pourquoi pas ? rétorqua-t-elle. J’ai connu pire, crois-moi.

- Ne dis pas de bêtises, objecta-t-il. Tu vas mal dormir. Je vais m’installer sur le fauteuil et je te laisse le lit, ce sera plus confortable. Et puis… ça vaut bien le sandwich !

- Non, merci. Je serai très bien par terre. Et puis, c’est moi qui ai pris la décision pour la chambre, donc j’assume. »

Elle avait répondu sans même le regarder. Elle s’était assise en tailleur sur son lit improvisé et avait ouvert son ordinateur portable. Elle ne voulait pas perdre une minute. Elle voulait se remettre à étudier son affaire.

De son côté, Mulder s’était lui aussi penché sur un dossier. Mais il ne s’agissait pas de l’enquête. Il voulait en savoir un peu plus sur cette jeune femme, et il avait ouvert le document que Skinner lui avait remis, le matin même. Stupéfiant ! remarqua-t-il, en lui-même. Je n’ai jamais vu un parcours aussi complet : diplômes de médecine légale, de criminologie et sciences criminelles, de sciences forensiques, de psychologie, de droit… C’est un petit génie, cette fille ! Un ego probablement démesuré, ce qui explique son caractère bien trempé… « Tu as étudié pas mal de choses à l’université, remarqua Mulder.

- En effet, répondit-elle distraitement, sans même se retourner.

- Comment as-tu trouvé le temps de faire tout ça ?

- Eh bien, disons que je suis ce qu’on appelle une surdouée, expliqua-t-elle, avec vivacité. J’ai fait mon entrée à l’université à quatorze ans, ce qui m’a laissé pas mal de temps pour étudier ce qui m’intéressait. De plus, grâce à ma grande capacité de travail, j’ai pu suivre plusieurs cursus en même temps et obtenir ainsi plusieurs diplômes… Mais mon parcours n’a pas été anarchique. Il a été mûrement réfléchi et entièrement planifié, depuis le début.

- Tu veux dire qu’à quatorze ans, tu visais déjà un poste d’enquêteur ? demanda Mulder, quelque peu sceptique.

- D’enquêteur et d’agent fédéral, précisa-t-elle avec assurance.

- Tu as surement vu trop de feuilletons à la télé ! plaisanta-t-il.

- Il ne s’agit absolument pas de ça, répondit-elle avec une certaine gravité. Mes parents ont été tués lors d’une fusillade… Un braquage de banque qui a mal tourné… Je n’étais qu’une enfant... Mais dès que j’ai été en âge de comprendre, dès que j’ai su ce qui s’était réellement passé, j’ai décidé de consacrer ma vie à la lutte contre la criminalité. Tout mon parcours a été élaboré pour me permettre d’atteindre cet unique objectif : maîtriser un maximum de domaines gravitant autour de la criminologie, afin de faire partie des meilleurs enquêteurs du pays et d’intégrer la division d’enquête criminelle du FBI. »

Elle avait relevé ses yeux et le fixait. Son regard était devenu plus intense, comme animé par une flamme… Elle continua : « Je n’aime pas dépendre des autres et me fier à leur jugement. Aussi, quand je suis sur une enquête, je suis en mesure, non seulement, de pratiquer moi-même les autopsies et de me faire ma propre opinion sur les causes d’un décès ; mais aussi, d’orienter et d’évaluer les analyses et les études qui sont faites par les divers spécialistes des laboratoires de police. Je ne cherche pas uniquement à rentrer dans la tête du tueur pour dresser son profil, comprendre son fonctionnement et pouvoir l’arrêter. Je cherche à pénétrer le crime, lui-même, sous tous ses aspects. Je veux revenir à son origine ; comprendre pourquoi et comment il s’est mis en place et s’est déclenché ; quel est son sens ; de quelle manière il s’est déroulé et quelle place il occupe dans l’ensemble du projet du tueur… En l’explorant de cette manière, en m’imprégnant de lui comme si j’en faisais partie, j’en arrive à saisir ses défaillances. Et ce sont elles qui me permettent de trouver les bons indices, de les faire parler, pour remonter jusqu’au meurtrier et l’arrêter.»

Mulder était stupéfait. Il avait écouté Emy avec une profonde attention. Et il commençait à se rendre compte, qu’elle n’était pas qu’une jeune écervelée. Elle était animée par une forte conviction, savait où elle allait et ce qu’elle voulait. Il l’avait jugée un peu hâtivement, et uniquement d’après son comportement extérieur. Mais il commençait à sentir qu’une autre personne se cachait en elle. Et il était intrigué par cette étrange personnalité, qui lui semblait aussi riche que complexe.

*



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Message  Oiseaubleu Jeu 21 Aoû 2014 - 5:45


Le lendemain, ils se levèrent tôt. Alors qu’il était encore en train de se préparer dans la salle de bains, Mulder entendit tambouriner à la porte.

« Mulder ! lança Emy. Un appel pour toi ! Une certaine Dana Scully ! Qu’est-ce que je lui dis ? »

Mulder sortit aussitôt, une serviette autour de la taille, et saisit le combiné téléphonique : « Hey, Scully ! Comment vas-tu aujourd’hui ?... J’avais l’intention de t’appeler hier soir, mais j’ai eu quelques problèmes… Comment as-tu eu ce numéro ?… Ah, Skinner t’a déjà mise au courant… Non, ce n’est pas une affaire non classée… C’est ma coéquipière, Emy, l’agent que Skinner m’a demandé d’accompagner… Euh… Eh bien, si… En fait, il y a eu une inondation dans l’hôtel et quand nous sommes arrivés, hier soir, il ne restait qu’une seule chambre de disponible, alors… Je sais Scully, je n’étais pas d’accord moi non plus, mais Emy ne m’a pas laissé le choix… Mais, enfin Scully, ce n’est pas si grave… »

 La conversation dura encore quelques minutes puis Mulder raccrocha. «Tu aurais dû me dire que tu avais une petite amie, lui reprocha Emy alors qu’il reposait le combiné, on aurait cherché un autre hôtel. 

- Ce n’est pas ma petite amie, rétorqua Mulder, c’est ma coéquipière.

- J’ai du mal à le croire, renchérit-elle. Elle a fait une de ces voix quand j’ai répondu ! Et puis, une simple coéquipière ne se montrerait pas aussi jalouse…

- Mais qui te dit qu’elle est jalouse ? coupa Mulder, qui commençait à être agacé par le caractère effronté d’Emy.

- Ça saute aux yeux, Mulder. Et en tant que spécialiste en psychologie, je m’étonne que tu ne t’en sois pas rendu compte. Si elle n’est pas ta petite amie, elle est amoureuse de toi, c’est une évidence. C’est une femme qui a un fort caractère. Elle est rigide, possessive et elle n’acceptera pas de te partager avec une autre, même dans le cadre d’une relation purement professionnelle.

- Et tu as deviné tout ça, rien qu’en lui parlant quelques secondes au téléphone…, constata Mulder, une pointe d’ironie dans la voix. Alors là, je suis bluffé ! Et je n’ai plus aucun doute à présent, sur le succès de cette enquête. À ce rythme-là, tu auras surement dressé le profil du tueur avant la fin de la matinée. Et qui sait, peut-être que demain nous l’aurons déjà arrêté ! »

Mais le temps pressait et l’affaire « Scully » en était restée là. Quelques minutes plus tard, Emy et Mulder quittèrent l’hôtel pour se rendre au commissariat, où ils passèrent toute la matinée. Puis, ils se rendirent à l’endroit où l’on avait découvert les premiers cadavres.

Il s’agissait d’un hangar désaffecté, situé dans le quartier de « Montain View », sur les hauteurs de la ville. Cinq corps y avaient été retrouvés par la police locale, suite à un appel anonyme. Rien n’avait pu permettre aux enquêteurs de faire un lien entre les différentes victimes. Les données concernant leur âge, leur profession, leur confession, le milieu social auquel elles appartenaient…, tout cela avait révélé un groupe complètement hétérogène. Aussi, Emy avait-elle avancé l’hypothèse qu’elles avaient pu être choisies au hasard, par le tueur. Elle avait l’intuition que le fondement de ces meurtres ne reposait pas sur l’identité des personnes assassinées, mais sur la manière dont elles avaient été tuées.

En effet, elles avaient toutes subi d’horribles sévices. Sur les photographies que contenait le dossier, Emy avait pu voir un homme au front transpercé d’un piquet de bois, des corps démembrés, des organes retirés qu’on avait disposés sur le sol… Une véritable boucherie ! Même Mulder avait été choqué par ces images. Il avait rarement vu une scène d’une telle violence. De plus, les corps des victimes, dont les vêtements avaient été imbibés de lait et de vin, avaient été disposés de manière très particulière, comme si le meurtrier voulait mettre en scène leur mort. Ainsi, autour des cadavres, qui gisaient à terre selon un tracé  rectiligne, on avait méticuleusement disposé de grosses pierres, des bidons de lait, des animaux égorgés… Le tout semblait composer le tableau d’une scène macabre.

Pour les deux agents, l’après-midi avait donc débuté avec des échanges, des observations, des relevés… Mulder retrouvait les procédures habituelles des enquêtes de terrain. Il avait étudié attentivement le dossier qu’Emy lui avait transmis, et il cherchait à déceler des éléments nouveaux qui auraient pu avoir échappé à ses collègues et le mettre sur une piste. Mais, au-delà de cette enquête, il n’oubliait pas le deuxième motif de sa présence aux côtés de sa jeune coéquipière… Et il observait attentivement la manière dont elle abordait cette affaire.

Mulder était à la fois surpris et intéressé par la façon de faire d’Emy. Elle n’avait presque rien noté. Elle avait attentivement écouté leur collègue évoquer les faits. Elle ne l’avait interrompu qu’à de rares occasions, et ce, pour lui poser des questions d’une très grande précision. Silencieuse, très concentrée, elle avait ensuite inspecté l’intérieur du hangar avec une extrême minutie et en prenant tout son temps. Au-delà de l’inspection du terrain, elle semblait s’imprégner du lieu, de son agencement, de son atmosphère… Mulder avait l’impression qu’elle était à l’écoute de l’endroit et des choses… comme si elle attendait que la scène du crime ne lui parle et ne lui raconte ce qui s’était passé, ce jour-là.

Vers dix-neuf heures, après avoir passé au peigne fin les deux lieux, où avait été retrouvé l’ensemble des dix victimes, Emy avait laissé Mulder rentrer seul à l’hôtel. « Comment ça, tu veux examiner les corps ? avait-il lancé. Mais, les autopsies ont déjà été faites ?!

- Et alors ? avait-elle répondu calmement. J’ai besoin d’examiner les cadavres autant que les lieux du crime. On ne sait jamais… un détail a pu échapper aux médecins légistes. Après tout, ce sont ces morts qui portent les réponses à nos questions! Et puis, il faut que je m’imprègne d’eux. C’est essentiel pour moi, si je veux mener à bien cette enquête.

- Fais comme tu veux, avait rétorqué Mulder. Moi, je ne suis pas médecin, alors je me contente de faire confiance aux spécialistes. Et ça me convient très bien. De plus, je ne sais pas parler aux morts !»

Et Emy était partie…



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Message  Oiseaubleu Jeu 21 Aoû 2014 - 5:46


Une fois rentré à l’hôtel, Mulder avait appelé Scully, pour la tenir informée de l’évolution de l’enquête. Il voulait avoir son avis de scientifique sur cette affaire. Et puis, il avait également besoin de l’entendre : il n’arrivait pas à travailler sans elle ; il en avait trop l’habitude… cela faisait plus de cinq ans maintenant, qu’ils travaillaient ensemble. Elle lui manquait quand il ne la sentait pas à ses côtés...

Après plus d’une heure d’échange, quand tout fut dit sur l’enquête, la conversation changea de direction : « …Emy ? reprit-il, alors que Scully l’interrogeait sur sa coéquipière. Eh bien… que te dire… Elle est vraiment très spéciale, tu sais… Et je suis en train de réaliser que j’aurais mieux fait de refuser de l’accompagner... Attention, je ne remets pas en cause la qualité de son travail et son investissement dans cette affaire. C’est une fille extrêmement intelligente et elle a l’air d’être très consciencieuse dans tout ce qu’elle fait. Mais elle mène son enquête toute seule, de son côté. Nous n’avons eu quasiment aucun échange, depuis ce matin. De plus, elle a un sacré caractère, tu peux me croire… J’ai rarement vu ça… J’en viens même à regretter nos désaccords habituels, Scully… Au moins, avec toi, j’ai l’impression d’être écouté… même si c’est pour être contredit! »

Après avoir raccroché, Mulder consulta sa montre. Il était vingt-trois heures et Emy n’était toujours pas rentrée. Un peu inquiet, il l’appela : « Emy… Ça va ?... Je commençais à m’inquiéter… Comment ça tu ne rentres pas ?... Tu ne vas tout de même pas passer la nuit au labo ?... Si… Mais ma parole, tu es vraiment une acharnée… »

Cette fille était vraiment incroyable. Mulder n’avait jamais vu ça… Et moi qui pensais avoir tout vu avec Scully, se dit-il. En effet, il n’avait jamais rencontré un agent aussi individualiste et obstiné. Elle menait son enquête à sa manière, et seule. Elle n’avait même pas cherché à savoir ce qu’il avait retiré des observations qu’il avait faites, durant la journée. Elle semblait ne faire confiance à personne et ne pas prendre en compte les conclusions tirées par ses collègues. Difficile de parler d’un travail d’équipe, dans ces conditions. Décidément, Emy n’était pas une partenaire ordinaire. Même Scully s’était montrée bien plus coopérante, et ce, dès le début…

Le lendemain, Mulder avait retrouvé Emy pour la suite des investigations. L’enquête s’avérait plus compliquée que ce qu’il avait imaginé. Aucune piste sérieuse ne semblait se dessiner. Rien, il n’avait absolument rien que deux séries de meurtres sans lien apparent, perpétrés à environ trois mois d’intervalle et qui semblaient ne répondre à aucune logique. Les seuls éléments qui avaient permis à la police de faire le lien entre les deux affaires, étaient la similitude de l’agencement des deux scènes de crimes et ces coups de fils anonymes, passés à partir d’une même cabine téléphonique, et indiquant à la police les lieux exacts où se trouvaient les corps des victimes.

Pour les deux agents, ce fut une nouvelle journée d’un travail intense et soutenu. Ils cherchaient activement à trouver une faille dans l’élaboration et l’exécution de ces homicides… une faille qui aurait pu leur permettre d’appréhender le meurtrier, avant qu’il ne recommence à tuer…

Le soir venu, Emy était rentrée avec Mulder. Ils avaient rapidement mangé dans un petit restaurant qui se trouvait face à leur hôtel, puis ils étaient remontés dans leur chambre. Ensuite, ils avaient tous deux pris successivement une douche. Ils avaient besoin de se détendre, de décompresser.

Quand Mulder sortit de la salle de bains, il vit Emy, assise par terre. Elle avait replié les couvertures qui lui servaient de lit, et avait disposé des photos et divers morceaux de papier sur le sol. Elle était là, au milieu de son étrange composition, qui ressemblait presque à une toile. Elle était silencieuse, semblait pensive. Puis elle s’anima soudain et fit quelques gestes furtifs avec ses doigts… Elle semblait tracer des traits dans l’air… comme si elle voulait relier les différents morceaux de papier….

Sur le sol, elle avait disposé les photos des victimes et des lieux des crimes. A cela s’ajoutaient des petites feuilles de papier sur lesquelles étaient notés certains renseignements, comme les noms exacts des lieux où les corps avaient été trouvés, les différents éléments que le tueur avait disposés autour d’eux, le nom des victimes, leur profession, leur date de naissance, leur taille…

Mulder se rapprocha. A présent, il commençait à comprendre. C’était étrange que de la regarder travailler ainsi. Il avait l’impression de se voir. Son intuition, sa vivacité… Il se retrouvait en elle. « Tu sais qu’on a un peu la même façon de mener une enquête, dit-il, en s’asseyant à côté d’elle.

- Vraiment ? s’étonna-t-elle. C’est bien la première fois qu’on ne me prend pas pour une folle en me voyant travailler.

- C’est un puzzle, continua-t-il. Tu places les pièces de ton puzzle-enquête, et tu laisses ton intuition et ton cerveau faire le travail pour les rassembler et t’aider à reconstituer le tableau…

- Oui, c’est ça, en effet », confirma-t-elle, en souriant.

Elle semblait différente, tout à coup, comme satisfaite d’avoir trouvé un regard bienveillant. Et Mulder constata alors, que c’était la première fois qu’il la voyait se relâcher un peu, depuis qu’ils avaient quitté Washington. 

Puis ils avaient passé un long moment à faire le point sur leur enquête. Ils avaient passé en revue tous les éléments dont ils disposaient. Et ils en étaient venus à reparler de la deuxième série de meurtres.  Cette fois, c’était dans une résidence du centre-ville que les corps avaient été retrouvés. Là encore, aucun lien n’avait pu être fait entre les cinq personnes assassinées. Comme pour les premiers meurtres, les corps avaient été disposés de manière spécifique. Une des victimes avait été retrouvée une coupe à la main, assise sur un fauteuil. Les quatre autres, décapitées, avaient été couchées sur le sol : l’assassin avait remplacé la tête de chacune par celle d’un porc. Les corps, quant à eux, avaient été  recouverts ou entourés de vin, de fromage, de farine, de miel et même de quelques glands. On avait également retrouvé une baguette en fer, méticuleusement disposée, à côté de chaque cadavre.

Emy avait tout de suite remarqué le côté esthétique, quasi artistique, de ces meurtres. Pour elle, le tueur avait composé une toile qui contenait une foule de détails symboliques et qui avait probablement pour but de faire passer un message, tout en racontant une histoire. Mulder, lui, avait noté la dimension ritualiste de ces meurtres. Et s’il rejoignait Emy, quant à l’utilisation d’éléments symboliques, il penchait plus du côté d’un rite de type satanique ou occultiste. 

Ils étaient également tombés d’accord sur le fait que ces crimes étaient l’expression de la profonde colère d’un être doué d’une grande intelligence, qui cherchait un exutoire à ses démons. De plus, la précision et la minutie avec lesquelles le meurtrier avait tué ses victimes et agencé les scènes des crimes, sans laisser la moindre trace, démontraient qu’il avait accompli ces actes avec un parfait sang-froid, probablement sans éprouver la moindre compassion. Il avait agi en expert, et n’en était surement pas à ses premiers meurtres.
Emy avait déjà bien avancé dans ses recherches. Mulder avait complété le rapport qu’elle élaborait. Leur échange les stimulait et provoquait une émulation intellectuelle qui les poussait à aller au bout d’eux-mêmes, au bout de leur réflexion. Ils sentaient tous deux que quelque chose de plus grand se cachait derrière ces assassinats. Quelque chose qui était à leur portée et qu’ils pouvaient découvrir.




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Message  Oiseaubleu Jeu 21 Aoû 2014 - 5:47

 
« On fonctionne vraiment de la même façon, tu sais, réaffirma Mulder, en posant le rapport d’autopsie qu’il venait de consulter. Et c’est bien la première enquête que je mène avec un agent qui me ressemble autant… »

Le ton de sa voix avait progressivement baissé, comme s’il se parlait à lui-même.

« Tu es très intelligente, Emy, continua-t-il, et travailleuse aussi…Tu iras loin.

- Je l’espère, murmura-t-elle.

- Emy, reprit Mulder, avec un grand sérieux. Il y a une question que j’aimerais te poser…

- Laquelle ? fit-elle, intriguée.

- Est-ce que…. Est-ce que tu crois à l’existence d’une forme de vie extraterrestre ?

- Ah, ah, ah ! J’étais sûre que ça finirait par venir… On m’avait prévenue !

- Je m’en serais douté… Et tu me prends pour un fou, toi aussi…

- Eh bien pour tout te dire… non !... Je ne te prends pas pour un fou et je ne suis pas fermée à cette idée. Je pense que c’est tout à fait possible, voire même probable, vue la grandeur de notre univers. Mais quant à affirmer qu’ils existent… Il faudrait quand même que l’on m’en donne la preuve !

- Bon, eh bien c’est mieux que ce que je pensais », conclut-il, plutôt satisfait.

Et la conversation continua. Mais Mulder avait envie d’en savoir un peu plus sur cette jeune femme, qu’il trouvait si différente de ses collègues du FBI.

« Il n’y a pas grand-chose à savoir Mulder, répondit Emy, alors que son coéquipier l’interrogeait sur son parcours. Ma vie s’est résumée à mes études pendant longtemps et aujourd’hui, elle tourne uniquement autour de mon travail.

- Vraiment ? s’étonna Mulder. J’ai du mal à le croire… Tu dois bien t’accorder quelques moments de détente : voir la télévision, avoir quelques loisirs, sortir avec des amis… Ne me dis pas qu’une fille comme toi n’est pas sollicitée par ses collègues, au moins de temps en temps…

- Non, Mulder. Je n’ai pas de télévision, pas d’amis et plus de famille. Je consacre mon temps libre au sport, à la lecture et au jeu d’échecs… et je pratique ces activités en solitaire.»

La conversation avait ainsi été détournée, et ils avaient tous deux ouvert le livre de leurs souvenirs, pour partager les temps forts de leurs existences. Mulder lui avait parlé de l’enlèvement de sa sœur, de sa quête au sein du FBI, de l’arrivée de Scully et du chemin qu’ils avaient parcouru ensemble. Il lui avait aussi confié l’importance de cette relation si forte, qu’il entretenait avec sa coéquipière… sa meilleure amie… comme une sœur… Elle lui avait raconté la perte de ses parents, tous deux scientifiques, quand elle n’avait que deux ans ; la solitude et la froideur des foyers où elle avait grandi ; la découverte de ses capacités intellectuelles, et la compréhension qu’une brillante réussite scolaire et universitaire était sa seule chance de se sortir rapidement du foyer, de trouver sa place dans cette société et de donner un sens à son existence.

Dans ce contexte nocturne et intime, propice aux confidences, Emy s’ouvrait enfin. Et Mulder découvrait une jeune femme profonde, généreuse, pleine d’une sensibilité et d’une douceur qu’elle s’évertuait à cacher, derrière le masque arrogant et fermé de la femme devenue pur cerveau - par la force des choses... Il recevait avec émotions ses constats, ses confessions… Elle était d’une remarquable lucidité sur sa personne, sur la vie. Elle faisait également preuve d’une grande maturité, ce qui était rare pour une fille de son âge. Car elle n’avait que vingt-cinq ans, après tout... Mais la vie ne lui avait pas laissé le choix. Elle avait dû grandir vite…

Cependant, Emy n’était pas uniquement belle à l’intérieur. Et cela, Mulder l’avait remarqué dès  le matin où il l’avait vue pour la première fois, dans le bureau de Skinner. Elle s’affirmait avec une beauté très différente de la plupart des femmes qu’il avait rencontrées jusqu’alors. Ses longs cheveux bruns qui dégringolaient de manière indisciplinée, jusque sous sa poitrine ; ses grands yeux de velours, pétillants et charmeurs ; son visage, d’où émanait une certaine candeur ;  sa démarche et ses gestes, sensuels et gracieux… Elle était l’expression d’une beauté simple et naturelle ; une beauté qui s’affichait innocemment, sans complexe ni artifice… Aucune coiffure sophistiquée, des ongles qui n’étaient pas manucurés, pas de bijou, ni de maquillage, des vêtements simples et décontractés qui ne mettaient pas en valeur les atouts de sa féminité… Emy n’avait besoin de rien. Elle avait un charme et un pouvoir de séduction, innés… dont elle ne semblait même pas avoir conscience.

Tout en se faisant ces réflexions, Mulder se trouva surpris de se sentir si proche de cette jeune femme, qui n’était encore qu’une inconnue, deux jours auparavant. Il se sentait bien avec elle. Sa façon de travailler lui convenait et il devinait, qu’en plus d’être productive, leur collaboration serait enrichissante sur le plan personnel. Finalement, il était satisfait de ne pas avoir refusé de saisir cette opportunité qui s’était présentée à lui. Mais en même temps, il se sentait confus et gêné par rapport à Scully. Elle devait dormir à présent, après avoir passé sa journée à se morfondre dans son lit d’hôpital, qu’elle ne pouvait quitter… Et lui était là, sur une affaire, avec une autre coéquipière… une autre femme.

*


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Message  Oiseaubleu Jeu 21 Aoû 2014 - 5:48


Quand le jour se leva, une forte agitation régnait dans la petite chambre d’hôtel que les deux agents partageaient. La nuit avait apporté à Emy ce qu’elle attendait…

« C’est évident ! s’exclama-t-elle, alors qu’elle refermait son ordinateur portable qu’elle venait de consulter pendant une bonne demi-heure.

- Je t’écoute, dit Mulder, intéressé.

- Tu avais vu juste en ce qui concerne la dimension symbolique de ces crimes et même, sur leur aspect ritualiste. Cependant, pour moi, il ne s’agit pas d’un rite satanique ou occultiste. Les deux scènes de nos crimes racontent une même histoire. Celle-ci est probablement celle du tueur, et il cherche à s’en libérer. Mais elle est surtout celle d’un héros de l’Antiquité.

- Et qui est… ? demanda Mulder, soudain intrigué.

- Un voyageur… qui a dû affronter la malédiction d’un dieu et qui a erré pendant dix ans, avant de retrouver sa terre natale et sa famille. Tu ne devines pas, Mulder ?... Ulysse !

- L’Odyssée...,  se souvint-il.

- Oui, confirma-t-elle, c’est bien dans L’Odyssée que se trouvent les réponses à nos questions. Tu vois, les premiers assassinats illustrent l’épisode où Ulysse affronte le Cyclope. Et les deuxièmes décrivent celui où il combat la magicienne Circée. Tous les éléments qui ont été disposés et agencés autour des cadavres, comme le lait ou le vin, évoquent des détails présents dans l’œuvre d’Homère ; je viens de vérifier. Par exemple, dans la première série de meurtres, l’homme retrouvé avec un bâton de bois enfoncé dans le front, rappelle le Cyclope, dont Ulysse creva l’unique œil à l’aide d’un pieu d’olivier. De même, dans la deuxième série de meurtres, les têtes de porcs, qui remplacent les têtes humaines, font référence au sort jeté par Circée sur certains compagnons d’Ulysse. Ceux-ci s’étaient vus changés, justement, en porc. Et la baguette en fer, retrouvée à côté de chaque corps, représente la baguette magique dont Circée se servit pour effectuer cette transformation. »

Le meurtrier s’identifiait-il à Ulysse ? Avait-il connu des années d’exil et la quête douloureuse d’un retour chez lui ? Se voyait-il comme une victime, persécutée par un dieu invisible qu’aurait pu représenter le système judiciaire qui l’avait enfermé ?... Une foule de suppositions et de questions se pressaient dans la tête des deux agents, sans qu’ils ne puissent cependant, encore y répondre. Par où fallait-il commencer ? Que pouvaient-ils faire de cette découverte ?

« Il ne va pas tarder à recommencer, affirma  Emy.

- Comment le sais-tu ? interrogea Mulder.

- Je le sens… C’est une question d’instinct… Et puis, les précédents meurtres se sont produits à trois mois d’intervalle. Et cela fait presque trois mois que les seconds ont eu lieu…

- Alors que pouvons-nous faire ? Avoir trouvé ce à quoi font référence ces crimes, c’est bien, mais cela ne nous donne pas de piste valable pour remonter jusqu’à leur auteur… et l’arrêter.»

Ils étaient coincés. Les recherches faites dans les prisons et les hôpitaux psychiatriques environnants n’avaient rien donné.  Pas d’évasion récente, trop d’anciens détenus ou de patients qui auraient pu correspondre au profil ébauché… Leur exaltation était tout à coup retombée, quand Emy se leva d’un bond. Avec précipitation, elle se dirigea vers son sac et en sortit une carte de la ville, qu’elle s’était procurée le jour de leur arrivée.

« J’ai peut-être trouvé un lieu potentiellement susceptible de servir de cadre aux prochains meurtres ! lança-t-elle en tendant la carte pliée à Mulder.

- Explique-toi…

- Le parc d’attraction ! Regarde, il y a une annonce publicitaire pour un nouveau manège.

- "Devenez l’égal des héros antiques et venez découvrir notre « bateau fantôme » ! Il vous conduira sur les mers les plus terrifiantes, affronter les tempêtes provoquées par les dieux, et combattre  les diaboliques sirènes au chant mortel et ensorceleur", lut Mulder.

- Ulysse a affronté une terrible tempête provoquée par le dieu de la mer, Poséidon, et surtout, il a dû faire face aux Sirènes, expliqua-t-elle.

- Ça tient la route, en effet, acquiesça Mulder.

- La carte n’est peut-être pas très récente, mais je pense que ça vaut le coup de vérifier, proposa-t-elle, vivement. »

*


Ils avaient facilement trouvé le parc d’attraction. Mais ils furent quelque peu surpris en arrivant : le parc avait été fermé deux mois plus tôt, suite à un grave accident qui avait coûté la vie à un enfant. Les lieux, déserts, étaient donc un terrain plus que propice à une nouvelle série de meurtres.

Il n’avait fallu que peu de temps à Emy et Mulder pour trouver le manège qu’ils cherchaient. C’était une sorte de « train fantôme », rebaptisé « bateau fantôme », car les véhicules qui permettaient de rentrer dans le manège et d’en suivre le parcours, étaient de petites embarcations flottant sur un long couloir rempli d’eau.

« Ça y est ! cria Emy, au bout d’un moment. Ça fonctionne, le manège démarre. »

Et ils s’étaient engouffrés dans le « bateau fantôme »…

Mulder avait sauté en cours de route, sur la plateforme du premier niveau, qu’il voulait explorer. Emy avait continué, puis elle avait imité son coéquipier. Le bâtiment était vaste et comportait plusieurs salles qu’ils se devaient de fouiller, scrupuleusement. Mais la chose n’allait pas être aisée car le manège était plongé dans une totale obscurité. Ni Mulder, ni Emy n’avaient réussi à réactiver le système d’éclairage.

Tout d’un coup, alors qu’il inspectait toujours la pièce où il se trouvait, Mulder entendit un grand bruit puis un cri. « Emy ! hurla-t-il. Emy où es-tu ? » Le cœur s’accélérant subitement, Mulder couru en direction de la voix qu’il avait distinctement reconnue. Eclairé par sa torche et armé de son revolver, il lui fallut de longues minutes pour arriver à se diriger dans les dédales du manège. Il parcourait à présent le troisième niveau du bâtiment. La voix se rapprochait toujours… Quand il la vit, enfin.

Les mains agrippées à une rampe métallique, le corps suspendu dans le vide, Emy se débattait pour tenter de remonter sur la passerelle dont elle était tombée. Aucune prise n’était à sa portée. Elle semblait à bout de forces. Au-dessous d’elle, on ne voyait qu’un large et profond trou noir…

Promptement, Mulder s’élança sur la passerelle et, passant ses bras à travers les rampes de protection, il saisit ceux de la jeune femme : « Il faut que tu tiennes le coup, Emy.

- Je n’en peux plus, Mulder, gémit-elle. J’ai une forte douleur dans l’épaule… Je vais lâcher…

- Non, tu ne vas pas lâcher, affirma Mulder avec aplomb, pour l’encourager. Je ne te laisserai pas tomber, Emy. Accroche-toi, je vais te sortir de là ! »

Vigoureusement, Mulder la tira vers lui, alors qu’elle s’agrippait à ses bras en essayant de se hisser vers la rampe supérieure. Elle crut y parvenir, lâcha prise, reprit la main que Mulder lui tendait… Finalement, au bout de longues minutes d’une lutte acharnée, elle réussit à remonter le long de la barrière de sécurité puis à se glisser entre deux rampes. Haletante, Emy resta quelques secondes couchée sur le dos, sur le plancher métallique de la passerelle, cherchant à reprendre son souffle. Puis, elle se redressa. Mais, alors qu’elle se relevait à peine, elle se jeta sur Mulder en lui criant : « Attention ! » Et saisissant avec vivacité l’arme que son coéquipier avait posée au sol, elle tira par trois fois en visant le fond de la pièce, alors qu’une autre détonation retentissait au loin. Elle se releva ensuite d’un bond, l’arme pointée devant elle, et se dirigea vers l’endroit où elle avait tiré. Mulder, déséquilibré, avait basculé sur la plate-forme. Mais il se releva rapidement, pour la suivre.

Arrivant à hauteur de la jeune femme, il aperçut le corps d’un homme inanimé, qui gisait au sol. Emy tourna alors légèrement la tête vers son collègue : « Il est fort probable que ce soit notre tueur, déclara-t-elle. En tout cas, c’est lui qui m’a fait passer par-dessus la rampe de la passerelle et il devra s’en expliquer… » Mais alors qu’elle tendait son arme à Mulder : « Eh ! Mais tu as du sang sur ta chemise… Mulder, tu es blessé… » Et déjà, elle avait relevé le vêtement de son coéquipier pour examiner sa blessure. « Ne t’en fais pas, la rassura-t-il, lui-même surpris de constater qu’il avait été touché, je ne pense pas que ce soit grave. Je ne sens presque rien. »

La balle n’avait fait qu’effleurer sa hanche. Mais Mulder comprit, à ce moment-là, que sa coéquipière - grâce à sa vigilance et à la vivacité de sa réaction - lui avait probablement sauvé la vie.

*



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Message  Oiseaubleu Sam 23 Aoû 2014 - 6:20


Ils avaient retrouvé leur chambre d’hôtel dans la soirée, après avoir mangé dans leur petit restaurant. Emy était à présent debout, face à la fenêtre, une tasse de thé à la main. Elle semblait perdue dans ses pensées. Mulder s’avança vers elle et lui demanda doucement : « Ça va, Emy, tu te sens mieux ?

- Oui, assura-t-elle. Je vais bien et le calmant que j’ai pris a fait disparaître la douleur que j’avais dans l’épaule.

- Tu aurais peut-être dû accepter que l’on t’examine, se risqua-t-il.

- Ne t’en fais pas. J’ai une formation médicale et je suis tout à fait à même d’évaluer si une douleur nécessite ou non, un examen plus approfondi. Si le problème persiste, j’irai consulter un spécialiste à notre retour à Washington.

- Pas évident d’entrer dans le métier avec une enquête comme celle-là, constata-t-il.  Mais rassure-toi, ce n’est pas toujours aussi mouvementé. Et puis tu t’en es rudement bien sortie…

- Merci, Mulder. Mais tu sais, je m’y attendais. Quand on choisit de faire ce métier, on accepte les risques qui vont avec, et il ne faut pas venir s’en plaindre après. Ça fait partie du contrat. »

Elle s’était retournée vers lui. Ils se trouvaient face à face. Mulder prit alors la tasse des mains de la jeune femme, et sans cesser de la regarder, il la posa sur le bureau qui se trouvait à côté de lui. Emy fixait Mulder d’un air interrogateur. Elle sentait qu’il se passait quelque chose mais elle n’aurait su dire quoi. Lentement, Mulder se rapprocha d’elle, et délicatement, il glissa ses bras autour de sa taille. Surprise, elle sursauta quand elle sentit ses mains sur son corps, mais ne chercha pourtant pas à s’en dégager.

« Mulder, qu’est-ce que tu fais ? demanda-t-elle, visiblement embarrassée.

- N’aie pas peur, Emy. Tu ne crains rien. Fais-moi confiance…»

Alors qu’il lui répondait, Mulder avait délicatement enlacé le corps de la jeune femme et il l’avait rapproché du sien. De son côté, Emy ne savait comment gérer la situation. Elle avait confiance en son coéquipier mais son geste la laissait perplexe. Elle restait sans réaction, comme pétrifiée. Jusque-là, elle avait toujours su comment réagir face aux événements qui se présentaient à elle, même quand ils étaient les plus inattendus. Ses grandes capacités  d’observation et d’analyse l’avaient servie dans ce sens. Mais là, elle était perdue, désarçonnée. C’était la première fois qu’un homme la touchait ainsi.

Maintenant, les bras de Mulder s’étaient refermés sur elle et ils se trouvaient tous deux collés, l’un contre l’autre. Il l’enlaçait avec tendresse. Il voulait éveiller en elle des sensations nouvelles, celles que seuls l’affection et l’amour peuvent faire naître dans un cœur humain. Mais Emy ne répondait pas à son appel. Elle ne réagissait pas. Elle avait gardé ses bras ballants. Son front, du fait de l’étreinte de Mulder, s’était appuyé légèrement contre le torse de celui-ci. Mais elle n’osait faire le moindre mouvement. Elle ne savait que faire. Qu’était-elle censée faire ? Elle cherchait en elle la réponse, le geste juste qui lui aurait permis d’avoir un comportement adapté à la situation…

« Emy, murmura Mulder. N’aie pas peur et laisse-toi aller.

- Je n’ai pas peur, répondit-elle, promptement. Mais je ne sais pas ce qu’il faut que je fasse. Qu’est-ce que tu attends de moi Mulder ? Qu’est-ce que ton geste signifie ? »

De plus en plus, Emy se sentait en position de faiblesse. Elle qui avait toujours été devant les autres, elle qui avait toujours tout dominé ; elle se sentait remplie d’une vulnérabilité qui l’incommodait profondément et la déstabilisait. Elle était là, la faille. Il le savait. Il l’avait compris au moment où, durant cette nuit qui avait fait de leur chambre d’hôtel le théâtre de leurs confidences, elle avait évoqué sans retenue, sa vie.

Emy ne savait pas ce que signifiait, « aimer ». Elle avait perdu ses parents à l’âge de deux ans. Et sa vie s’était ensuite résumée aux dortoirs des différents foyers où elle avait été placée : des lieux de froideur et d’isolement. A l’école, elle avait toujours été en décalage avec les autres, du fait de sa précocité intellectuelle. Et plus tard, à l’université, elle avait côtoyé des étudiants bien plus âgés qu’elle. En fin de compte, elle n’avait été nulle part à sa place… Et elle avait ainsi grandi et évolué, avec pour unique compagne, sa solitude. Après la mort de ses parents, elle n’avait plus jamais été aimée. Elle n’avait plus jamais aimé. Et comme elle avait oublié jusqu’au visage même de sa mère, elle avait oublié ces sensations, ces frissons, ces gestes… qu’initie l’amour. Personne ne lui avait jamais appris à percevoir, à ressentir, à reconnaître ce sentiment. Or elle ne faisait que ce qu’elle apprenait. Elle fonctionnait ainsi. De plus, sa vie lui avait imposé une maîtrise absolue de son mental, de ses émotions, de ses réactions, de toute sa personne. Elle ne lui avait pas permis de laisser place à sa spontanéité, aux élans de son cœur, à son imagination. Depuis le début, tout avait été réfléchi, pensé, calculé. Au départ, ce n’était une question de survie. Mais à présent, c’était sa vie. Et elle en avait oublié qu’il y avait une autre voie possible, pour elle : une vie dont il fallait profiter avant qu’il ne soit trop tard, et qui était là, à portée de ses doigts… et de son cœur.

« Emy, répéta Mulder en haussant un peu la voix. Tu es toujours là, avec moi ?

- Oui, répondit-elle, alors qu’elle reprenait contact avec le réel.

- Ferme les yeux et laisse-toi aller. Ne cherche pas à tout contrôler. Essaye juste de ressentir ce que tu perçois en toi, et donne toi l’autorisation de réagir comme tu l’entends… sans avoir peur de faire une erreur ou de ne pas faire ce que l’on attend de toi.

- Mais je ne sais pas Mulder ? reprit-elle, d’une voix qui commençait à s’érailler. Tu me parles de choses que je ne comprends pas ? Je ne sais pas ce que tu cherches ?  Je ne sais pas si ta Scully serait très contente, si elle nous voyait ensemble… si elle savait que tu tiens une autre femme qu’elle, dans tes bras... »

Sa réponse trahissait une émotion grandissante. Elle commençait à se sentir profondément troublée par ce contact prolongé, avec son partenaire du FBI. Elle aurait voulu le repousser, l’éloigner le plus loin possible d’elle, mais son corps refusait de lui obéir. Il avait cédé, et il acceptait cette étreinte, sans lui opposer aucune résistance.

« Scully n’a rien à voir dans cette histoire, objecta Mulder. Il ne s’agit pas d’elle, en ce moment, mais de toi. C’est toi que je tiens dans mes bras, Emy ; pas elle. Et puis, nous ne sommes pas ensemble, je te l’ai déjà dit. Scully est ma coéquipière, ma meilleure amie… pas autre chose... »

Sa réponse avait été ferme. Il ne semblait en rien gêné par la situation. Il était sûr de lui, sûr de son geste. Et il n’était pas question pour lui, de s’arrêter en cours de route. Il voulait aller au bout de son ressenti. Il voulait donner une concrétisation à cette impulsion qui lui avait fait comprendre ce qu’il pouvait apporter à la jeune femme, ce qu’ils pouvaient partager, ensemble. Elle méritait toute l’attention qu’il lui portait. Elle était une personne d’une qualité rare. Et Mulder voulait l’emmener avec lui, lui montrer cet autre chemin qu’elle ne connaissait pas… Le chemin qui mène d’un cœur à un autre…

Mulder serrait Emy plus fort, contre son corps. D’un de ses bras, il avait emprisonné sa taille, tandis que de l’autre, il remontait le long de son dos, à la recherche de sa nuque. Un fois atteinte, il l’avait enlacée délicatement, puis avait plongé ses doigts dans son épaisse chevelure. Il avait rapproché, encore, le visage de la jeune femme de son torse. Et il avait incliné sa tête, pour la coller contre la sienne…

Emy avait fermé les yeux. Elle avait tourné la tête, de sorte que sa joue était en contact avec le torse de Mulder. Elle entendait battre son cœur. Vite, vite… son rythme cardiaque s’était emballé aussi, comme le sien… Intérieurement, il était aussi tendu qu’elle. Mais il n’avait pas perdu pieds. Alors qu’elle… elle se sentait faiblir, défaillir… Un flot de sensations nouvelles et imprécises… Un souffle lointain qui remontait du plus profond de son être et qui lui parlait de son passé... Des mots, des gestes, des larmes... oubliés... Elle craquait. Elle ne pouvait plus se contenir, ni se maîtriser… Elle se sentait partir…

Alors, elle s’abandonna aux émotions qui la traversaient. Elle déposa à terre les armes qu’elle avait toujours brandies,  pour résister à l’ennemi que représentait pour elle, son cœur - son système émotionnel, comme elle se plaisait à dire…. Ses yeux s’étaient remplis de larmes qui inondaient son visage et coulaient le long de ses joues. Elle avait replié ses bras pour sentir encore plus fort, contre elle, le corps de celui qu’elle considérait désormais, comme son ami.

« Mulder… qu’est-ce qui m’arrive ? murmura-t-elle.

- N’aie pas peur Emy…, lui souffla-t-il au creux de l’oreille. Tu es juste en train de t’ouvrir à la vie… »

Sa voix se voulait rassurante. Il voulait la réconforter, lui prouver qu’elle pouvait avoir confiance en lui, que tout ceci était pour son bien. Puis, après avoir passé de longues minutes enlacés, Mulder prit son visage entre ses mains et il le releva vers lui. Ils se fixèrent intensément. Leurs fronts, leurs yeux étaient tout proches… Leurs peaux se frôlaient presque… Ils se cherchaient… Ils se voulaient… Ils frémissaient comme s’ils avaient peur… pourtant leurs mains, qui s’étaient relâchées, s’étaient dirigées instinctivement l’une vers l’autre… Et elles se serraient maintenant, comme pour encourager cet élan venu des profondeurs de leur être et qui les poussait, l’un vers l’autre.

Vite, vite… leurs cœurs s’emballaient encore… La folle pression du sang qui coulait dans leurs veines faisait monter leur tension artérielle. L’intensité était forte, trop forte… Aucun des deux ne pouvait plus résister. Et Mulder, lâchant alors les deux mains de la jeune femme, attrapa dans un même élan sa taille et l’arrière de sa tête, et la plaquant vivement contre lui, il captura sa bouche entre ses lèvres.

La vivacité de son geste, mêlée à la profonde douceur de son baiser, avait emporté les dernières réticences d’Emy. Elle s’était laissé faire. Puis, encouragée par la confiance et la sécurité qu’avait fait naître en elle, l’étreinte de Mulder, elle avait osé exprimer ses propres désirs qu’elle découvrait, pour la première fois. Elle était retournée chercher ses lèvres, qu’il venait de lâcher. Elle s’était relevée sur la pointe des pieds pour attraper sou cou et enlacer sa tête, qu’elle avait attirée contre elle. Et ils s’étaient laissé emporter par une folle étreinte où se mêlaient leurs désirs inassouvis, leurs passions retenues, leurs innombrables frustrations…

Mulder aimait une Scully qui se refusait à lui, par la distance et la froideur qu’elle mettait entre eux, dès que la frontière qui séparait l’amitié de l’amour était menacée. Emy était amoureuse d’un de ses collègues avec qui elle avait fait ses études à l’école du FBI, mais elle ne savait ni reconnaître, ni exprimer ce sentiment, qu’elle n’identifiait pas...

Ils étaient donc tous les deux, seuls, depuis des années. Seuls, et incompris aussi… Leurs réactions, souvent mues par une impulsivité débordante ; leurs convictions, perçues comme originales, les avaient fait passer pour des marginaux. De même, ils s’étaient tous deux fait remarquer pour leur insoumission, car ils s’étaient plus d’une fois montrés rebelles à l’autorité, parfois injuste, de leurs supérieurs. Ainsi, ils évoluaient dans leur vie avec une fougue et une impétuosité excessives, qui masquaient leurs difficultés à s’adapter au monde incohérent dans lequel ils évoluaient. Et ils se débattaient, tant bien que mal, dans une existence où ils se sentaient perdus, au milieu d’un désert affectif qui était à l’origine de leur surinvestissement dans leur travail. Leur rencontre leur avait apporté une reconnaissance et une compréhension mutuelles ; leur baiser avait été une libération, autant qu’un exutoire.

*



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Message  Oiseaubleu Sam 23 Aoû 2014 - 6:22


Ils se regardaient à présent. Leurs visages et leurs corps s’étaient séparés progressivement, relâchant peu à peu cette pression qui les avait unis, l’un à l’autre. Avec lenteur et délicatesse, leurs doigts s’étaient défaits de leur enlacement. Puis, sans un mot, chacun s’en était retourné à ses occupations. Ils avaient besoin de respirer un peu, de prendre de la distance… de digérer ce qui s’était passé.

Un peu plus tard, dans la soirée, Mulder était venu s’asseoir à côté d’Emy, sur son lit improvisé. « Ça va ? demanda-t-il.  Tu ne m’en veux pas au moins ? » Elle éclata de rire. Un rire qui envahit la pièce toute entière, de sa présence.

- Non, ne t’en fais pas, le rassura-t-elle. Je ne resterai pas traumatisée par tes fougueux baisers !… »

Elle attendit quelques instants avant de continuer, comme si elle réfléchissait à ce qu’elle allait dire… Justes, il fallait trouver les mots justes… Mais elle renonça finalement, et reprit le fil de son discours, de manière spontanée : « Je dois t’avouer que ça m’a fait un bien fou. Je n’aurais jamais imaginé que c’était aussi bon…

- Pour tout te dire, lui confia Mulder, moi aussi ça m’a fait du bien. Et je t’avoue que ça faisait un bon moment que ça ne m’était plus arrivé.

- … Tu l’aimes ta Scully, n’est-ce pas ? se risqua-t-elle alors, sur le ton de la confidence.

- Si tu parles d’amour… Je ne sais pas… Peut-être… Surement…, répondit Mulder, devenant tout à coup songeur. On a partagé tellement de choses ensemble…

- Mais tu restes avant tout son coéquipier. Et peut-être qu’elle n’imagine pas que tu puisses être autre chose, pour elle… du moins, pour l’instant. Mais avec le temps et si tu sais y faire, je suis sûre… 

- Ah ! Ah ! Mademoiselle Emy et ses profils psychologiques ! plaisanta Mulder, qui voulait couper court à cette conversation qui réveillait en lui une douleur profonde. Oublions les amours impossibles de Mulder et Scully et revenons à toi… cachotière… tu ne dis rien, mais je suis sûr que tu as dû en faire tourner des têtes… Et il y en a surement bien un…

- … Oui, il y en a un…, avoua-t-elle furtivement.

- Oh ! Oh ! lança Mulder d’un air taquin. Je veux en savoir plus…

- Eh bien… Il s’appelle Andrew Sanders… Nous étions dans la même promotion à Quantico et nous sommes rentrés ensemble au Bureau… Cela fait trois ans que l’on se connaît…

- Il est libre ? s’enquit Mulder.

- Hum… Il semblerait que oui…

- Alors qu’est-ce que tu attends ?

- Je ne sais pas, Mulder, répondit-elle, soudainement troublée. Je ne connais rien à ces choses-là, tu sais… J’ai toujours été seule… Et, en fin de compte… peut-être bien que je t’attendais… pour comprendre… »
Il y eut un long silence, puis Emy reprit : « Tu sais, je pense que notre rencontre n’est pas due au hasard. Je suis sûre que la vie vient de nous donner une chance d’apprendre quelque chose de nouveau sur nous-même. Et puis, elle nous a permis de nous rencontrer, de nous découvrir, et pour ma part, j’aimerais bien que nous restions en contact, que nous soyons amis.

- Mais j’y compte bien, répondit Mulder, un sourire aux lèvres.

- A la condition qu’on ne prenne plus une chambre pour deux, si l’on devait un jour retravailler ensemble, ajouta-t-elle, un brin de malice dans la voix.

- Mais je n’y suis pour rien, répliqua Mulder, qui rentrait dans son jeu. C’est toi qui a pris la décision pour nous deux, sans m’écouter…

- Ouais… mais je ne savais pas vraiment ce que je faisais. Je n’avais jamais eu ce genre d’expérience, avant. Et puis, c’était aussi avant de t’avoir embrassé. Désormais, je saurai qu’il vaut mieux garder quelques distances… quand on travaille avec un coéquipier masculin trop séduisant !

- Je te rappelle que je n’étais pas d’accord, renchérit Mulder. Peut-être même que tu l’as fait exprès, après tout, et que c’est moi qui me suis laissé piéger…

- Quoi ?... Tu oses insinuer que… »

Elle avait bondi. Ils s’étaient alors laissé emporter par un fou rire. Ils se sentaient bien, ensemble. Ils étaient heureux. La fin de cette affaire s’avérait riche en émotions positives. De plus, elle leur apportait une certaine sérénité et la satisfaction d’avoir bien fait leur travail. La série de meurtres était définitivement arrêtée et ils avaient brillamment réussi à résoudre une enquête qui avait laissé leurs collègues complètement impuissants, pendant plusieurs mois.

*


«  Scully ? Oui, c’est moi. Comment te sens-tu ?... Quoi ? Déjà ?... Non, non, ce n’est pas ce que je veux dire… C’est juste que je prends l’avion tout à l’heure et que je suis convoqué demain matin chez Skinner pour lui remettre mon rapport. Je ne sais pas si je serai sorti assez tôt pour venir te prendre et je ne voudrais pas te faire attendre… Ok, en fin de matinée, ça devrait être bon… Non, non, Scully, je ne te laisse pas prendre un taxi. Je viens te chercher, j’y tiens… Oui, tout s’est bien terminé. Il est sous les verrous… Un vrai malade… Je t’explique rapidement : il y a plusieurs années de ça, notre tueur, Ulysse Grant, a été condamné à dix ans de prison. Lors de son incarcération, il s’est passionné pour la mythologie gréco-romaine et a découvert l’histoire du héros antique, dont il porte le prénom. Il s’est complètement identifié à ce héros. Et les rapprochements qu’il a pu faire entre des événements marquants, de sa propre vie et de celle du personnage de l’Odyssée, lui ont fait penser que leurs destins étaient liés. Dans sa folie, Grant s’est cru victime de la même malédiction qu’Ulysse, qui était  poursuivi par la haine du dieu Poséidon ; ce même dieu qui lui a infligé toutes les épreuves qui sont relatées dans l’Odyssée. Et c’est cela qui a conduit notre homme à imaginer ces crimes horribles. En mettant en scène l’histoire du périple d’Ulysse à travers ses meurtres, Grant était convaincu qu’il s’en délivrerait. Mais heureusement, grâce à Emy, nous l’avons arrêté juste avant qu’il ne tue à nouveau. Je te raconterai tout ça plus en détail, demain… »

Mulder avait appelé Scully de la voiture, alors qu’il était sur le chemin du retour avec Emy. Il avait ressenti un besoin urgent de lui parler. Il avait besoin de la voir, de sentir sa présence près de lui. Elle lui manquait… Il irait la retrouver dès que possible. Mais pour l’heure, il avait un rapport à rédiger.

*



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Message  Oiseaubleu Sam 23 Aoû 2014 - 6:32



« Eh bien, je dois vous féliciter Mulder ! lança Skinner. Je pense que Kersh sera surpris par votre performance. Il était très réticent à votre retour sur des enquêtes de terrain… Pour ma part, je ne doutais pas de votre réussite !

- Je vous remercie, répondit Mulder. Mais vous oubliez que je n’étais pas seul sur cette affaire. Et très honnêtement, c’est à Emy que revient tout le mérite de sa résolution. De plus, elle m’a sauvé la vie…

- Vous aussi, je crois…, renchérit le directeur adjoint. Alors Mulder, que pensez-vous d’elle ? Votre avis, en tant qu’agent ?  

- C’est un excellent élément qui apprend très vite et qui sera très bientôt, un de vos meilleurs agents. Elle est très compétente, sérieuse, rigoureuse et consciencieuse dans son travail. Elle se sert intelligemment de sa vivacité d’esprit, de ses facultés d’observation et d’analyse. Elle a une intuition d’une rare justesse et elle use finement de sa capacité à anticiper sur les événements. De plus, ses tirs sont d’une très grande précision ! Le tout est de lui trouver un bon coéquipier, avec qui elle pourra se sentir en confiance et s’épanouir professionnellement. Pour le reste… disons qu’il lui faudra apprendre à mettre de l’eau dans son vin. Elle va devoir accepter la collaboration avec ses collègues autant que l’autorité de ses supérieurs, si elle veut garder sa place. Mais je suis très confiant.

- Bon, eh bien, j’ai déniché la perle rare, on dirait. Reste à trouver le coéquipier…

- En effet,  répondit Mulder, sans porter attention au regard insistant que Skinner posait sur lui. Emy m’a parlé d’un autre agent qui vient d’arriver dans votre service et avec qui elle s’entend très bien. Un certain Andrew Sanders…

- Mulder, réfléchissez une minute…, interrompit Skinner, qui semblait ne pas avoir entendu la suggestion faite par son agent. Kersh ne vous supporte pas et il a décidé de vous séparer de Scully, peut-être que ça pourrait être une chance pour vous…

- Quoi ? lança Mulder, qui semblait ne pas comprendre.

- Eh bien, Watson... Vous pourriez faire équipe tous les deux. En faisant pression sur ma hiérarchie, je pourrais peut-être vous reprendre sous ma direction et relancer ainsi votre carrière…

- Ma carrière ou la vôtre ? rétorqua Mulder, furieux de cette proposition.

- Mais enfin, Mulder…, objecta Skinner, surpris par la violence de sa réaction.

-  Alors c’était ça le piège ! s’exclama-t-il. Scully avait raison depuis le début, mais je n’ai pas voulu l’écouter.

- Mulder, s’il-vous-plaît, calmez-vous. Personne n’a cherché à vous piéger. Mais avouez que la rapidité avec laquelle vous avez résolu cette affaire est surprenante et qu’il est bien normal de vouloir conserver une équipe qui marche.

- Et vous croyez que je pourrais faire ça à Scully, après tout ce que nous avons vécu ensemble…

- Justement Mulder, peut-être qu’il serait temps de passer à autre chose. Pour vous comme pour elle… Kersh a essayé de lui donner une chance en…

- En l’envoyant se faire flinguer par un collègue incompétent ! poursuivit Mulder, en coupant la parole à Skinner.

- C’était un accident, Mulder. Cela peut arriver à tout le monde…

- Peu importe, reprit Mulder. Ma réponse est non ! Scully peut faire ce qu’elle veut de son côté, mais moi, je refuse de bosser sans elle.

- Bon, c’est comme vous voulez, Mulder. Je comprends tout à fait… L’affaire est close. Je verrai pour ce Sanders… Cependant, je vous laisse quand même jusqu’à demain midi pour réfléchir… »

                                                                           *                        

                                  
Il était passé la prendre dès qu’il était sorti du bureau de Skinner et à présent, ils étaient tous les deux dans sa voiture.

« Tu avais raison Scully. Je me suis fait avoir avec cette affaire…, commença-t-il.

- Oh… Tu t’es fait épingler pour la chambre ?

- Non, c’est passé inaperçu. Mais Skinner m’a proposé de me reprendre dans son service pour faire équipe avec Emy, sur des enquêtes criminelles.

- Et ?...

- Et quoi ? reprit-il, visiblement déconcerté par la réaction de Scully.

- Et qu’est-ce que tu lui as répondu ?

- Eh bien… Qu’est-ce que tu crois que je lui ai répondu ? Qu’est-ce que tu aurais fait toi, à ma place ? » demanda-t-il d’une voix quelque peu provocatrice.

Puis, brusquement, il donna un grand coup de volant et immobilisa la voiture sur le bord de la route. Il se tourna vers elle et la regarda fixement : « Tu aurais fait quoi à ma place, Scully ? Tu aurais pensé à sauver ta carrière ou à rester fidèle à ton coéquipier avec qui tu as tout partagé depuis plus de cinq ans ? » Il avait prononcé ces mots avec une sorte de défi dans la voix. Et il attendait sa réponse. « Mais enfin Mulder, ne te mets pas dans un état pareil pour ça, répondit-elle, étonnée par son attitude. En suivant cette affaire tu as accepté de travailler sans moi. Et il est compréhensible que Skinner t’ait fait cette proposition, vus les excellents résultats qu’a donnés ta collaboration avec cette Emy Watson. 

- Je te rappelle que toi aussi, tu as accepté de travailler sans moi, observa Mulder, sur un léger ton de reproche.

- Oui, mais moi j’ai fini dans un lit d’hôpital, ajouta-t-elle. Et visiblement, ma collaboration avec l’agent Peyton Ritter, avec qui je ne me suis pas vraiment bien entendue, soit dit en passant, n’a pas été aussi concluante que ta collaboration avec ton Emy Watson… »

Scully était jalouse et elle le provoquait… Elle n’en était pas forcément consciente mais Mulder, lui, l’avait compris. « Alors, c’est ça, considéra-t-il, tu es jalouse…

- Non, je ne suis pas jalouse Mulder, réfuta-t-elle. Je fais un simple constat. Travailler sans toi n’a pas été un réel succès, pour moi… A l’inverse, pour toi, il en a été autrement. Tu as rencontré une coéquipière avec qui tu t’entends apparemment à merveille, et grâce à qui tu as résolu rapidement une affaire très complexe. Et maintenant, on te donne une chance de retrouver la place que tu mérites au sein de FBI…

- Mais je ne la veux pas cette place, Scully ! lança-t-il. Je ne la veux pas si tu n’es pas avec moi ! Et le fait que je m’entende bien avec Emy n’a rien à voir là-dedans ! Ce n’est pas avec elle, que je veux continuer à chercher les réponses aux questions soulevées par les "Affaires non classées"… Et puis, ce sont les "Affaires non classées" que je veux, pas autre chose… Tu sais que j’ai du mal à te comprendre, parfois… »

Mulder avait remis le moteur en route… Il venait à peine de la retrouver. Elle venait de sortir de l’hôpital après avoir failli mourir. Ce n’était ni l’heure, ni l’endroit pour une dispute qui n’avait, au fond, aucun fondement… « Bon, on arrête là, ajouta-t-il. Je n’ai pas envie qu’on se dispute pour des bêtises de ce genre. Je suis désolé, c’est moi qui suis stupide. Ces derniers jours ont été éprouvants et mon entretien avec Skinner m’a profondément énervé… »

Il roulait à nouveau depuis quelques minutes quand Scully, qui regardait les panneaux de signalisation d’un air interrogateur, lui demanda : « Mais, où vas-tu Mulder ? Tu viens de louper la sortie…

- Je sais, répondit-il posément. On fait juste un petit détour et je te dépose ensuite chez toi. »

Elle n’avait rien dit... Peu après, Mulder coupait le contact de sa voiture dans une rue qu’elle ne connaissait pas. « Je vous en prie, agent Scully ! » dit-il en ouvrant sa portière et en l’invitant à sortir du véhicule. Mais Scully ne comprenait pas, et elle s’exécuta en l’interrogeant du regard. « Surprise !… », lança-t-il fièrement, alors qu’il lui présentait son bras.

Scully était très intriguée par l’attitude surprenante de Mulder, qui ne lui était certes pas désagréable. Elle avait pris son bras et le suivait dans cette rue qui lui était inconnue. « C’est un excellent restaurant, tu verras, avait-il annoncé. Et il y a même de très bons plats végétariens ! J’ai testé spécialement pour toi ! » Scully était à la fois stupéfaite et charmée par l’attention de Mulder et elle s’était laissé conduire avec plaisir. Ils avaient tous deux oublié leur dispute…

En ce début d’après-midi, Mulder et Scully étaient attablés dans un petit restaurant… Ils avaient laissé derrière eux l’agitation frénétique de la ville et du Bureau, l’atmosphère angoissante et l’odeur de mort de la chambre d’hôpital… Ils s’offraient un moment de détente et de partage ; ils faisaient une pause, ensemble. C’était aussi cela que Mulder avait compris au contact d’Emy : qu’il lui faudrait apprendre progressivement à se détacher un peu de son travail, de sa quête, de ses obsessions… s’il voulait s’ouvrir au monde, à Scully, et vivre, peut-être un jour pleinement, sa vie d’homme.  

Plus tard, quand Mulder l’eut déposée chez elle, Scully eut tout le loisir de repenser aux événements de la journée. L’invitation surprise de son ami l’avait ravie, mais elle n’était cependant pas tout à fait tranquille. Certes, Mulder avait fermement refusé la proposition de Skinner. Mais combien de temps pourrait-il continuer à travailler sous les ordres du directeur adjoint Kersh ? Jusqu’à quand accepterait-il d’être rabaissé à effectuer des tâches subalternes? Et si Skinner lui proposait à nouveau d’enquêter sur des affaires criminelles avec l’agent Watson ?  Ne finirait-il pas par céder et par accepter de travailler sans elle ? 


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Message  Oiseaubleu Sam 23 Aoû 2014 - 6:39



Mon deuxième épisode se déroule au début de la saison 7, quelques temps après l’épisode 2 : « La sixième extinction » (mort de Diana Fowley).

 
EPISODE 2 : JOANN




Vendredi 16 h 45.


« Bon, je vais te laisser Scully, je dois partir plus tôt aujourd’hui, annonça Mulder, en rangeant le dossier sur lequel il avait travaillé tout l’après-midi.

- Toi ? Partir plus tôt ? s’étonna Scully. Non, je rêve… Ce n’est pas possible…

- Mais si… Tu vois, tout arrive. Skinner est prévenu. On se retrouve lundi, sauf si tu veux qu’on se voie samedi ou dimanche pour reparler de cette affaire… Dans ce cas, tu m’appelles… Allez, bon week-end, Scully.

- Bon week-end, Mulder. »

 Mulder s’apprêtait à franchir le pas de la porte, quand Scully le rappela : « Mulder !

- Oui, dit-il en se retournant.

- Ne me dis pas que tu as un rendez-vous galant…

- Ah, ah! lança-t-il, un sourire au coin des lèvres. Et si je te disais que "oui", Scully, est-ce que tu me croirais ?

- Hum… Non ! répondit-elle, franchement.

- Eh bien tu aurais raison, reconnut-il.

- Pas de rendez-vous galant, alors… insista-t-elle.

- Non, juste une invitation au restaurant avec un vieil ami de la famille et sa fille.

- Sa fille ? reprit Scully, devenant tout à coup plus curieuse.

- Oui, sa fille.

- Et peut-on connaître l’âge approximatif de cette demoiselle ? demanda-t-elle encore.

- Environ ton âge, répondit Mulder.

- Oh !…

- Mais non, Scully… Ne te fais pas de films. Ce sont de vieux amis, c’est tout. Tu sais bien que dès qu’on travaille aux "Affaires non classées", les rendez-vous galants commencent à se faire de plus en plus rares… jusqu’à devenir, finalement, inexistants. C’est ce que j’ai baptisé "l’effet sous-sol".

- "L’effet sous-sol" ? répéta Scully, d’un air interrogateur.

- Oui, confirma Mulder. Imagine un instant… Tu es en pleine conversation avec un charmant bel homme que tu viens de rencontrer… "Et que faites-vous dans la vie, mademoiselle ?  - Je travaille comme enquêtrice au FBI.  - Très intéressant… Et dans quel service ?  - Les "Affaires non classées". - Curieux, je n’en ai jamais entendu parler. Quelle est la spécificité de ce service ? - Eh bien,  j’enquête sur toutes les affaires non traitées par les autres sections du FBI : apparitions d’ovnis, enlèvements de personnes par des extraterrestres, phénomènes paranormaux en tout genre, crimes ritualistes ou sataniques…" »

Mulder fit une légère moue puis continua : « Là, tu vois, les choses commencent sérieusement à se gâter. Ton "rendez-vous potentiel" commence à se dire que la ravissante jeune femme qu’il a devant lui doit cacher une dangereuse illuminée, probablement paranoïaque et obsessionnelle… Mais il se dit que c’est quand même dommage de lâcher l’affaire, car il te trouvait vraiment très séduisante. Et il poursuit : "Vous travaillez donc dans le bâtiment principal du FBI, à Washington…  - Oui, au sous-sol, plus exactement…" Et c’est là que tout s’effondre… Ton charmant Monsieur n’est plus du tout intéressé par ce dîner au restaurant qu’il venait de te proposer, et tu te retrouves encore une fois toute seule, tout le week-end, à supporter les assauts incessants de ton insupportable coéquipier… qui voit des ovnis et des extraterrestres partout et qui se croit la cible d’une conspiration planétaire visant à préparer la colonisation de la terre par des êtres venus de l’espace et  impliquant des membres du gouvernement et des services fédéraux américains ! »

Mulder avait débité sa phrase d’un trait et Scully pouffa de rire au moment où il s’arrêta enfin, pour reprendre son souffle. Maintenant, Scully riait franchement, sous l’œil amusé de son coéquipier qui prenait plaisir à la taquiner et à la voir s’ouvrir, comme elle le faisait… Puis Mulder quitta le bureau, laissant sa partenaire quelque peu intriguée, tout de même, par cette invitation mystère. Combien d’invitations Mulder avait-il eu depuis qu’elle le connaissait ?… Mulder n’avait quasiment aucun ami, il passait la majeure partie de son temps à travailler avec elle, ou seul, tantôt chez lui, tantôt à son bureau... Mulder ne vivait que pour les "Affaires non classées"…


 
Vendredi 23 h 30.

Ils venaient de refermer le portail et se dirigeaient vers l’entrée de la maison quand elle pivota sur elle-même et fit de grands gestes en direction de la voiture. « Mon sac ! lança-t-elle. Mulder ! J’ai oublié mon sac ! » Au volant, Mulder, qui n’avait cessé de la regarder depuis qu’elle était descendue du véhicule, avait réagi immédiatement. Il s’était saisi du sac, resté sur la banquette arrière, puis avait ouvert sa portière pour la rejoindre.

Mulder s’avançait vers elle… Elle revenait vers lui… Quand une détonation d’une extrême violence retentit derrière eux. La force inouïe de la déflagration les projeta au sol. Ils restèrent quelques instants, inertes ; abasourdis par le double choc, de l’explosion et de leur chute. Mulder se releva le premier et titubant, s’avança vers elle. Il s’agenouilla près de son corps, saisit son visage… Ses paupières frémirent au contact de ses doigts, ses lèvres s’entrouvrirent pour murmurer son nom… Elle vivait. Puis, il se redressa et fit quelques pas en direction de l’entrée la maison… Il n’y avait plus de maison… Il n’y avait plus de porte, plus de salon… Tout l’avant du bâtiment avait été pulvérisé, réduit en cendres… Et le reste de la bâtisse était ravagé par des flammes immenses qui s’élevaient vers le ciel, déchirant l’obscurité de la nuit…

Mulder observait toujours l’endroit où se trouvait la porte, quelques instants plus tôt… Ses yeux scrutaient, dans la pénombre, les alentours… L’homme. Il cherchait l’homme. Son corps. Ce qu’il en restait… Puis il réalisa... Et se retournant soudain, il revint promptement vers la jeune femme, la saisit par la taille et la souleva de terre.

« Il faut qu’on se tire de là, lâcha-t-il.

- Papa, murmura-t-elle, alors qu’elle entrouvrait les yeux. Papa, où est papa ?

- C’est fini, il n’y a plus rien à faire, continua Mulder. Il faut qu’on foute le camp de là.

- Non, non, protesta-t-elle en se débattant, pour qu’il la lâche. Papa ! Papa ! Laisse-moi Mulder ! Papa ! »

Mais Mulder ne la lâchait pas. Tout était fini, il le savait. Il avait vu, çà et là, les restes d’un corps, déchiqueté par l’explosion. Il était devant la voiture à présent, et venait d’ouvrir la portière avant pour la faire rentrer, mais elle se dégagea violemment de son étreinte et fit volte-face, pour retourner vers la maison.

« C’est fini Joann ! hurla Mulder en la saisissant à nouveau par la taille. Ton père est mort ! Il est mort, tu entends ! Et c’est ce qui nous attend si on ne se tire pas de là, tout de suite ! Alors tu vas monter dans cette voiture, maintenant ! »

Et il l’empoigna énergiquement, alors qu’elle cédait enfin.


 
Vendredi 23 h 56.

« Scully, c’est moi. Je suis désolé d’appeler à cette heure-ci mais c’est urgent. J’ai des ennuis. J’ai besoin de toi.

- Où es-tu Mulder ? demanda Scully, à l’autre bout du fil.

- Sunlight Motel", tu te souviens ?

- Oui, c’était il y a quelques mois, lors de cette affaire d’enlèvement…

- j’y serai dans trois-quarts d’heure environ. Chambre 48. Prends ton matériel médical. J’ai quelqu’un à faire soigner, quelqu’un qui est blessé.

- Je pars tout de suite. »




Dernière édition par Oiseaubleu le Sam 30 Aoû 2014 - 19:13, édité 1 fois

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Message  Oiseaubleu Mar 26 Aoû 2014 - 4:57


Samedi 00 h 50.

«  Ça va aller. Surtout ne bouge pas. Je vais m’occuper de ta plaie.

- Non, Mulder, je ne veux pas… Laisse-moi… laisse-moi mourir… »

La voix brisée de la jeune femme qui était allongée sur le grand lit de la chambre, se heurtait depuis de longues minutes à celle de Mulder, qui tentait de l’apaiser.

« Tu ne vas pas mourir, Joann, répéta Mulder. Je ne te laisserai pas mourir, pas maintenant, alors que je viens à peine de te retrouver…

- Ils l’ont assassiné, Mulder. Et ils ne vont pas s’arrêter là, affirma-t-elle. Ils sont peut-être déjà devant le motel… Tu risques ta vie en restant ici, avec moi. Va-t’en… Pars, tant qu’il en est encore temps… Pars Mulder, et ne reviens pas. Laisse-moi… Je t’en prie… Ta vie est plus précieuse que la mienne… Nous avons besoin de toi… vivant.

- C’est hors de question. Je ne pars pas, je ne te laisse pas. Mon amie va venir, elle va te soigner et je trouverai une solution ensuite, pour te protéger.

- Je ne veux pas que tu me protèges, Mulder, rétorqua la jeune femme. Je ne veux pas vivre, tu entends ? Je préfère qu’ils me tuent et qu’on en finisse. Laisse-moi mourir, Mulder ! Laisse-moi mourir…»

Elle cherchait à se défendre, à lui résister. Mais elle céda finalement. Et dans un sanglot, elle laissa retomber ses mains qui serraient avec force les épaules de Mulder, puis s’effondra contre son torse. Mulder avait entouré le corps de la jeune femme, de ses bras. Il la serrait contre lui et lui murmurait tous les mots qui lui venaient à l’esprit, sans réfléchir, juste pour essayer de l’apaiser, de la calmer…

« Je suis là, Joann… Je ne te laisserai pas… J’ai promis à ton père que je veillerais sur toi, s’il lui arrivait quoi que ce soit… J’ai promis, tu comprends ?...  Je vais t’emmener avec moi, loin d’ici… Je prendrai soin de toi… Je te protègerai… »
 


Samedi 01 h 14.

Scully s’approcha de la porte. Mais alors qu’elle était sur le point de frapper, elle entrevit, à travers la fenêtre dont un rideau était légèrement entrouvert, l’intérieur de la pièce….

Là, dans la chambre, Mulder était à demi couché sur un grand lit… une femme allongée contre lui, entre ses bras. Elle crut que son cœur allait lâcher… Et ramenant promptement à elle sa main, qu’elle avait déjà levée en direction de la porte, elle fit brusquement demi-tour. Elle marcha jusqu’au bout de l’allée, contourna le motel par la droite. Puis elle sortit son téléphone portable de sa poche et composa son numéro.

« … Oui Mulder, c’est moi. J’arrive au motel. Peux-tu me rappeler le numéro de la chambre, s’il te plaît ? … 48… Ok, j’arrive. » Puis elle fit à nouveau demi-tour. Lentement, elle revint sur ses pas. Et quand elle reprit l’allée, qu’elle avait quittée quelques minutes plus tôt, elle aperçut sa silhouette se dessiner, au loin. Il l’attendait devant la porte. Mais en se rapprochant, elle comprit que quelque chose de grave s’était passé…

« Mulder !… Tu as du sang sur le visage et sur ta chemise ! Tu es blessé ? Qu’est-ce qui se passe ? s’enquit-elle, inquiète.

- Merci d’être venue aussi vite, Scully. Mais ne t’en fais pas pour moi. Ce n’est rien. Ce n’est pas pour moi que je t’ai appelée… »

Et il entrouvrit la porte afin que Scully puisse voir le corps qui était étendu sur un grand lit, à l’entrée de la chambre.

 « C’est ton rendez-vous de ce soir ? demanda-t-elle, d’un air légèrement désabusé.

- En partie, répondit gravement Mulder.

- En partie ? reprit Scully. Que veux-tu dire, Mulder ?

- Franck a été assassiné…

- Franck ? Qui est Franck ?

- Plus tard,  Scully… Je t’expliquerai. Pour l’instant je voudrais que tu l’examines.  Elle s’est blessée en tombant. Quelque chose a dû s’enfoncer dans son abdomen. Elle a beaucoup saigné au début mais j’ai réussi à stopper l’hémorragie. Ça a l’air d’aller mieux, maintenant…

- Et tu n’as pas été à l’hôpital… observa Scully. Mais enfin, Mulder, qu’est-ce qui t’a pris, tu aurais dû la conduire immédiatement à l’hôpital !

- Je ne sais pas ce qui m’a pris, Scully. J’ai eu peur qu’on nous suive, qu’on la retrouve. Je ne savais plus très bien ce que je faisais, tu sais. Je voudrais juste que tu t’occupes de sa plaie et que tu vérifies qu’elle n’a rien d’autre… »

Mulder était visiblement très troublé et Scully s’interrogeait sur les raisons qui l’avaient poussé à venir se cacher aux abords de cette petite ville. Qui était cette jeune femme ? Quel était son lien avec Mulder ? Qui était ce Franck ? Qui avait cherché à les tuer ? Pour quelle raison ? La tête pleine de questions elle rentra dans la chambre et posa sa mallette sur le lit alors que Mulder s’asseyait près de la jeune femme : « Joann, appela-t-il doucement. Joann, réveille-toi. »

Scully, alors qu’elle sortait son matériel médical, ne put se retenir d’observer du coin de l’œil, son coéquipier. Et elle le vit poser délicatement ses mains sur les épaules de l’étrangère. Elle ne quittait pas des yeux ses doigts qui glissaient à présent, le long de ce visage qui lui était inconnu. Cette manière de la toucher… Cette douceur… Elle ne l’avait jamais vu se comporter ainsi avec une femme, même avec Diana Fowley, son ex-amie… Ils devaient bien se connaître… intimement, peut-être… depuis longtemps, en tout cas…

Puis la jeune femme s’éveilla. Et Scully vit ses paupières s’ouvrir sur deux magnifiques yeux verts, aussi profonds que lumineux.
 



Samedi 01 h 36.

Scully venait de couper le fil dont elle s’était servie pour recoudre la peau déchirée de la jeune femme. Une peau mate et satinée. Une peau qui appartenait à un grand corps, long, fin et musclé. Un corps rempli de grâce et dont la taille devait dépasser la sienne d’au moins quinze centimètres…  L’agent du FBI n’avait pu s’empêcher de détailler l’étrangère de la tête aux pieds, quand Mulder l’avait aidée à se relever pour qu’elle l’examine. Et alors qu’il soulevait le drap du lit, sur lequel il avait déposé sa robe, déchirée et entachée de sang, elle avait découvert deux jambes nues, parfaitement dessinées et galbées. Deux jambes d’une longueur interminable…

La jeune femme avait perdu une certaine quantité de sang, mais pas suffisamment pour être en danger ou avoir besoin d’être transfusée. Son examen n’avait révélé aucune blessure grave. Elle avait uniquement besoin de calme et de repos… Scully lui avait administré un calmant car elle l’avait trouvée très agitée. Elle se débattait entre les bras de Mulder, elle ne cessait de répéter qu’elle voulait mourir, qu’elle ne pouvait vivre sans son père, qu’on la retrouverait de toute façon, que Mulder devait la laisser…

Finalement, après qu’elle se fut rendormie, Mulder invita Scully à sortir de la chambre et ils s’assirent, tous les deux, devant la porte.

«  Mulder, commença Scully, qui est cette fille ? Que s’est-il passé ce soir ? Je croyais que tu allais au restaurant avec des amis…

- J’y suis allé, Scully. Mais je ne m’attendais pas à ce que les choses tournent de cette façon… »

Et il lui raconta l’explosion de la maison qu’occupaient Franck Cooper et sa fille, Joann, alors qu’il venait de les raccompagner chez eux, après leur dîner, dans un restaurant du quartier.

« Si Joann n’avait pas oublié son sac dans ma voiture, elle serait morte, elle aussi…, remarqua-t-il, songeur.

- Mais qui sont-ils, Mulder ? Pourquoi cet homme a-t-il été tué ?

- Je n’en sais rien. Je n’avais pas vu Franck depuis des années. A une époque, il a travaillé avec mon père, au sein du gouvernement. Puis il est parti en Europe. Il est revenu aux Etats-Unis il y a quelques semaines, et il m’a contacté. Ce soir, il m’a avoué qu’il se sentait menacé. Il voulait me parler de certaines choses. Il m’a dit qu’il possédait des informations secrètes en lien avec les "Affaires non classées" ; des informations qu’il souhaitait me transmettre. Mais, il ne voulait pas en parler devant Joann. Il m’a dit qu’il me recontacterait. Voilà, je n’en sais pas plus…

- Et c’est pour cette raison que tu as fui les lieux de l’explosion et que tu ne l’as pas emmenée à l’hôpital…

- Oui, j’avais peur d’être repéré par la police, le FBI, ou je ne sais qui encore… De plus, d’après ce que Joann m’a laissé comprendre, elle se sait menacée… Je dois la protéger, Scully. Je l’ai promis à son père.
 
- Je comprends… Au fait Mulder, tu as remarqué cette petite cicatrice à la base de son cou ?

- Oui, justement, j’allais t’en parler.

- Tu crois qu’elle a été enlevée, elle aussi ? Tu crois qu’elle a un implant ?

- Je n’en sais rien, Scully. On dirait, en tout cas. Mais je n’ai rien osé lui dire à ce sujet. Ce n’est pas le moment. Elle a été très secouée et très choquée par les événements de ce soir. Je vais lui laisser un peu de temps pour qu’elle digère ce qui s’est passé. Après, je l’interrogerai.»


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Message  Oiseaubleu Mar 26 Aoû 2014 - 5:17


Samedi 03 h 46. 

Cela faisait presque une heure que Scully s’était couchée. Mais elle ne dormait toujours pas. Elle ne pouvait pas dormir. Là, derrière son dos, Mulder était étendu sur un lit, près d’une jeune femme… Une femme… Une autre femme…

Ne pas penser… Ne rien se demander… Ne pas chercher à comprendre… Il n’y a rien à comprendre… En effet, pour Scully, il n’y avait rien à comprendre. Du moins, elle le croyait… fermement.

Finalement, n’y tenant plus, elle se mit à scruter attentivement le silence… Rien. Elle n’entendait rien qui puisse lui laisser penser que Mulder ou Joann étaient réveillés. Seules leurs longues respirations vibraient par intermittence, au cœur de cette nuit tranquille. Alors, aussi délicatement qu’elle le put, Scully se retourna. Puis, elle entrouvrit légèrement ses yeux. Mulder s’était endormi. Etendu sur le dos, la tête enfoncée dans un oreiller, il tenait entre ses bras le corps de Joann, dont la tête reposait sur sa poitrine. Ils se tenaient enlacés… Son geste avait quelque chose d’affectueux et de paternel… Il connaissait cette fille, beaucoup plus qu’il ne voulait bien lui laisser croire, c’était évident…

Le nœud que Scully avait senti un peu plus tôt, dans son ventre, alors qu’elle s’apprêtait à frapper à la porte de cette chambre numéro 48, la tirailla encore… Elle regrettait d’être restée. Mulder avait insisté, prétextant que ce n’était pas prudent de reprendre la route sans avoir dormi, au moins quelques heures. Et puis, la chambre possédait deux lits… « Et toi, où vas-tu dormir ? » avait-elle demandé. Mais il était évident que Mulder avait déjà prévu de dormir auprès de Joann… Pourquoi avait-elle accepté de rester ? Elle aurait dû rentrer chez elle. Si Mulder voulait passer la nuit avec cette fille, cela le regardait… Il avait eu besoin d’elle, elle été venue comme à son habitude, car elle ne pouvait le laisser tomber. Mais à présent, elle souhaitait s’en aller. Elle n’avait plus rien à faire ici. Elle rentrerait le lendemain, à la première heure.
 


Samedi 08 h 50.

Scully revenait vers la chambre 48, tenant un sac rempli de donuts d’une main, et une grande bouteille de jus de fruits, de l’autre. Mulder lui avait demandé si elle voulait bien aller acheter quelque chose à manger, avant leur départ. Quand elle s’approcha de la chambre, elle fut prise soudainement d’une étrange suspicion… Mulder lui avait demandé de sortir… Il voulait peut-être l’éloigner… Le rideau était toujours entrouvert… Par la fenêtre, elle jeta un œil à l’intérieur de la pièce, avant de rentrer… Mulder était assis sur le lit, près de la jeune femme. Ils parlaient. Leur échange semblait tendu. Puis, soudain, Mulder lui prit la main, et après l’avoir regardée dans les yeux quelques instants, il rapprocha son visage du sien et l’embrassa.

Scully sentit à nouveau son ventre se serrer. Puis ce furent sa poitrine et sa gorge. Le baiser se prolongeait et maintenant, Scully sentait une boule, une boule énorme se contracter dans sa gorge. Elle fit quelques pas en arrière puis se ravisa, et après avoir respiré profondément, elle donna quelques coups contre la porte. « Mulder ! lança-t-elle. Tu peux m’ouvrir ? Je suis chargée ! » Et quelques secondes après, Mulder apparaissait à la porte. « Oh, merci Scully, s’exclama-t-il, c’est super ! On va pouvoir manger un peu avant de partir. »


 
Samedi 18 h.

Scully n’avait pas voulu rester. Elle avait prétexté un rendez-vous important. « Je te recontacte dès que j’ai fini, avait-elle promis à Mulder. » Mais elle n’avait pas recontacté Mulder. Elle n’en avait ni l’envie, ni le courage. Cette fille… Comment avait-il pu lui faire ça, à elle… Qu’il ait une vie privée dont il ne veuille pas lui parler, c’était son problème. Mais qu’il la contraigne à être le témoin de leurs étreintes…  Elle ne pouvait le supporter. Il aurait au moins pu attendre qu’elle s’en aille, avant de l’embrasser… Il l’avait surement envoyée acheter à manger exprès, pour l’éloigner et se retrouver seul avec cette fille…

Assise sur son lit, Scully essayait désespérément de se concentrer sur l’article qu’elle était censée rédiger pour une revue médicale, dans laquelle elle avait déjà publié...  Il s’agissait pour elle, de présenter les nouveaux moyens que possédait le FBI, en matière d’autopsies. Mais elle n’arrivait pas à rassembler ses idées. Sa tête était pleine d’images, de questions, de pensées dont elle tentait vainement de se défaire. 

Quand elle consulta sa montre, il était dix-huit heures. Elle avait laissé Mulder vers dix heures, le matin même. Elle ne l’avait pas rappelé. Il ne l’avait pas appelée non plus. Cela ne lui ressemblait pas. Et puis, se remémorant les événements que Mulder lui avait racontés, devant la chambre du motel, elle se dit que ce n’était pas normal. Il y avait quelque chose à creuser dans cette histoire. Quelque chose qui concernait les "Affaires non classées". Donc, quelque chose qui la concernait… Et elle se décida à appeler Mulder, pour en savoir plus…


Samedi 21 h.

N’y tenant plus, Scully avait contacté Skinner. Mulder ? Non. Il n’avait eu aucune nouvelle de son agent. Mais on était samedi… Scully le savait. Elle s’était excusée… Mais Mulder n’avait plus donné signe de vie depuis le matin et il était injoignable! Le directeur adjoint pensait qu’il ne fallait pas exagérer, ne pas s’inquiéter outre mesure. Mulder avait déjà eu l’habitude de disparaître quelques jours, par le passé. Peut-être une observation de soucoupes volantes qui l’avait poussé à s’arrêter sur le chemin du retour, avait-il suggéré avec humour…
 



Samedi 23 h.

Son appartement était vide. Personne. Mulder ne semblait pas y être revenu depuis la veille. Scully avait trouvé du courrier dans sa boîte aux lettres… Et maintenant elle était là, plantée au milieu de son salon, à se demander ce qu’elle devait faire. Retourner au motel ? Mais non, c’était absurde. Elle avait déjà appelé. Mulder n’y était plus revenu depuis qu’ils s’étaient quittés.


 
Dimanche 01 h 47.

« Frohike, je suis vraiment désolée mais j’ai peur pour Mulder. J’ai besoin de savoir », avait lancé Scully au fidèle ami de son coéquipier. Bien qu’il dorme profondément, celui-ci n’avait pas rechigné à se lever, quelques minutes auparavant, en entendant sur son répondeur, la voix de la jeune femme qui lui annonçait sa venue. Scully, la sublime et incomparable Scully avait besoin de ses services… Assis autour d’une tasse de café, ils parlaient à présent, de cette affaire. « Mais qui est cette Joann ? demanda-t-elle enfin, alors que cette question lui brûlait les lèvres depuis qu’elle avait passé le pas de la porte.

- Heu…

- Ils ont flirté ensemble, c’est ça, avança Scully.

- Eh bien, c’est-à-dire que… commença Frohike, sans se décider à poursuivre.

- D’accord, j’ai compris. Ils ont couché ensemble… »

Frohike fit une moue que Scully ne sut interpréter, aussi, elle se fâcha : «  Eh bien quoi ? Qu’est-ce que ça veut dire ? Ils ont eu une liaison ? Ils ont été mariés, peut-être…

- Presque, finit-il par avouer.

- Comment ça, presque ?! s’offusqua Scully, interloquée. Mais Mulder ne m’en a jamais parlé…

- Joann et Mulder ont grandi ensemble. Leurs parents étaient de grands amis. Ils étaient voisins et Joann passait la plupart de son temps avec Mulder et Samantha. D’ailleurs, Mulder la considérait un peu comme sa sœur… Scully, je ne sais pas grand-chose à son sujet, Mulder m’a très peu parlé de cette jeune femme. Et il m’a dit n’en avoir parlé à personne, depuis leur séparation.

- Comment cela s’est-il produit ? s’enquit Scully, impatiente de connaître la suite. Pourquoi se sont-ils séparés ?

- Avec les années, l’amitié s’est transformée en amour, continua Frohike. Et il était évident pour Joann et Mulder qu’ils finiraient par se marier. Ils se sont fiancés. Ils avaient même arrêté la date du mariage. Mais un jour, elle et son père ont disparu. Mulder a trouvé une lettre de Joann, disant qu’elle l’aimait mais que de graves circonstances la contraignaient de fuir. Sa mère était morte depuis longtemps. Elle vivait seule avec son père et n’avait pas de famille. Mulder n’a jamais pu savoir ce qui s’était passé. Quelques années plus tard, elle a repris contact avec lui. Il recevait quelques lettres, de temps en temps, venant d’Europe. C’était la France, l’Italie, l’Espagne, l’Allemagne… Apparemment, elle et son père suivaient de prêt le travail de Mulder, ses recherches au sein des "Affaires non classées". Mais il n’a jamais eu d’explications sur sa fuite, sur ce qu’elle était devenue et il n’a jamais réussi à la retrouver.

- Tout s’explique à présent, considéra Scully, en repensant à la manière dont Mulder s’était comporté avec la jeune femme, dans la chambre du motel.

- Cette séparation a changé sa vie, Scully. Et même s’il a connu d’autres femmes après Joann, il n’en a jamais aimées aucune, comme elle… Je pense sincèrement que cette histoire explique le fait que Mulder n’ait jamais pu s’engager, par la suite, dans une relation longue et stable. Et puis, d’après ce qu’il m’a dit, Joann était vraiment une fille bien… Rien à voir avec celles qui sont venues après, comme cette Diana Fowley, qui l’a mené en bateau plus d’une fois… »



Dimanche 12 h 35.

« Nous n’avons toujours rien Scully, admit Skinner, mais je vous assure que nous faisons le maximum. Continuez vos recherches de votre côté et tenez-moi au courant si vous avez du nouveau. Je vous appellerai pour vous tenir informée de l’évolution de la situation… »

Scully reposa pour la énième fois son combiné téléphonique. Skinner avait finalement accepté de lancer un avis de recherche. Mais pour l’heure, Mulder restait toujours introuvable.


 
Dimanche 16 h 23.

« Je n’ai pas réussi à m’approcher des ruines de la maison, lança Scully à Skinner, qui l’écoutait attentivement à l’autre bout du fil. Ils m’ont refusé l’accès de la propriété, bien que je leur aie présenté mon badge du FBI. Je fais le guet depuis un moment mais cela ne sert à rien. Il y a six hommes qui surveillent les alentours. Je crois que je vais laisser tomber. Je n’arriverai pas à trouver quoi que ce soit ici… »

Scully remit le moteur en route, et à regret, s’éloigna du lieu où s’était produite l’explosion qui avait coûté la vie à l’ami de Mulder. Elle était à la fois déçue et dépitée par la tournure que prenait les événements. Pourquoi ces agents l’empêchaient-elle d’enquêter ? Elle aurait pu retrouver des indices qui l’auraient mise sur une piste… Mais peut-être qu’on ne voulait pas la voir mettre son nez dans cette affaire… Et puis, elle s’en voulait aussi. Pourquoi avait-elle donc laissé Mulder partir seul, alors qu’il lui avait clairement fait comprendre que son amie était menacée ? Elle aurait dû rester avec eux. Ils seraient rentrés ensemble à Washington… Et Mulder n’aurait pas disparu…



Dimanche 18 h.

« Il est sûr de l’avoir vu ? demanda Scully, le cœur battant, la main crispée sur son téléphone portable.

- Oui Scully, répondit Skinner, le pompiste est affirmatif. Il est certain d’avoir vu Mulder hier, vers seize heures. Il a fait le plein puis a repris la route vers le nord.

- Il faut que je me rende là-bas…

- Non, Scully, objecta le directeur adjoint. C’est inutile. Laissez nos agents faire leur travail. Cela n’apportera rien de plus si vous êtes sur les lieux. Par contre, là où vous pouvez nous aider, c’est sur le motif de la disparition de Mulder. Qui est cet homme qui a été tué ? Pourquoi sa fille serait-elle menacée ? Quel est leur lien avec Mulder ?… Il nous faut plus d’éléments pour orienter notre enquête et nos recherches. Ils peuvent être n’importe où, Scully. Notre territoire est immense et nous ne pouvons mobiliser plus d’agents pour le moment.

- Je sais, soupira Scully. Je cherche toujours, mais je n’ai pas trouvé grand-chose. Je retourne chez Mulder où je dois retrouver des amis à lui, qui pourront peut-être m’aider. Je vous contacte dès que j’ai quelque chose. Tenez-moi au courant… »



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Message  Oiseaubleu Mar 26 Aoû 2014 - 5:22


Dimanche 23 h 48.

Scully referma la porte de son appartement puis posa sa veste et sa mallette sur une chaise. Elle avançait à pas lents, dans l’obscurité. Elle n’avait pas allumé la lumière. Elle préférait rester dans la pénombre. Finalement, elle se laissa tomber sur le canapé et ramena sa main sur sa hanche pour se défaire de son arme. Quand un bruit l’interpela… Elle se raidit toute entière. Il y avait quelqu’un dans son appartement. Le bruit semblait venir de sa chambre.

Son arme pointée devant elle, Scully s’avança lentement. La porte de sa chambre était entrouverte… Un souffle… Une respiration… « Mulder, C’est toi ? » N’entendant pas de réponse, Scully, toujours sur le qui-vive, poussa doucement la porte et scruta l’intérieur de la pièce.

Là, sur le sol, adossé à son lit, un corps était replié sur lui-même, la tête enfoncée dans les genoux. « Mulder, c’est toi ? demanda-t-elle à nouveau, alors que ses yeux cherchaient à reconnaître, dans l’obscurité, son coéquipier.

- Scully, gémit Mulder, dont elle reconnut immédiatement la voix.

- Mulder ! lança-t-elle en se précipitant vers lui. Mulder, tu vas bien ? Où étais-tu ? Ça fait  presque deux jours que je te cherche désespérément. J’ai alerté Skinner… Des agents sont à ta recherche… »

Tout en parlant, Scully avait glissé ses doigts entre les cheveux ébouriffés de son ami. Puis elle tenta de relever sa tête, pour croiser son regard, pour chercher dans ses yeux les réponses aux questions qu’elle se posait… Mais Mulder résistait et gardait la tête baissée. Alors, Scully se releva légèrement et tendit le bras pour allumer sa lampe de chevet. Et tandis que ses yeux apprivoisaient la lumière, elle s’agenouilla à côté de lui.

Ce qu’elle vit à cet instant, l’affola complètement. Les vêtements de Mulder étaient maculés de sang. Son visage, qu’elle avait finalement relevé et qu’elle tenait entre ses mains, était défait, anéanti. Dans ses yeux, hagards, cernés et rougis par les larmes, elle pouvait lire un désarroi immense. Son ami était amorphe et semblait totalement perdu…

« Mulder ! s’exclama-t-elle. Mulder, tu es blessé ? Parle-moi… Mulder… Je t’en prie… Que s’est-il passé ?...

- Je l’ai perdue, Scully, sanglota-t-il en s’effondrant dans ses bras. Joann est morte... Ils l’ont tuée… je n’ai rien pu faire… »

Scully avait enlacé la tête de son ami. Elle avait entendu sa détresse infinie lui déchirer le cœur, alors que dans son ventre, dans sa poitrine et sa gorge, un nœud - ce nœud qui s’était noué cette nuit-là, quand elle l’avait vu pour la première fois étreindre Joann, à travers la fenêtre du motel - venait de se défaire. Aurait-elle pu se l’avouer… Scully avait mal pour lui, mais elle était soulagée. Il était là, vivant… et seul… sans cette femme qui ne se mettrait jamais plus entre eux.

Comment puis-je penser une chose pareille ?… se dit-elle, alors que son visage caressait celui de son ami et que ses lèvres lui murmuraient des paroles réconfortantes. Qui suis-je pour vouloir le garder, égoïstement, pour moi seule ?… Je suis un monstre… Je ne suis qu’un monstre… Mais les pensées de Scully s’évanouirent, alors que les larmes de Mulder glissaient sur ses lèvres, entraient dans sa bouche… alors qu’elle goûtait en elle, son déchirement et sa douleur.

« Mulder, où est-elle ? demanda tout-à-coup Scully, alors qu’une crainte nouvelle l’assaillait. Où est son corps ? Où as-tu mis son corps ?

- …

- Mulder ! Répond-moi ! Où es le corps de Joann ?

- Il n’y a plus de corps, Scully, murmura-t-il.

- Comment ça, plus de corps ?

- Je l’ai brûlé », lui souffla-t-il alors que sa voix se brisait.


 
Lundi 00 h 42.

Mulder dormait, à présent. Scully l’avait aidé à se relever, à se déshabiller, à se laver puis à se coucher dans son lit. Elle avait ensuite fourré ses vêtements dans sa machine à laver, inspecté attentivement son appartement afin d’effacer la moindre trace qu’il aurait pu avoir laissée. Puis elle était descendue dans sa voiture, qu’il avait garée devant son immeuble, pour la nettoyer. Joann avait été assassinée en présence de Mulder. Il avait ensuite brûlé son corps. S’il y avait eu des témoins, s’il restait quelques traces, il  pourrait être suspecté et accusé de meurtre… Certaines personnes auraient surement pu trouver là, un bon moyen de se débarrasser de lui.


 
Lundi 4 h 58.

Scully avait finalement réussi à s’endormir, épuisée par les deux jours qui venaient de s’écouler, durant lesquels elle n’avait pratiquement pas fermé l’œil. Elle était étendue sur son lit, à côté de Mulder qui, sous l’effet du cachet qu’elle lui avait donné, dormait, paisiblement. Entre ses doigts, elle tenait la main de son ami que, malgré le relâchement musculaire dû au sommeil, elle n’avait pas lâchée.  
 



Lundi 19 h

« C’est pour cela qu’elle m’a quitté, Scully, expliqua gravement Mulder, assis devant le plat de pâtes que son amie tentait vainement de lui faire avaler. Quand son père a appris qu’elle avait une maladie dégénérative et qu’elle était condamnée à mourir, il a cru devenir fou. A l’époque, il travaillait avec mon père et notre ami le fumeur… Ainsi, il a volé du matériel dans un laboratoire de l’armée, dont un implant qui a été ensuite reprogrammé, grâce à l’aide d’un extraterrestre dissident. Puis il a fui avec Joann, en Europe, où ils ont tenté de disparaître. Joann ne voulait pas suivre son père… Nous devions nous marier… Mais elle savait qu’elle était perdue. Et comme elle me connaissait mieux que personne, elle savait que je ne l’abandonnerais pas, que je la soutiendrais jusqu’au bout. Aussi a-t-elle pensé que sa fuite serait moins douloureuse pour moi, que le spectacle de son agonie. Elle n’imaginait pas que son père parviendrait à la sauver…

- Cet homme a donc réussi, finalement, à guérir sa fille, considéra Scully, impressionnée par les possibilités qu’aurait offertes cette technologie, à la recherche médicale.

- Pas tout à fait, corrigea Mulder. Joann était en rémission grâce à l’implant. Mais sans celui-ci, elle aurait peut-être rechuté… Apparemment, personne ne sait vraiment jusqu’où son père a réussi à aller dans le traitement de cette maladie…

- Et que voulaient les hommes qui les ont tués, elle et son père ? Reprendre l’implant ?

-  Pas uniquement. Déjà, ils se sont débarrassés de son père qui en savait trop et qui aurait pu devenir très gênant. Ensuite, ils voulaient s’emparer de son corps…

- De son corps ? Pourquoi ? interrogea Scully.

- Parce que son père a fait des expériences sur elle. Pour tenter de la sauver, il a utilisé des cultures de cellules venant d’embryons extraterrestres, qu’il avait volées. Ses recherches lui avaient démontré que ces cellules avaient un pouvoir de régénération largement supérieur au nôtre. Il avait compris qu’elles étaient capables, si elles étaient croisées à des cellules humaines, d’en augmenter les potentialités, notamment en ce qui concerne le système immunitaire.

- Tu veux dire que cette fille…

- … était en partie extraterrestre. Oui. Mais elle l’est devenue à l’âge adulte… Et c’est ça qui a fait d’elle une cible privilégiée, comme je l’ai moi-même été….

- Et c’est pour cette raison qu’elle t’a demandé de faire disparaître son corps…

- Oui, confirma Mulder à mi-voix, en baissant les yeux. Pour ne pas qu’ils puissent l’autopsier et comprendre ce que son père avait fait… »


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Message  Oiseaubleu Mar 26 Aoû 2014 - 5:27


Mercredi 12 h 15. Trois semaines plus tard.

« Mulder !

- Hum…, marmonna celui-ci en avalant la dernière bouchée de son sandwich.

- Tu n’en as pas marre de manger ici, tous les jours, enfermé entre quatre murs ?

- Tu n’es pas obligée de rester manger avec moi, Scully, répondit-il à la jeune femme, qui plantait précautionneusement sa fourchette, dans une barquette de salade.

- Tu n’as pas envie de t’aérer un peu la tête, parfois ? reprit-elle. Tu sais, je crois que ça te ferait beaucoup de bien.

- C’est gentil à toi Scully, de penser à ma tête, mais rassure-toi, elle va très bien, affirma Mulder. Et si je reste ici pendant la pause déjeuner, c’est uniquement pour gagner du temps.

- Mais tu ne t’arrêtes pas de travailler, Mulder! protesta Scully. Regarde-toi, depuis trois semaines on dirait que tu ne vis plus dans le monde réel. Et puis, tu ne me parles plus. Nos échanges ne tournent qu’autour de nos enquêtes ou de banalités. Je sais que ça ne va pas, Mulder. Et je voudrais pouvoir t’aider. Mais je ne peux pas le faire si tu ne t’ouvres pas à moi, si tu ne te confies pas…

- Arrête Scully, coupa Mulder. C’est très gentil à toi de t’inquiéter pour moi mais je te le répète, tout va bien. J’ai simplement beaucoup de travail en ce moment et je veux que ça avance. Tu sais, je ne t’impose rien. Tu n’es pas obligée de rester en permanence avec moi. Tu peux très bien aller manger, à midi, avec les collègues et passer tes week-ends ailleurs qu’au Bureau…

- Mulder, dit Scully à mi-voix, en posant sa barquette sur le bureau et en attrapant la main de son ami. Je sais que tu souffres depuis que Joann…

- Tais-toi Scully ! S’il te plaît, tais-toi…

- Mais Mulder, tu as besoin d’aide et je voudrais juste que tu saches que je suis là, si tu veux en parler…

- Je sais Scully. Je sais que tu es là. Et s’il y a quelqu’un à qui je devais parler, ce serait toi, tu le sais. Mais pour l’instant, je ne peux pas. Il faut que j’avance, tu comprends ? Pour ne pas devenir fou… Il faut que je pense à l’avenir, que je me batte pour l’avenir… Pour donner un sens à sa mort, pour ne pas qu’elle soit partie pour rien… »
 



Vendredi 18 h.  Un mois plus tard.

« Non Mulder, déclara Scully avec aplomb. Tu peux rouspéter tant que tu veux mais je ne te laisserai pas seul, ce week-end.

- Ne t’en fais pas pour moi, Scully, la rassura Mulder, assis à son bureau. Tout va bien, je t’assure. Tu peux rentrer chez toi tranquille et passer ton week-end sans te soucier de ton affreux coéquipier, qui a le chic pour te fourrer dans des histoires impossibles.

- Je ne suis absolument pas convaincue, affirma-t-elle. Et puis, tu n’es pas affreux… Tu es juste insupportable!

- Scully…, bouda Mulder.

- Allez viens, ordonna-t-elle. Lève-toi de là et prends tes affaires. Nous mangeons ensemble ce soir et demain, je passerai te prendre chez toi, en fin de matinée.

- Oh, oh ! lança-t-il, intrigué mais ravi de cette initiative. Et peut-on savoir où tu m’emmènes?

- Eh bien… J’ai pris deux places pour un match de basketball…

- Un match de basket ? Non, pas possible… Toi ? Je ne te crois pas !

- Et si, tu vois… tout arrive… J’ai pensé que ça te ferait plaisir. Et qui sait, peut-être que ça me donnera l’envie de m’y mettre… On ne sait jamais… Je me suis bien découvert une passion pour le baseball…

- Et on va voir jouer quelles équipes, Miss Scully ? demanda Mulder, curieux.

- Eh bien… Attends une minute que je me rappelle… Je crois que… c’est…, bafouilla Scully qui n’avait pas prêté attention à ce qui n’était, pour elle, qu’un détail. Je ne sais plus… Mais c’est surement écrit sur les billets… »

Et alors que Mulder donnait quelques explications à Scully, sur le déroulement d’un match de basket, ils quittèrent leur bureau, dans une agitation qui leur était coutumière. Au fond d’elle-même, Scully était rassurée. Mulder allait mieux. Il s’ouvrait à nouveau à elle, se confiait, la taquinait : ils avaient retrouvé leur complicité d’antan. Pourtant, elle sentait que quelque chose avait changé entre eux… quelque chose qui lui faisait craindre que Mulder ne redevienne plus jamais, celui qu’elle avait connu par le passé. En effet, depuis cette terrible nuit, où elle l’avait retrouvé chez elle, effondré après la mort de Joann, le fantôme de la jeune femme semblait planer autour d’eux et hanter le bureau des "Affaires non classées"...  



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Les Chemins du Cœur   Empty Re: Les Chemins du Cœur

Message  Oiseaubleu Jeu 28 Aoû 2014 - 20:52



Le troisième épisode se déroule pendant la Saison 7, juste après l’épisode 17 : « Existences », et fait référence à la Saison 6, épisode 18 : « A cœur perdu »




EPISODE 3 : SCULLY



CHAPITRE I: L’AUTRE NUIT


I

Histoire d’une renaissance


 
Scully se retournait dans son lit. Elle n’arrivait pas à trouver le sommeil. Elle ne comprenait pas ce qui la perturbait. Que s’était-il donc bien passé dans la journée, qui avait pu à ce point la troubler ? Certes, la matinée avait été agitée… Mais elle avait connu tellement pire…

Elle se revoyait face à cette vieille bâtisse perdue dans la forêt, entourée de ses collègues du FBI. Une grande partie des équipes avait été mobilisée pour traquer un tueur en série qui sévissait dans la région, depuis plusieurs semaines. Pourquoi s’était-elle éloignée ?… Une intuition… Et elle l’avait vu… Elle s’était mise à courir… Il était à sa portée… Puis, plus rien… Où était-il ? … Il lui avait échappé. L’espace d’une seconde, elle s’était arrêtée pour reprendre son souffle et regarder autour d’elle… Et soudain, il avait bondi, l’avait saisie…Son arme était tombée… Elle s’était débattue, avait appelé à l’aide mais elle était trop faible face à la masse imposante du tueur... Elle ne voulait pourtant pas le lâcher, il fallait qu’elle reprenne le dessus… Déportée vers l’arrière, elle n’avait pas réalisé le danger qu’elle courait… L’homme la poussait toujours et elle tentait de se dégager de son étreinte, quand elle n’avait plus senti la terre sous son pied… 

Dans son lit, Scully avait fermé les yeux. Faisant un bond dans le passé, elle était revenue dans son corps, ce matin-là…

*


Environ quinze heures plus tôt…

… Ne sentant plus la terre sous son pied, Scully réalisa qu’elle perdait l’équilibre… D’une main, elle tenta de s’agripper aux branchages auxquels s’était accrochée sa chemise, mais en vain… Elle basculait en arrière… dans le vide. La chute lui sembla interminable et quand son corps fendit brutalement les flots, elle le sentit tout à coup se glacer au contact de l’eau gelée. L’homme ne l’avait pas lâchée. Elle l’avait entraîné avec elle, dans sa chute et agrippé à sa veste, il l’attirait à présent vers le fond de la rivière. Elle suffoquait, elle avait besoin d’air… Alors, une sensation étrange s’empara d’elle : c’était comme un tourbillon qui l’emportait… Elle perdait connaissance.

C’est alors qu’une force venue du plus profond d’elle-même, la secoua brutalement. L’instinct, cet instinct de survie qui l’avait si souvent sauvée, traversa tout son corps dans un spasme violent. Elle se débattit avec vigueur et se libérant de sa veste, elle s’arracha à l’emprise de l’homme, tout en battant des jambes, afin de se donner l’impulsion nécessaire à sa remontée.

Le visage levé vers la surface, elle luttait avec toute l’énergie qui lui restait pour se libérer de cet étau qui l’enserrait, en l’étouffant un peu plus, de seconde en seconde. Elle défaillait. Soudain, elle sentit un bras vigoureux l’attraper par la taille… Il l’aidait à remonter. Elle n’en pouvait plus… Elle ne savait plus... Ses yeux s’étaient fermés… Le choc de l’air glacé sur son visage, la tira de son état semi-conscient. Instinctivement, elle prit une grande inspiration et sentit comme une lame gelée lui traverser la gorge et les poumons. Elle fut prise d’un violent hoquet et toussa, toussa encore en recrachant l’eau qui l’étouffait. Elle ouvrit enfin les yeux. Il était là. Près d’elle. Et c’est lui qui l’aida à rejoindre la berge, avant qu’ils ne s’effondrent tous les deux, côte à côte, sur la terre froide et humide.

Elle était épuisée. Aussi, resta-t-elle un moment les yeux fermés, allongée sur le dos, cherchant à reprendre ses esprits, à recouvrer ses forces. C’est alors qu’il s’était relevé et s’était penché sur elle. « Scully… », avait-il appelé, doucement. Et délicatement, il avait glissé une de ses mains sous sa nuque et s’apprêtait à passer l’autre sous sa taille, pour essayer de la relever. « Scully, ça va?... » Le bas de sa chemise avait été déchiré lors de sa chute et la main de Mulder, glissant sur sa hanche, frôla sa peau dénudée. Elle bondit, repoussa son bras avec violence en criant : « Non! » Surpris, il eût un brusque mouvement de recul. Il ne comprenait pas.

Ils se regardèrent un instant, sans savoir l’un et l’autre ce qui s’était passé. Scully se recroquevilla alors sur elle-même. Le visage enfoui dans ses genoux repliés, elle ramena ses deux bras au-dessus de sa tête, comme pour se protéger. Mulder ouvrit la bouche mais ne put parler… «Je veux rentrer, avait-elle dit peu après, en relevant la tête vers lui. Je veux rentrer, maintenant. Je ne sais plus ce qui m’arrive… Je suis fatiguée. » Dans la voiture, ils étaient restés muets. Elle n’avait pas eu le courage de lui parler. Que dire… Comment expliquer.… Je suis désolée, je ne sais pas ce qui m’a pris… Elle ne lui avait même pas dit « merci ». Que s’était-il donc passé?

*


Et maintenant, couchée dans son lit, Scully se repassait en boucle la scène, sans comprendre. Et puis il y avait ce bruit incessant qu’elle ne pouvait s’enlever de la tête… Ce bruit étrange d’une machine qui coupe du bois… du bois fendu qui tombe mort… du bois mort. Sa pensée l’entraînait malgré elle, à revenir sur cette main qui glissait sur sa chair nue. Pourquoi ce contact l’avait-il tant bouleversée ? Pourquoi avait-elle repoussé Mulder? Combien de fois leurs mains et leurs corps s’étaient-ils frôlés, touchés, serrés chastement, sans que rien ne la gêne ou ne la dérange ? Qu’y avait-il eu de différent cette fois, pour qu’elle se refuse à cette main amie qui venait de la sauver ?

Elle ressentit un profond malaise : l’étrange sensation d’une demande inconnue qui se mêlait à sa peur… Et ce bruit étrange… encore et encore… Mais elle ne comprenait toujours pas. Puis, tandis que son corps se recroquevillait sous sa couverture, cherchant à se protéger du froid, une pensée lui traversa l’esprit. Et si ?… Non, ce n’était pas possible. Elle ne voulait pas entendre ce que cette voix lui chuchotait tout bas, à l’intérieur d’elle-même. « Mulder… », murmura-t-elle, et une violente crampe lui tordit l’estomac, alors que tout son corps se glaçait.

Elle était là, seule, perdue au milieu de ce grand lit où la place de l’autre était restée vide, depuis si longtemps… Un immense sentiment de solitude l’envahit… Elle se sentit emportée par un vertige violent. Tout se mit à tourner autour d’elle. De ses doigts, elle se cramponna à ses draps et referma ses yeux, pour ne pas sombrer dans le vide… Tout tournait toujours, le tourbillon ne s’arrêtait pas… Elle était redescendue dans l’eau, au fond de la rivière, mais elle ne voulait pas… Elle ne se sentait plus la force de remonter seule, à la surface…

Elle ouvrit les yeux et tourna la tête vers sa table de nuit : le réveil indiquait deux heures. Elle fit un effort pour se relever et se dégager de ses draps. Et, tirant à elle sa robe de chambre restée au pied du lit, elle s’en revêtit et se leva lentement pour rejoindre la salle à manger. Le téléphone… Sa main était à présent posée dessus mais elle n’osait décrocher. Puis, malgré le léger tremblement qui parcourait son bras, elle se décida à composer son numéro.

À l’autre bout du fil, une voix endormie se fit entendre : « Allo…

- Mulder, c’est moi… je… je te réveille ? »

Mulder sembla reprendre ses esprits et demanda l’air surpris : «  Scully… Qu’est-ce qui t’arrive ? Quelle heure est-il ? » Elle tressaillit alors qu’il continuait : « Bon sang, il est deux heures du matin. Que se passe-t-il pour que tu m’appelles à cette heure-ci ? » Elle se sentait confuse et gênée : « Je ne sais pas Mulder. Je… je n’arrivais pas à dormir, je ne me sentais pas bien.

- Tu es malade ? reprit Mulder. 

- Non, ce n’est pas ça… Je suis désolée, je n’aurais pas dû t’appeler… »

Elle commençait à regretter son geste, ne sachant pas véritablement pourquoi elle l’avait appelé. Mais Mulder poursuivait: « Mais non, mais non, tu as bien fait. Tu veux que je passe chez toi ? » Scully hésita puis répondit : «  Je ne sais pas. Je crois que… » Elle ne put finir sa phrase. Un sanglot l’étouffa. À l’autre bout du fil, Mulder, de plus en plus inquiet, lui lança un « Ne bouge pas Scully, j’arrive ! », avant de raccrocher.

Il avait revêtu en hâte sa tenue de la veille, restée au pied du lit. Puis, sortant de l’ascenseur, il avait couru jusqu’à sa voiture. Il conduisait vite, en proie à une vive inquiétude. Sa réaction, après qu’il l’eut ramenée sur la berge, l’avait frappé. Il la sentait lointaine, comme s’il y avait quelque chose qu’elle voulait lui cacher. Il se revoyait la tirant vers lui, pour qu’elle sorte enfin sa tête de l’eau, pour qu’elle respire… Il faisait froid, très froid. On était en plein hiver et l’eau de la rivière était glacée. Il se revoyait, penché sur elle…Il se reprochait son geste... Maladroit que je suis... Il n'avait même pas eu un mot réconfortant à lui dire, alors qu’il la raccompagnait chez elle.


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Message  Oiseaubleu Jeu 28 Aoû 2014 - 20:57


Lorsqu’elle lui ouvrit la porte, il ressentit un profond soulagement. Elle était là, debout, devant lui, le fixant d’un regard doux et tendre. Le seul fait de la voir le rassurait. Mais il la sentait anxieuse et mal à l’aise. « Mulder, je suis désolée…, s’excusa-t-elle, je n’aurais pas dû t’appeler. » Il se rapprocha d’elle, voulu la prendre par l’épaule mais se ravisa. « Mais non, tu as bien fait, assura-t-il, en refermant la porte. Tu sais que tu peux compter sur moi et m’appeler à n’importe quelle heure du jour ou de la nuit. » Scully se dirigea alors vers le canapé où Mulder vint la rejoindre. Il la regardait. Elle avait posé ses mains sur ses genoux où ses doigts fins s’agitaient nerveusement. Elle gardait les yeux baissés. Lentement, presque avec crainte, il glissa une de ses mains derrière sa nuque. « Scully, qu’est-ce qui ne va pas ? demanda-t-il.

- Mulder, je… je ne sais plus où j’en suis…, répondit-elle à mi-voix.

- Ça ne m’étonne pas, lâcha-t-il. Tu as eu une journée difficile. Parfois, je me demande comment tu fais pour tenir. Tu as surement besoin de prendre du repos et peut-être un peu de recul, par rapport à tout ce que tu as vécu ces derniers temps.

- Non, Mulder, ce n’est pas ça… »

Elle avait du mal à se contenir. Son malaise augmentait et Mulder sentait son désarroi l’envahir. Il fallait qu’il trouve quelque chose… Sa seule défense avait toujours été l’humour. Aussi, il plaisanta : « Avoue, tu as un amant caché depuis plusieurs mois et tu n’oses pas me le dire…» Scully sourit et répliqua : « Oh !  mon dieu … Tu ne pourras donc jamais être sérieux. Il ne s’agit pas de ça, il… Il s’agit de nous, Mulder… de nous deux.  

- Oh, je vois. »

Il avait répondu d’un ton grave. Et un long silence s’abattit alors, sur la pièce. Ils étaient tous les deux gênés de se retrouver là, dans cette situation qui leur semblait aussi improbable qu’inattendue. Scully rompit enfin la glace : « Mulder, je ressens certaines choses que j’ai du mal à comprendre et à admettre… Je suis... comme perdue au milieu de moi-même et c’est une situation que je n’accepte pas. Chaque fait possède indéniablement une explication rationnelle et là, je ne vois pas…» Sa voix tremblait et elle n’arriva pas à poursuivre sa phrase. Alors Mulder, qui devinait de quoi il s’agissait, rapprocha lentement sa main de son visage et délicatement, il lui releva le menton.

Scully le fixait. Ses yeux étaient remplis de larmes qui coulaient, avec lenteur, le long de ses joues. Mulder reprit son ton grave : « Cela fait un moment que je voulais t’en parler, mais je n’arrivais pas… Tu cherches à comprendre de manière rationnelle, quelque chose qui ne s’explique pas… Les émotions et les sentiments que nous éprouvons ne peuvent se réduire à de simples équations. Moi aussi j’étais perdu, Scully… » Il s’interrompit un instant, en proie à une vive émotion, puis reprit : « Longtemps j’ai erré dans ma vie comme un naufragé sur l’océan… Et je t’ai trouvée… Toi… » Sa voix s’étrangla, trahissant son trouble profond. Mais il se ressaisit et osa lui murmurer : « Je t’aime Scully. Je t’aime comme je n’ai jamais aimé, comme je n’aimerai jamais… C’est en toi que je me suis trouvé ; en toi que j’ai trouvé l’apaisement, un sens à mon existence et les réponses à mes questions… Avant de te connaître je ne vivais qu’égoïstement, pour moi-même et pour ma quête. Mais à présent, je ressens l’envie et le besoin de m’ouvrir et de partager avec toi ce que je suis, ce que j’ai… Je voudrais te faire une place auprès de moi, en moi… »

Scully n’en revenait pas. Elle ne s’attendait pas à une telle déclaration de la part de son coéquipier. Elle restait muette, bouleversée. Jamais, depuis qu’elle le connaissait, elle n’avait vu Mulder si grave, si troublé, si vrai. Il s’était mis à nu pour se livrer à elle sans détour, pour lui livrer son cœur.

Pourtant, quelques réticences la retenaient encore. Elle repensait à ces femmes que Mulder avait aimées par le passé. Il y avait eu Phoebe Green, Diana Fowley… et surtout Joann Cooper, son grand amour, celle qui aurait dû devenir, Madame Mulder… Et puis il y avait aussi cette Emy Watson, avec qui il avait partagé une chambre d’hôtel, lors d’une enquête - N’avaient-ils partagé que la chambre, d’ailleurs ? N’avaient-ils pas partagé le lit, également ? Comment aurait-elle pu savoir ? - et qu’il voyait toujours, de temps en temps. Que penser, alors ? Scully pouvait-elle vraiment croire Mulder, quand il lui disait qu’il l’aimait plus que toutes ces femmes ? 

Elle dégagea doucement sa tête et se prit le front dans la main. Elle essayait de se reprendre : « Je ne sais pas Mulder… Les choses ne se passent pas comme je les avais prévues… Je n’aurais jamais dû laisser mon travail empiéter autant sur ma vie personnelle… J’ai l’impression que quelque chose s’est brisé en moi… Je me sens si vulnérable parfois, si seule…

- Tu n’es pas seule Scully, affirma Mulder. Je suis là. Je suis là pour toi… avec toi.

- Et Phoebe, Diana, Joann… et Emy… Tu as été là aussi, pour elles…

- Scully ! s’exclama Mulder, visiblement blessé par la remarque de son amie. Ces femmes appartiennent à mon passé. Tu ne vas tout de même pas me reprocher d’avoir connu d’autres femmes avant de te rencontrer… Toi aussi tu as connu d’autres hommes ; ce qui me semble tout à fait normal, d’ailleurs. Et en ce qui concerne Emy, si je la vois de temps en temps, c’est uniquement en tant que collègue et ami.

- Hum…, fit Scully d’un air suspicieux.

- Bon d’accord, concéda Mulder, j’avoue… je l’ai embrassée… Mais ça ne s’est produit qu’une seule fois et c’était il y a plus d’un an.

- Lors de cette affaire sur laquelle vous avez enquêté ensemble, avança Scully.

- Oui, confirma Mulder.

- Si je me souviens bien, vous aviez partagé la même chambre pendant plusieurs jours et…

- Non, Scully, anticipa Mulder qui avait deviné ce que son amie suspectait. Nous n’avons pas partagé le lit et il n’y a rien eu de plus qu’un baiser. Et puis quoi ?… Un baiser, ce n’est pas si grave, après tout… Scully, je te jure qu’il n’y a jamais rien eu d’autre que de l’amitié, entre nous. D’ailleurs, tu peux être rassurée car elle est maintenant en couple avec un autre agent, Andrew Sanders… Et ça à l’air de marcher très fort, entre eux!

- Et Joann ? » se risqua Scully, qui posait enfin la question qui lui brûlait les lèvres depuis la mort de la jeune femme, quelques mois auparavant.

Mulder retint son souffle quelques secondes et ferma ses paupières, alors que Scully regrettait déjà d’avoir posé cette question. Mais il rouvrit les yeux et lui répondit avec assurance : « Comme ma sœur, Joann est morte. Elle appartient désormais à mon passé. Je ne vais pas te mentir, Scully, elle sera toujours là, en moi. Nous avons partagé notre enfance, notre adolescence, nos premières années de jeunes adultes… Et je ne pourrai jamais l’oublier. Mais elle n’est plus là, maintenant. Elle ne partage plus ma vie depuis bien longtemps. Et la seule qui partage ma vie aujourd’hui et depuis plus de six ans, c’est toi. Toi, et personne d’autre. »

 Il se rapprocha un peu plus d’elle. Mais il sentait qu’elle cherchait encore à le fuir : « Oh Mulder ! murmura-t-elle, troublée. Je ne sais plus… Je ne sais pas si c’est le bon chemin… Mulder, je crois que j’ai peur…

- Je sais. Moi aussi j’ai eu peur. J’ai essayé d’imaginer ce qui pourrait se passer si ça ne marchait pas… J’ai douté… »

Il tentait de la convaincre mais elle ne semblait pas l’écouter et continuait : « … J’ai peur de commettre une erreur… le genre d’erreur qui ne se corrige pas. »

Il ne voulait pas la perdre, pas maintenant alors qu’elle était si proche de lui. Il fallait qu’il trouve les mots pour lui faire comprendre… « Ne laisse pas la peur t’envahir, Scully, insista-t-il d’une voix qui se voulait aussi convaincue que rassurante. N’enfouis pas à nouveau tes sentiments au fond de toi, pour ne plus les entendre te crier ce que ton cœur cherche à te dire. Je sais à quel point tu t’es toujours battue pour être forte, pour ne pas craquer, pour faire face courageusement à tout ce que nous avons vécu ensemble. Mais ne pense pas que l’amour soit une faiblesse ou une erreur contre laquelle il faut lutter. L’erreur serait justement de passer à côté de la chance que la vie nous a donnée…» Alors Scully leva à nouveau ses yeux vers Mulder. Elle le fixait avec une telle force qu’il avait du mal à soutenir son regard. « Mulder, dit-elle calmement, je ne veux pas te perdre.»

Il ne pouvait continuer ainsi, il fallait qu’il lui fasse prendre conscience de son erreur : « Tu ne me perdras pas, assura-t-il. N’avons-nous pas déjà traversé ensemble plus d’épreuves que la plupart des couples n’en vivent jamais ? On a tenté de nous séparer combien de fois ? N’avons-nous pas risqué tant de fois nos vies l’un pour l’autre ? Il me semble que cela fait déjà longtemps que nous sommes bien plus que de simples coéquipiers ou amis. »

Elle soupira : « Je sais. Je crois que je l’ai toujours su. Mais il me faudra peut-être du temps pour l’accepter…

- Peu importe le temps, Scully… Nous avons toute la vie devant nous… Mes sentiments ne changeront pas… Ça fait combien d’années maintenant, hein ?… On n’est plus à ça près… »

Un sourire s’esquissa sur son visage qui se ranimait. « Merci », dit-elle, simplement.

Mulder, retrouvant sa confiance, caressa délicatement de ses doigts le visage de Scully. Puis, il prit sa tête entre ses mains, rapprocha ses lèvres de son front et l’embrassa. Elle ferma les yeux et ils restèrent un moment, les yeux fermés, front contre front dans le silence. L’instant était d’une extrême intensité et ils se sentaient, tous deux, plus proches qu’ils ne l’avaient jamais été auparavant. Enfin, Mulder se recula légèrement et la lâcha. « Je crois que tu devrais aller te coucher, conseilla-t-il. La journée qui nous attend demain ne va pas être de tout repos et tu risques d’être fatiguée. » Elle acquiesça : « Tu as raison. »

Elle se leva, tandis qu’il restait assis sur le canapé. Il se risqua : « Je reste dormir là, si tu veux… Au cas où… On ne sait jamais…» Puis, sans lui laisser le temps de répondre, il enleva sa veste, s’allongea et dit : « Bonne nuit Scully.

- Bonne nuit Mulder », répondit-elle en s’éloignant.


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Message  Oiseaubleu Jeu 28 Aoû 2014 - 21:02


Elle se dirigea vers sa chambre, à pas lents. La porte était restée grande ouverte. Arrivée à l’entrée de la pièce, elle la parcourue du regard. Elle s’arrêta sur son grand lit défait. Elle n’arriverait pas à se recoucher. Pas ce soir. Pas seule. Et elle resta là, pensive, durant de longues minutes, avant de se décider à faire demi-tour.

Mulder était toujours allongé sur le canapé, le regard perdu en direction du plafond qui s’étendait au-dessus de lui. Il n’avait même pas pensé à éteindre la lampe qui éclairait le salon. Ces mots, ces mots qui sommeillaient en lui depuis si longtemps, étaient sortis si vite, si simplement… Il n’arrivait pas vraiment à réaliser qu’il lui avait enfin avoué sérieusement, ce qu’il ressentait, en lui déclarant son amour.  Et voilà, c’était fini, c’était fait… Qu’allait-il se passer maintenant ? Comment allait-elle réagir ? Et demain, pourraient-ils encore continuer à travailler ensemble, comme avant, comme si rien ne s’était passé ?

Il avait fermé les yeux et commençait à se détendre. Elle ne pouvait voir son visage mais sa respiration paraissait calme. Il devait être en train de s’endormir. Elle le regardait depuis un bon moment déjà, debout, appuyée contre l’embrasure de la porte, quand il se retourna. « Scully ! s’exclama-t-il, surpris. Mais qu’est-ce que tu fais là ? » Elle le regardait toujours, sans rien dire. Il se leva, se rapprocha d’elle et l’entoura de ses bras : « Viens avec moi, je vais t’accompagner. Il faut que tu te reposes. » Elle se laissa faire sans un mot, et le suivit.

Quand elle fut enfin allongée dans son lit, il rabattit sur elle la couverture, puis, après avoir enlevé ses chaussures, il s’allongea à ses côtés : « Je vais rester là près de toi, si tu veux. Ferme les yeux et ne pense plus à rien. Demain nous reparlerons tranquillement de tout ça. » 

Mais comment lâcher prise et s’endormir dans un moment pareil. La proximité de son corps la troublait profondément. Elle se sentit à nouveau prise d’un vertige et comprit qu’elle allait encore redescendre, dans le tourbillon. Alors, d’un geste désespéré, elle s’agrippa à lui en gémissant son nom : «Mulder… » Il sentit ses bras glisser sous les siens, alors que de ses mains, elle attrapait sa chemise. Leurs corps étaient serrés l’un contre l’autre, à présent, semblant ne former qu’un. Il avait ramené ses bras autour de ses épaules, et ses mains se perdaient dans sa chevelure et son cou. « Je suis là Scully, murmurait-il, je suis là, avec toi. »

Elle continuait à s’enfoncer dans le gouffre et sa chute lui semblait interminable… Comme la veille, quand elle était tombée avec cet homme dans la rivière. Le mouvement du tourbillon qui l’entraînait se faisait de plus en plus rapide, emportant dans sa course folle les derniers sursauts de sa conscience. Il lui semblait que l’eau emplissait sa gorge et ses poumons ; qu’elle s’étouffait. Elle ne sentait plus son corps mais percevait pourtant avec violence, les battements de son cœur déchaîné. Elle avait mal. Dans son ventre, elle sentit une déchirure indescriptible… La crampe recommençait à l’oppresser.

Mulder ne comprenait pas ce qui se passait. Il était complètement paniqué. Il n’avait jamais vu Scully dans un état pareil. Il ne savait comment réagir face à cette crise qui l’arrachait à lui. Son corps était tétanisé alors que son esprit, perdu dans un flot de questions, tournait à vide sans pouvoir lui apporter la moindre réponse ou solution. Alors, dans un effort désespéré, il abandonna là sa conscience, pour se tourner vers le seul guide qui ne l’avait jamais trompé : son intuition.

Il avait en lui un don pour l’empathie, cette faculté intuitive que possèdent certains hommes, à pouvoir se glisser dans l’esprit et le cœur de leurs semblables. Cette aptitude, il l’avait développée durant ses années d’études à l’université et c’est grâce à elle qu’il avait pu dresser le portrait psychologique de nombreux criminels. Il avait la capacité de comprendre et de saisir ce qui se cache au tréfonds de l’âme et de l’inconscient humains. Il fallait maintenant qu’il se serve de cette faculté pour entrer en elle, et la sauver.

Scully descendait toujours, plus profond… Dans sa chute, il lui semblait remonter le temps à la rencontre de son passé. Elle revivait intensément toutes ces scènes qui avaient jalonné sa vie, jusqu’à ce jour. Sa course effrénée contre la mort avec Mulder, ses enlèvements, la perte de sa fille, sa stérilité, sa maladie, la mort des êtres aimés… Elle se revoyait, elle, femme, au milieu de ce monde masculin et brutal, dans lequel elle évoluait au sein du FBI. Elle redevenait l’étudiante en physique et en médecine, travaillant sans relâche pour réussir la brillante carrière dont rêvait pour elle, son père. Les dissections, les injections, le sang, les autopsies, la proximité avec la mort et la souffrance… Elle était à présent petite fille… Fille de militaire… Petit soldat… Je suis un petit soldat… Les soldats ne pleurent pas… Les soldats ne tombent que pour mourir.

Mulder avait senti ses doigts se décrisper et lâcher progressivement sa chemise. À mesure qu’elle se détendait, il la serrait plus fort contre lui, pour la retenir. Plus que jamais, il avait peur de la perdre. Il rapprocha ses lèvres de son oreille et lui murmura encore: « Je suis là Scully, reste avec moi… » Mais elle ne l’entendait plus. Elle avait sombré dans les eaux de la rivière, avec cet homme qui la tirait irrémédiablement vers le fond. Alors, sentant qu’elle lui échappait, il ferma les yeux à son tour et l’enlaça de tout son corps… Il se sentait partir avec elle, comme s’il plongeait à l’intérieur de son être…  Il s’abandonnait au vertige de sa chute, pour mieux la retrouver.

Le bruit recommençait… Ce bruit de machine qui coupe du bois… ce bois qui tombe mort… ce bois mort. Elle courait dans ce bois. C’était la fête. Les enfants criaient et chantaient à tue-tête. Maintenant, les enfants avaient été réunis dans le grand salon et l’on avait décidé de faire une partie de cache-cache. Sa mère l’avait embrassée sur le front et s’était éloignée avec son père, en direction du jardin où d’autres parents discutaient. Elle marchait à pas rapides pour trouver sa cachette, il fallait faire vite… L’escalier… Je vais prendre l’escalier, se disait-elle. Elle grimpait l’une après l’autre les marches, aussi vite que ses petites jambes de trois ans le lui permettaient. Elle avait trois ans…

Au bout du couloir, elle s’était retournée. L’homme était debout, en haut de l’escalier qu’elle venait de monter. L’avait-il suivie ? Il s’approcha d’elle et lui proposa, avec douceur : «Si tu veux, je peux te montrer une cachette que personne ne connaît… » Elle avait pris la main qu’il lui tendait… sans crainte. Pourtant, un frisson qu’elle ne s’expliquait pas la parcourait. Elle le suivit jusqu’au grenier. Quand la porte fut fermée, il se rapprocha d’elle et, la prenant dans ses bras, lui dit : « Regarde, la vue est splendide d’ici. » En effet, par la petite fenêtre,  un spectacle magnifique s’offrait à ses yeux. Il y avait le ciel bleu où se promenaient quelques nuages et plus bas, les arbres de la forêt… Et toujours ce bruit… ce bruit de machine qui coupe du bois…

Mulder plongeait toujours en elle, alors que ses lèvres s’égaraient parfois sur sa bouche restée entrouverte, sur son visage et son cou. Il fallait qu’il la sente vivante entre ses bras, il fallait qu’il la ranime. Il avait l’impression d’être redescendu dans l’eau de la rivière, d’où il l’avait tirée la veille. Il ressentait son vertige, sa tête tournait et il percevait au loin, ce bruit de machine qu’il avait entendu sur la rive, lorsque sa main avait effleuré sa peau nue.

Dans le grenier, il y avait un grand coffre à jouets d’où l’homme avait tiré un joli clown qu’il lui avait donné et qu’elle serrait contre son cœur. Assise sur ses genoux, elle regardait les images d’un grand livre, qu’il était en train de lui raconter. Elle avait oublié le jeu. Elle avait oublié que c’était une cachette. Quand soudain, elle sentit son corps se raidir. La main de l’homme glissait lentement sur sa peau nue, remontait le long de sa jambe, sur sa cuisse, sous sa robe. Elle ne comprenait pas. Elle avait peur. Elle avait mal. Elle savait que ce n’était pas bien mais elle ne savait pas ce que c’était. Alors, pour échapper à ces mains qui se faisaient de plus en plus pressantes et qui lui volaient sa chair, elle fixa de ses yeux les nuages qu’elle voyait à travers la petite fenêtre, et de toutes ses forces, elle tenta de s’évader de son corps… Elle flottait parmi les nuages, elle était un nuage… Elle ne ressentait rien, elle ne voulait rien ressentir. Elle ne voulait pas savoir ce qui se passait ni ce qu’on lui faisait. Elle voulait oublier, oublier pour toujours…

Quand elle était sortie de la cachette, elle avait jeté le petit clown par terre et avait couru rejoindre ses parents, qui étaient revenus dans le grand salon. Elle ne pleurait pas. Sa bouche était restée fermée. Elle n’avait pas parlé. Elle avait laissé derrière elle l’homme sans visage, ce méchant Monsieur dont les mains la menaçaient... Elle n’avait jamais dit. Elle ne dirait jamais. Les petits soldats ne pleurent pas… Les petits soldats ne tombent que pour mourir… Elle voulait mourir.

Il était enfoui là, ce secret, au fond de la rivière, de sa rivière. Et il y était resté caché depuis tant d’années… Avec le temps, elle avait oublié… Elle n’avait que trois ans… Et elle comprit, à ce moment, l’origine de la distance qu’elle avait toujours mise entre elle et les autres, sa réserve et sa pudeur excessive… autant de murailles qui la protégeaient. Combien d’hommes avait-elle laissé rentrer dans son intimité… peu… si peu… Elle avait toujours veillé à rester sur ses gardes, à ne pas se livrer toute entière, de peur d’être trahie, blessée, de peur de souffrir. Elle était trop intègre, trop droite, trop rigide… comme son corps d’enfant. Elle avait eu peur de cet amour qu’elle avait découvert en elle… Elle avait peur d’aimer Mulder. Peur qu’il ne rentre au plus profond d’elle-même et ne découvre cet endroit, où elle avait mal… peur qu’il ne la blesse… peur de le perdre aussi… Elle ne pouvait se permettre de faiblir ou d’échouer.

À présent, les mains de Mulder s’étaient glissées sous la veste de son pyjama et de ses doigts, il caressait son dos… Elle était chaude… trop chaude. Il se releva brusquement et tâta son visage. Elle était brûlante, sa peau ruisselait sous les gouttes de sueur qui perlaient et coulaient de son front. « Scully ! appela-t-il avec force, en saisissant ses bras. Scully tu es brûlante, tu as de la fièvre, il faut te soigner ! » Elle entrouvrit les lèvres comme pour parler mais sa voix était trop faible, et il n’entendit qu’un léger murmure s’en échapper. Alors, se recroquevillant sur elle, en la serrant avec plus de force, il rapprocha son oreille de ses lèvres afin d’entendre ce qu’elle disait : « J’ai trouvé la clé », répéta-t-elle à mi-voix.

Les mains de Mulder étaient retournées sous sa veste, contre son dos, sur sa peau nue. Il sentait qu’il se passait quelque chose. Et ce fut comme si cette peau se craquelait, comme si sa chair se déchirait et partait en lambeaux… Le vase fêlé d’une éraflure se fissurait de toutes parts, laissant s’échapper les eaux qu’il contenait… C’était comme un naufrage… Ils étaient naufragés… C’était comme une naissance…

Alors, comme la veille, quand elle était en train de couler, elle sentit son instinct remonter en elle et secouer tous ses membres d’un spasme violent. C’était comme un cri de rage venu du tréfonds de son être. L’instinct de survie, l’instinct de vie… La secousse traversa leurs deux corps comme une décharge électrique, et elle ouvrit les yeux, en aspirant dans un râle profond,  autant d’air qu’elle le pouvait…

Tout était fini. Elle le savait. Elle avait été au plus profond d’elle-même affronter ses démons, ceux qui la retenaient et l’empêchaient de vivre pleinement sa vie de femme. Elle en était revenue libre et vivante. Du moins, elle le pensait…


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Message  Oiseaubleu Sam 30 Aoû 2014 - 16:40


A présent, ils étaient tous les deux allongés sur le dos, comme la veille, main dans la main. Ils essayaient de reprendre leur souffle et leurs esprits. Mulder se releva le premier et se pencha sur elle : « Scully, il faut que tu te soignes, tu as de la fièvre, tu ne peux pas finir la nuit comme ça.

- Non Mulder, refusa-t-elle, faiblement, je ne veux pas, pas tout de suite… »

Elle esquissait un léger sourire pour essayer de le rassurer. Mulder continua : « Je ne peux pas te laisser dans cet état, regarde-toi, tu trembles toute… » En effet, de grands frissons parcouraient son corps. Mais elle ne voulait pas céder : « J’ai compris Mulder, j’ai compris pourquoi je ne pouvais pas t’aimer…On m’a fait mal… un homme… on a abusé de moi quand j’étais enfant et…, bafouilla-t-elle, alors que des sanglots entrecoupaient ses phrases. Je n’en ai jamais parlé… j’avais tellement peur, tellement honte… j’ai tant voulu effacer ce souvenir que je l’ai enterré en moi pour l’oublier à jamais… Et hier, quand tu m’as touchée…il y avait cet homme… ce même bruit de… » Elle avait du mal à parler et Mulder, instinctivement, la prit entre ses bras pour qu’elle s’arrête…  « Je sais, lui murmura-t-il, j’ai compris…

- Comment as-tu compris ? balbutia-t-elle, surprise.

- Je ne sais pas, je l’ai senti tout à l’heure, quand tu étais contre moi… » 

Elle ne savait que dire. Il la surprendrait toujours…

« Mulder, reprit Scully à voix basse, une fois qu’elle se fut calmée. Il y a autre chose que je viens de comprendre. Une chose qui me perturbe depuis des mois et que je n’arrivais pas à m’expliquer…

- Qu’est-ce que c’est ? demanda Mulder, à la fois intrigué et inquiet.

- Il y a quelques mois de cela, j’ai tiré sur un homme non armé… Je l’ai tué…

- Oh non, Scully ! ne me dis pas que tu te sens toujours coupable de ce qui s’est passé… Cet homme était un meurtrier, il t’a séquestrée, agressée, il t’aurait tuée si…

- Je sais Mulder, je sais, l’interrompit-elle. Mais je ne trouvais pas de réponse… Depuis des mois je me demande ce qui m’a poussée à appuyer sur la gâchette… Je me demande comment moi, j’ai pu faire une chose pareille… Maintenant, je sais. J’ai enfin compris pourquoi j’ai tué Donnie Pfaster. »

Elle se tut, un instant. Puis reprit, gravement : « Il y a quelque chose que tu ne sais pas, Mulder. Quelque chose que je n’ai pas réussi à te dire à propos de cette affaire et qui ne figure pas dans mon rapport.

- Scully, qu’est-ce que tu essayes de me dire ? interrogea Mulder, dérouté. Tu m’inquiètes, tu sais…

- Cet homme n’a pas uniquement cherché à me tuer…, poursuivit-elle.

- Ne me dis pas que…

- Non, Mulder, le rassura-t-elle, immédiatement. Ne t’inquiète pas. Il ne m’a pas touchée. Enfin… Il m’a agressé physiquement, c’est tout… Cependant… »

Scully fit à nouveau une pause. Elle avait besoin de reprendre son souffle. Elle était épuisée, fiévreuse et le fait d’évoquer ces événements douloureux, lui était pénible. Mulder s’était tu. Il avait resserré son étreinte pour que son amie se sente protégée. Pour qu’elle sache qu’il était bien là, pour elle, et qu’il était attentif à ce qu’elle avait à lui dire.

« … Il l’aurait fait, Mulder…, expliqua Scully. Il était sur le point de le faire… Pfaster avait l’intention de me… violer… avant de me tuer… J’entends encore sa voix murmurer ces choses horribles à mon oreille…

- Scully, dit Mulder avec émotion, en attrapant le visage de son amie entre ses mains et en plongeant son regard dans le sien. Pourquoi ne m’as-tu rien dit ?

- Je n’ai pas pu, Mulder, se justifia-t-elle à mi-voix. J’ai essayé de t’en parler… mais les mots ne me venaient pas. Tu sais, l’affaire Pfaster a été pour moi l’une des enquête les plus difficiles de ma carrière… justement à cause de ça. Je crois que j’ai senti tout de suite, l’attirance qu’il avait à mon égard. Au-delà de sa volonté de me tuer, il y avait autre chose… un désir… un désir malsain, d’ordre sexuel. Et c’est cela qui m’a fragilisée… le fait de me sentir à nouveau considérée comme une victime potentielle… d’être regardée par un homme comme une chose fragile, vulnérable, comme un objet que l’on peut posséder à sa guise… sexuellement… Mulder, c’est la terreur que j’ai éprouvée, petite fille, lorsque cet homme a abusé de moi, qui m’a poussée à appuyer sur la gâchette pour tuer cet homme qui s’apprêtait à me faire revivre mon cauchemar… J’ai fait ce que j’aurais dû faire, enfant, Mulder… Je me suis défendue… Je me suis protégée… » 

*


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Message  Oiseaubleu Sam 30 Aoû 2014 - 16:44


Elle ne put refuser le verre d’eau qu’il lui tendit un moment après, et elle avala à regret un comprimé pour faire baisser sa fièvre. Cette fièvre qui l’avait libérée… Puis, elle s’étendit à nouveau sur le matelas et Mulder, s’allongeant près d’elle, ramena sur eux la couverture. Il avait enlevé sa chemise, pour être plus à l’aise. Peut-être aussi pour sentir un peu plus ce corps qu’il désirait ardemment, malgré lui. En effet, depuis qu’il était rentré chez elle, il n’avait pas pensé une seule seconde à lui. Il avait contenu avec force ces élans insensés qu’il avait sentis monter dans sa chair, pour ne penser qu’à elle.

Recroquevillée sur elle-même, les bras repliés devant sa poitrine, Scully se sentait confusément pénétrée d’un désir nouveau. Ses doigts frôlaient le torse de celui qu’elle avait tant voulu avoir auprès d’elle. Puis, d’un geste timide et délicat, elle se risqua à poser ses mains sur sa peau nue… la peau de l’autre… cette peau amie… cette peau aimée. Mulder la laissait faire, il ne voulait pas la brusquer. C’était à elle de lui montrer le chemin. Il l’attendait. Enfin, elle osa glisser ses bras sous les siens, comme elle l’avait fait durant sa crise, et ne retrouvant plus le tissu de la chemise, elle plaqua ses deux mains ouvertes contre son dos. Elle se tenait à lui. Il était devenu son seul repère.

Ils étaient tout proches, à présent. Enlacés. L’un en l’autre... l’un dans l’autre. Aucune parole ne montait plus à leurs lèvres. Les mots n’étaient plus nécessaires. Ils n’en avaient plus besoin. Ils se comprenaient, ils se savaient… Plus rien ne comptait pour eux. Et le temps et l’espace se figèrent à l’instant où le désir brûlant qui avait entraîné Scully dans sa chute, se réveilla au fond de son ventre.

De ses doigts, elle appelait les mains de Mulder à venir sur elle, sur sa peau, à découvrir son corps qui craignait de se livrer. De ses lèvres, elle appelait sa bouche à partager en elle, ses baisers. Comme Scully, Mulder avait perdu pied. Il se laissait porter par son désir de la posséder, de la retenir en lui et d’effacer cette peur de la perdre, qui n’avait cessé de grandir avec les années, ses agressions et ses enlèvements successifs. Dans la pénombre, le regard transi de Scully avait croisé celui de Mulder. Et ivre de bonheur, il avait plongé sa tête dans l’épaisse chevelure rousse et décoiffée de son amie. Ses lèvres perdues dans ses cheveux étaient descendues se poser sur son cou. Son cou encore chaud… presque brûlant… de fièvre…

Comme électrifié par la chaleur de sa peau, Mulder se redressa brusquement et rejeta son corps en arrière, comme pour s’arracher à elle. Non ! Il ne pouvait pas… Il ne fallait pas… pas cette nuit ! Et se dégageant vivement des draps, il ramena ses jambes au bord du lit afin de se lever. Mais Scully, bien que surprise par le geste de son ami, avait réagi presque aussitôt. Et avant qu’il n’ait eu le temps de se lever, elle jeta ses bras autour de ses épaules. Le serrant avec force, elle bascula sa tête contre la sienne, en l’implorant de rester : « Je t’en prie Mulder, ne t’en va pas. Reste avec moi. » Mulder se figea, ne sachant que faire. Il était déchiré entre son cœur, d’où jaillissait son désir fou de la posséder, et sa conscience, d’où émanait le profond respect qui lui intimait l’ordre de refuser ses étreintes.

« Je ne peux pas te faire ça, se défendit-il, en se retournant vers elle et en la saisissant par les épaules. Pas dans ton état. Tu viens de vivre des événements difficiles qui t’ont déstabilisée. Avec ça, tu es malade et ta fièvre est trop forte pour que je sois certain que tu es bien consciente de ce que tu fais. Scully, tu es dans un moment de faiblesse et je ne veux pas profiter de la situation pour avoir avec toi une relation qui n’est pas réellement désirée. » Mais Scully ne voulait pas le laisser partir. Elle avait attrapé ses deux bras qu’elle tentait d’emprisonner entre ses mains, comme pour le retenir. « Je suis tout à fait consciente de ce que je fais Mulder, affirma-t-elle, avec conviction. Et je te demande de rester… Si tu m’aimes, reste avec moi. » Elle le fixait à présent, et ses yeux bleus, où se lisaient à la fois la détresse et la supplication, s’enfonçaient dans ceux de Mulder, avec force. Mais Mulder résistait. C’était lui maintenant qui tentait d’élever des murs entre eux, pour ne pas céder à cette demande qui, venant de la part de sa coéquipière, lui semblait insensée. 

« Scully, pourquoi veux-tu que je reste ? demanda-t-il, enfin. Est-ce parce que tu m’aimes, ou parce que tu te sens trop faible ce soir, pour affronter ta solitude, et que tu as besoin de moi ? » Il avait parlé d’une voix calme et posée. Il avait repris le contrôle de lui-même. Il poursuivit : « Tu ne peux pas imaginer ce que je suis en train de subir en ce moment… Mais je ne veux pas penser à moi. Je ne veux penser qu’à toi. Et je te connais assez pour imaginer ta réaction demain matin, quand ta fièvre aura baissé, et que tu réaliseras peut-être avec horreur, ce que tu auras fait… ce que je t’aurai laissé faire. J’ai trop de respect pour toi, Scully… Je ne peux pas te faire une chose pareille. Je ne pourrais plus me regarder en face si je profitais de toi alors que tu n’es pas pleinement consciente de tes actes.»

Scully l’avait écouté parler, attentivement. Elle l’avait lâché et s’était reculée. Assise en tailleur sur son lit, elle le regardait, avec une profonde tendresse. Sa voix, ses mots, la réchauffaient intérieurement. Par son geste, Mulder lui prouvait à quel point il l’aimait et la respectait. « Je ne veux pas passer à côté de la chance que la vie nous a donnée, murmura-t-elle, en reprenant la phrase qu’il avait prononcée, un peu plus tôt. Nous n’aurons peut-être pas toute la vie devant nous…»

Ces mots avaient heurté Mulder de plein fouet. Devenu impuissant, face à la force de conviction de son amie, il sentit tout à coup que les murailles qu’il avait tenté d’élever autour de lui s’effritaient, qu’elles étaient sur le point de s’effondrer. Et soudainement, d’un geste incontrôlé, il bascula vers la jeune femme, et lui enserrant promptement la taille, il la renversa sur le lit pour l’embrasser. Il était totalement submergé par la force de cet amour qu’il avait contenu en lui, depuis tant d’années. Pourtant, à l’instant où il sentit la peau frissonnante de Scully contre son corps, son agitation retomba brusquement. Cette nuit était la sienne, il le savait. Il ne s’agissait pas pour lui d’assouvir ses propres désirs, cela viendrait plus tard. Mais il lui fallait être à l’écoute des demandes de celle qu’il aimait.

Scully avait peur au fond d’elle-même. L’amour l’avait toujours terrifiée. Ce flot d’émotions qui submerge la conscience … Cette perte de contrôle de soi… Cet état proche de l’ivresse ou de la folie… Cette possession par l’autre de son être, de sa chair… Cette pénétration par un corps étranger, de ses parties les plus intimes… Ces sensations qui transportent hors de soi… Tout ceci était effrayant pour une femme qui avait toujours tenté de tout diriger et de tout contrôler, dans sa vie. S’abandonner à l’autre lui semblait impossible et incompatible avec les principes qu’elle s’était imposés. Et en plus de tout cela, il y avait ce passé qu’elle venait de redécouvrir… Ce profond malaise provoqué par le souvenir de ces mains… Ces mains qui fouillaient en elle, qui pétrissaient son corps et volaient sur sa peau d’enfant, un moment de plaisir honteux qu’elle n’avait pas partagé et dont elle avait été exclue. Elle n’arrivait même plus à se rappeler ce qu’on lui avait fait. Seule restait gravée, dans sa chair, l’horrible sensation de ces doigts qui entraient en elle…

A présent, Mulder envisageait tout ce que Scully avait pu vivre de souffrances, de dégoût et de honte, du fait de son agression… La peur du regard de l’autre, de son jugement… La culpabilité… Le sentiment d’avoir été salie, souillée... La crainte que son agresseur ne la retrouve et que son cauchemar ne recommence… A cela s’ajoutait le poids d’une éducation stricte et religieuse qui lui avait surement  fait redouter la colère de son père, celle de Dieu... puis la punition qu’elle méritait, pour avoir péché malgré elle, avec sa chair… Tout cela l’avait surement poussée à se replier sur elle-même, pour se protéger d’un monde extérieur trop violent. Et elle avait dû ainsi, apprendre à cacher ses faiblesses derrière le masque d’une femme froide, forte et sûre d’elle, qu’elle avait fabriqué avec le temps et qui n’avait fait que se renforcer suite aux agressions et aux enlèvements successifs qu’elle avait vécus, depuis son entrée au FBI…

Dans le silence de cette nuit, Mulder écoutait attentivement Scully… Un soupir, un murmure… étaient autant de signes lui indiquant le chemin à suivre pour répondre à ses demandes, à ses attentes, à ses désirs. Un tremblement, un frémissement… chaque grain de sa peau appelait en lui une réponse, qu’il se devait de donner juste. Un corps, un nouveau corps… C’était ce qu’il voulait lui offrir… Recouvrir d’une enveloppe protectrice, la chair à vif de l’enfant meurtrie… Et comme les bras d’une mère tissent un espace de confiance, de protection, d’amour et de chaleur, où le corps de son enfant peut se mouvoir, s’exprimer et grandir, Mulder dénouait et renouait les fils de l’histoire de Scully, pour lui bâtir un large cocon, d’où elle sortirait femme... Il l’avait suivie dans la redécouverte de son passé, il l’accompagnait à présent, dans la reconstruction de son présent et de son avenir.

De ses mains, de ses lèvres, de tout son corps d’homme, Mulder enveloppait Scully. Tandis que ses caresses et ses baisers pénétraient son corps de femme, comme autant d’invitations à une confiance retrouvée. Une confiance en soi et en l’autre qui lui permettrait, peu à peu, de se réconcilier avec elle-même, de s’ouvrir et de le recevoir dans sa chair, comme cette moitié de soi, perdue et retrouvée… Cet autre avec qui elle avait choisi de poursuivre son chemin… jusqu’à sa fin.

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Message  Oiseaubleu Sam 30 Aoû 2014 - 20:26



II

Premier matin


 
Quand il se réveilla, elle fut la première image qui s’offrit à ses yeux. Il se releva brusquement et avec inquiétude, posa le dos de sa main contre son visage. La fièvre avait baissé. Ses frissons avaient disparu. Sa tête reposait sereinement, sur l’oreiller, et elle semblait parfaitement tranquille. Soulagé, il se leva et sortit de la pièce pour régler, par téléphone, quelques formalités. Il voulait être disponible aujourd’hui… pour elle, et il ne voulait pas la voir s’en aller travailler, après la nuit qu’elle avait passée.

Elle se réveilla une heure plus tard. Troublée, elle se releva sur ses coudes en jetant un œil interrogateur autour d’elle. Il était là. Depuis qu’il était venu se recoucher, il n’avait cessé de la regarder. Elle sembla ne pas comprendre ce qui lui arrivait, ramena énergiquement la couverture sur ses épaules dénudées, puis interrogea : « Mulder ?... Que s’est-il passé ? Quelle heure est-il ? » Elle vit alors son visage se défaire. Elle ne comprenait pas sa réaction. « Ne me dis pas que tu as oublié…, bredouilla-t-il, déconcerté.

- Non… non, balbutia-t-elle. C’est… c’est confus dans ma tête mais je crois… me souvenir…»

Elle avait prononcé la fin de sa phrase avec lenteur, alors qu’une légère rougeur montait à ses joues. Un sourire se dessina sur ses lèvres. Il était rassuré. « Mais quelle heure est-il ? reprit-elle avec empressement.

- Neuf heures, répondit-il, calmement.

- Comment ? Ce n’est pas possible ! On est en retard ! On a une réunion dans une demi-heure, tu t’en souviens et… »

Il ne la laissa pas finir : « Tu ne vas pas travailler aujourd’hui. J’ai appelé tôt ce matin pour prévenir que tu avais été malade cette nuit et que je t’accompagnais chez le médecin.»

Levant les yeux au ciel, elle poussa un grand soupir, se laissa retomber sur le lit et lui dit, en le regardant d’un air malicieux : « Tu as bien fait. Pour une fois, ce n’est pas moi qui te contredirais. » Il se pencha sur elle et la regarda attentivement, comme pour se prouver à lui-même qu’elle était bien là, qu’il ne la perdrait plus. Puis il l’enlaça et la serra fort contre lui. Leurs yeux se rencontrèrent encore alors qu’ils se souriaient. « Je t’aime Mulder, lui chuchota-t-elle. Je t’aime et je veux vivre avec toi… Aller là où tu vas, même si la vie que tu as choisie est différente, même si le chemin que tu prends est dangereux. »

Et alors qu’il enveloppait sa tête entre ses bras, elle ferma les yeux. Elle avait passé une nuit difficile ; bénéfique, mais épuisante. Elle était à bout de forces. Et peu à peu, bercée par le mouvement de ses bras, bercée par cette étreinte infinie, pleine du sentiment de confiance et de protection qu’il lui apportait, elle s’endormit à nouveau, emportée par un profond sommeil, réparateur et apaisant.


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Message  Oiseaubleu Sam 30 Aoû 2014 - 20:32



CHAPITRE II : N’OUBLIE JAMAIS


I
Au fil des pages…


 
Le dimanche se terminait. Un dimanche qui ne ressemblait à aucun autre. Pour une fois, il avait accepté de lever le nez de ses dossiers,  pour profiter du week-end. Ils étaient partis en voiture le vendredi, après le travail, et s’étaient éloignés de la ville. Ils voulaient être seuls. Ils ne tenaient pas à être vus ensemble. Cette escapade leur avait permis de paresser un peu, dans une élégante petite maison, louée pour l’occasion. Ils avaient également profité de ce temps de repos pour faire des balades en forêt... Ils avaient passé de longues heures à marcher, main dans la main, savourant la profonde sérénité qui émanait de cette nature. Durant ces deux jours, ils avaient vécu comme un couple, un vrai couple. Ils avaient oublié le tumulte de la ville, le travail, les rapports à rédiger, la pression et la menace constante qui pesaient sur eux, pour devenir enfin, des êtres normaux… Etre comme tout le monde, voilà ce à quoi ils aspiraient parfois. Mais le week-end avait fini et il avait fallu rentrer.

« Tu restes ce soir ? avait demandé Scully, sentant que le moment de la séparation approchait.

- Non, je ne peux pas, désolé. J’ai un rapport à finir pour demain matin. Et je me vois mal avouer à Skinner que je n’ai pas eu le temps de le boucler parce que j’ai passé un week-end en amoureux… avec ma charmante coéquipière… »

Il avait répondu en clignant de l’œil, un sourire au coin des lèvres. Mais cette réponse de Mulder avait déçu Scully. Elle avait terriblement envie qu’il reste. Elle en avait besoin. Mais, comme à son habitude, il fallait qu’il rédige son rapport à la dernière minute, dans l’urgence… La façon de travailler de son coéquipier l’agaçait parfois. Elle qui était si régulière, si constante dans tout ce qu’elle faisait, elle avait du mal à comprendre la manière dont il fonctionnait.

« J’avais vraiment envie que tu restes, avait-t-elle insisté.

- Je suis désolé Scully, mais ce rapport est très important. Tu sais à quel point on m’attend au tournant. Je ne peux pas me permettre de faire le malin, actuellement. Je te promets que demain… »

Elle n’avait pas écouté la suite de sa phrase. Demain, ce serait trop tard. C’était ce soir qu’elle avait besoin de lui. Pourquoi ? Elle n’en savait rien. Mais elle le sentait en elle comme une évidence, comme une urgence. Pourtant, elle ne dit rien. Elle le respectait trop. Et puis, il lui avait déjà consacré tout son week-end…

« D’accord, avait-elle répondu. On se voit demain matin, alors. Je te retrouve au bureau après ta réunion…»

Mulder avait fait la grimace en pensant à cette entrevue avec Skinner et d’autres hauts responsables du FBI, qu’il aurait préféré éviter. Puis, il avait pris ses affaires. Une fois devant la porte, ils avaient échangé un baiser et il était parti.

*


Il était plus de dix heures quand Mulder sortit du bureau de Skinner. Ouf, enfin sorti de là, se dit-il en lui-même. Il n’en voyait plus la fin. Un des directeurs adjoints avait voulu lire son rapport devant lui et lui avait demandé d’innombrables précisions sur le déroulement de cette enquête, pour laquelle on lui avait demandé son concours. Cet homme voulait le piéger, c’était évident. Mais il avait eu réponse à tout. Et pour une fois, pas de petits hommes verts… rien qui ne sortait de l’ordinaire. Aussi, personne n’avait rien trouvé à redire de son travail.

En rentrant dans le bureau, il fut surpris. Scully n’était pas là. Aucune trace de sa veste ou de ses affaires. Il regarda sur le bureau à la recherche d’une note, d’un mot laissé à son intention. Rien. Il écouta les messages sur son répondeur, vérifia sa boîte mail… Bizarre. Ils avaient convenu de se retrouver là, après son entretien. Mais il avait tardé et elle avait peut-être été amenée à repartir. Il l’appela sur son téléphone portable, sans résultat. Puis il essaya chez elle, laissant même un message. Avait-elle eu un problème ?

*


En sortant de l’appartement de son amie, Mulder sentit soudain une bouffée d’angoisse l’envahir. Tout semblait en ordre, mais elle n’était pas là. Il retourna alors chez lui, pour vérifier qu’elle ne lui avait pas laissé un message sur son répondeur. Mais rien, toujours rien. Il pensa alors à un accident mais se ressaisit en se disant que peut-être, elle avait eu une urgence familiale.

« Non Fox, avait répondu Margaret Scully. Je ne sais pas où est Dana. La dernière fois que je lui ai parlé, c’était vendredi, avant que vous ne partiez à la campagne.» La mère de Scully essayait de dissimuler ses craintes mais elle était inquiète. Très inquiète. Un long silence avait suivi, puis elle avait repris : « Que se passe-t-il, Fox ?  Que lui est-il arrivé ? ». Sa voix s’était soudainement altérée, trahissant une angoisse naissante.  « Rien, ce n’est surement rien Margaret, avait affirmé Mulder, pour la rassurer. Ne vous en faites pas, je suis sûr que je vais la retrouver au bureau, tout à l’heure. Elle a dû avoir un contretemps, une panne ou quelque chose de ce genre. Inutile de s’inquiéter outre mesure. Je retourne au bureau et je vous tiens au courant. »

Il s’était voulu rassurant au téléphone mais il était convaincu, à présent, qu’il s’était passé quelque chose. Quelque chose de grave. Ce n’était pas dans les habitudes de Scully de le laisser ainsi, sans nouvelles. Mulder était très préoccupé et en même temps, il était en colère contre lui-même. Il aurait dû rester avec elle, la veille. Elle le lui avait demandé avec insistance. Et c’était bien la première fois… Il s’en voulait. Mais son sentiment de culpabilité ne changerait rien. Il devait la retrouver.

Skinner l’avait reçu tout de suite dans son bureau. Il était le seul en qui Mulder pouvait avoir confiance et à qui il pouvait demander de l’aide. Le message avait immédiatement été passé. Mais cela n’avait rien donné. Aucune trace de Scully dans les locaux et les laboratoires du FBI, dans les hôpitaux de la région… Aussi, Skinner avait-il décidé d’envoyer une équipe de toute urgence et d’aller lui-même, avec Mulder, à la recherche de son agent.

Tout avait commencé chez Scully. Mulder en était sûr. Comment et pourquoi ? Il n’en savait rien. Mais comme toujours, il se fiait à son intuition. Il comptait sur elle pour le guider. Il était en quête du moindre indice, pouvant lui fournir un point de départ qui lui permettrait de commencer ses recherches.

A peine entré dans l’appartement, il s’était dirigé vers sa chambre. Le lit était soigneusement fait et tout était parfaitement rangé. Il avait ouvert les tiroirs, parcouru les étagères, inspecté le sol, le dessous du lit, le bureau… Rien. Rien ne venait troubler cet ordre qui la caractérisait. Puis, il avait fouillé la cuisine, la salle de bains…. Toujours rien. Revenu dans le salon, il avait parcouru lentement la pièce des yeux… Soudain, un détail avait attiré son attention : le tiroir du bureau était légèrement entrouvert. Il s’était approché et l’avait ouvert.

Une grande enveloppe avait négligemment été rangée. L’adresse de Scully y était notée mais aucun cachet de poste n’y figurait. Elle avait dû être déposée directement dans sa boîte aux lettres. Un nom seulement, au verso… Monsieur P. Padgett… Ce nom disait vaguement quelque chose à Mulder...  mais il n’arrivait plus à se souvenir exactement...

Il avait senti l’enveloppe peser dans sa main. Il y avait quelque chose à l’intérieur, de plus lourd que de simples feuilles de papier. Retournant l’enveloppe sur le bureau, Mulder fut surpris d’y voir tomber un petit médaillon. Un cœur… C’était un cœur. Un cœur humain… embrasé. Et il reconnut alors, le bijou que Scully avait reçu en cadeau, environ un an auparavant, d’un admirateur secret: un certain Phillip Padgett. Cet apprenti écrivain, qui travaillait à un roman dont elle était l’héroïne, était suspecté d’avoir commis les meurtres qu’il avait mis en scène dans son œuvre. Mulder se rappelait bien que Scully lui avait dit avoir rendu le pendentif à son propriétaire…

Il tenta alors de se remémorer sa dernière entrevue avec ce Padgett. Et il se revit, dans le sous-sol de son immeuble, face à cet homme qui s’apprêtait à jeter dans l’incinérateur, l’ouvrage qu’il venait de finir. Puis il avait entendu des coups de feu et était remonté dans son appartement, où Scully était restée seule. Il se souvenait de la peur qu’il avait éprouvé en la voyant, étendue sur le sol, inanimée, la gorge couverte de sang. Il s’était approché d’elle, avait posé un genou à terre et c’est alors que la jeune femme avait ouvert les yeux dans un brusque sursaut, en poussant un cri.

Ses mains s’étaient crispées en position de défense, comme si elle voulait se protéger de son agresseur. Puis, elle avait réalisé que c’était lui. Et, tandis qu’il la prenait entre ses bras, elle avait passé ses mains autour de son cou, calant sa tête contre la sienne tout en s’agrippant à lui avec force. Alors, elle avait fondu en larmes. Et il avait gardé un moment, contre lui, le corps de sa coéquipière secoué de sanglots, jusqu’à ce que celle-ci ne se relâche complètement. C’était l’une des rares fois où Scully avait osé se livrer ainsi à lui… exprimant sans retenue, sa peur et sa fragilité. Peu après, Mulder était redescendu au sous-sol, mais l’homme avait disparu. Le sol était couvert de sang. Ce sang qui avait été identifié plus tard, comme étant celui de cet écrivain.

Phillip Padgett n’avait jamais été retrouvé. Mais la quantité de sang qu’il avait perdu semblait trop importante pour qu’il ait pu en réchapper. Peut-être avait-il un complice qui avait fait disparaître son corps ?… Cependant, aucune piste n’avait pu permettre de poursuivre l’investigation et l’affaire était restée nous résolue. Le dossier avait alors été rangé, puis oublié. Comment Mulder aurait-il pu imaginer que cet homme était encore en vie et qu’il continuait à poursuivre Scully ?… Qui était-il vraiment? Quelles étaient ses intentions, ses motivations profondes? Comment le retrouver ? Avait-il enlevé Scully ? S’apprêtait-il à la tuer, comme il l’avait imaginé à la fin de son roman?


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Message  Oiseaubleu Sam 30 Aoû 2014 - 20:35


Une foule de questions se pressaient dans la tête de Mulder. Et, soudainement pris de panique, il réalisa qu’elle était peut-être déjà morte. Ses muscles s’étaient raidis, il sentait qu’il perdait pied. Il fallait qu’il se ressaisisse, pour elle. Si elle était encore en vie, il pouvait la sauver. Il fallait qu’il retourne à son bureau et qu’il se plonge à nouveau dans ce dossier. Il avait besoin de trouver d’autres éléments pour pouvoir résoudre cette affaire.

Il était dix-neuf heures quand son téléphone sonna. C’était Skinner. La voiture de Scully venait d’être retrouvée, abandonnée sur le bord d’une route de campagne. Une équipe devait se rendre sur place pour commencer les recherches. Le cœur battant, rempli à la fois d’un sentiment d’espoir et d’angoisse, Mulder sortit en courant de son bureau, afin de rejoindre le directeur adjoint qui l’attendait au parking. Le trajet avait été pénible. Un profond malaise s’était installé entre les deux hommes, qui étaient restés longtemps muets. Aucun des deux n’avait eu le courage d’évoquer la possibilité que Scully ne soit pas retrouvée vivante.

Deux heures, il leur avait fallu deux heures pour arriver sur les lieux. Sur place, l’équipe d’enquêteurs avait bien progressé. Des traces de pas, du sang, un morceau de vêtement déchiré, avaient permis d’orienter les recherches en direction du Sud. Par téléphone, Skinner et Mulder avaient suivi la progression des agents et ils se dirigeaient vers une vieille bâtisse, qui venait d’être localisée dans la forêt.

Ce fut Mulder qui pénétra le premier dans la maison. Il s’était jeté de tout son poids, avec une violence et une force inouïe, sur la porte d’entrée qui avait rapidement cédé. Puis, son arme pointée devant lui, il s’était engagé dans la salle principale du rez-de-chaussée. Mais, tandis que les membres de l’équipe rentraient les uns après les autres et se dispersaient dans  la maison, son regard avait été attiré au-dehors. À travers la fenêtre, il venait de repérer un objet dont il était le seul à connaître l’importance.

Il sortit de la maison en toute hâte et courut vers un piquet qui se trouvait à quelques mètres de là. Sur celui-ci était cloué un grand cœur embrasé, sculpté en bois. C’était l’exacte réplique du médaillon de Padgett. Alors qu’il s’en approchait, Mulder comprit qu’il avait vu juste. Il venait de trouver l’entrée probable d’une pièce souterraine dont un panneau en fer, dissimulé sous les herbes, condamnait l’accès.

Une fois descendu, Mulder avait balayé de sa torche l’ensemble de la vaste pièce obscure. Son arme toujours pointée devant lui, il s’y était engagé, prudemment. Quand soudain, il l’avait vue. Là, en face de lui, il distinguait une forme allongée, étendue sur le sol. « Scully ! » hurla-t-il. Et il se précipita vers le fond de la pièce. Mulder s’était laissé tomber à genoux près de sa coéquipière. Scully… c’était bien elle… sa Scully. Elle était là, qui gisait inanimée sur le sol, le corps meurtri, défigurée.

Mulder se sentit devenir fou de rage et de douleur, il n’arrivait plus à se contrôler. De ses doigts, il avait caressé délicatement le visage de Scully, qu’il avait reconnu avec peine. Ce visage qui était son seul horizon depuis tant d’années. Ce visage vers lequel il s’était tant de fois tourné pour y trouver la paix, le réconfort, un apaisement à l’agitation qui l’emportait parfois, sur les pentes de sa folie intérieure.

Et maintenant, la violence de la réalité à laquelle il faisait face, lui était insoutenable. Tout le côté droit du visage de Scully était gonflé et d’une couleur violacée, des plaies ouvertes entaillaient son arcade sourcilière et sa joue gauche et sur sa lèvre inférieure, fendue en deux, s’était formée une large croute de sang séché… Après avoir examiné son visage, les yeux de Mulder étaient descendus sur les membres dénudés de sa partenaire. Sous le faible éclairage de sa lampe, il constatait avec horreur, l’étendue de ses blessures. Du sang, des bleus, des traces de coups, des plaies béantes… Sa peau, meurtrie, semblait avoir été déchiquetée par les crocs d’un fauve enragé.

Scully ne portait qu’un tricot de corps déchiré, qui lui tombait sur le haut des cuisses, et Mulder, soudain saisi par un frisson d’effroi, rapprocha sa torche de ses jambes. Les traces de bleus à l’intérieur de ses cuisses… Non !… Non !... Mais son instinct se réveillait et machinalement, ses doigts avaient glissé sur son cou, à la recherche de sa carotide. Un battement, il fallait qu’il sente un battement. Mais il ne sentait rien. Alors, hurlant son nom, il avait saisi son corps inerte, et le ramenant contre lui, il l’avait serré avec force, entre ses bras.

À ce moment précis, un homme, qui était resté jusque-là caché dans l’ombre, dans un coin de la pièce, s’était avancé vers le couple.  Il se tenait debout face à Mulder, qui ne l’avait pas entendu s’approcher, et il observait la scène, un sourire aux lèvres.  « Vous arrivez trop tard agent Mulder, avait-il déclaré, d’un air triomphant. Cette fois-ci, c’est moi qui ai gagné la partie. » Alors, relevant sa tête vers l’inconnu, Mulder, sans réfléchir une seule seconde à ce qu’il allait faire, saisit son arme et tira. Six détonations retentirent dans le silence de la nuit, et l’homme, atteint en pleine tête, s’effondra sur le sol. Mulder venait de tuer Phillip Padgett.

*


Le dos courbé, la tête penchée sur celle de son amie, Mulder, prostré, s’agrippait au corps de Scully, qu’il ne voulait lâcher. « Mulder ! » cria pour la troisième fois Skinner, qui était arrivé peu après avoir entendu les coups de feu. « Mulder ! Lâchez-la, bon sang ! » Le directeur adjoint avait saisi Mulder par les épaules et il le secouait énergiquement pour qu’il reprenne ses esprits. L’équipe médicale arrivait et il fallait que la jeune femme soit examinée au plus vite. Relevant la tête, les yeux remplis de larmes, Mulder avait finalement desserré son étreinte et les deux infirmiers avaient pu s’approcher de son corps inerte. « Elle est en vie ! avait lancé un des hommes. Mais peut-être plus pour longtemps. Il faut faire vite ! » Ces mots avaient résonné dans la tête de Mulder comme l’écho métallique d’une balle, qui fuse, pour atteindre sa cible. Son pouls était faible mais elle vivait. Il y avait encore un espoir de la sauver.

Elle avait été transportée d’urgence dans l’hôpital le plus proche, où Skinner et Mulder étaient venus la rejoindre. Durant les heures qui avaient suivi son arrivée, elle avait subi de nombreux soins et examens. Radios, scanners, prélèvements, injections… Il fallait la soigner, mais il fallait aussi déterminer avec précision ce qui lui était arrivé : chercher sur son corps, le moindre indice qui aurait pu renseigner les enquêteurs sur les agissements et les motivations de son agresseur.

L’attente avait été interminable pour Mulder qui, surexcité, avait passé des heures à marcher de long en large, dans le hall de l’hôpital. Il se sentait comme un fauve enragé, enfermé dans une cage. Il demandait sans cesse des nouvelles de Scully, n’acceptait pas qu’on ne le laisse pas la voir. Il s’était fait plus d’une fois remarqué pour son agressivité, et Skinner peinait à le calmer. Mais il avait dû attendre longtemps… car l’état de Scully était grave. Très grave. Se débattant entre la vie et la mort, elle avait dû subir une lourde intervention chirurgicale et elle était dans un tel état de faiblesse, qu’aucun médecin ne savait si elle aurait la force de la supporter...

*

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Message  Oiseaubleu Sam 30 Aoû 2014 - 20:40


Mulder avait pris place sur le deuxième fauteuil qui faisait face au bureau du professeur Morison. A sa droite, se tenait assise la mère de Dana, Margaret Scully. Toujours en état de choc, elle pressait par intermittence un mouchoir sur ses yeux rougis d’où s’échappaient régulièrement quelques larmes, qu’elle ne pouvait contenir. Skinner, quant à lui, était resté debout, à côté du médecin. Scully ayant été retrouvée depuis plusieurs jours déjà, celui-ci avait souhaité réunir les proches de la jeune femme, pour leur expliquer la situation et leur donner des précisions sur l’état dans lequel elle se trouvait. 

Le professeur évoqua rapidement ses contusions, ses hématomes, ses plaies…. Puis, il passa en revue les traumatismes graves dont elle souffrait: son épaule droite et le tibia de sa jambe gauche avaient été brisés, elle avait plusieurs côtes fracturées, un traumatisme crânien assez sévère, sa colonne vertébrale avait été endommagée… La liste était longue et semblait ne plus s’arrêter… « Ça suffit ! coupa soudainement Margaret, d’une voix qui se voulait ferme mais qui s’étranglait dans sa gorge. C’est monstrueux, c’est insoutenable pour une mère que d’entendre des choses pareilles… » Mais n’ayant la force de poursuivre, elle avait enfoui son visage entre ses mains. Mulder, qui s’était redressé sur son siège, avait alors affectueusement glissé un de ses bras sur le haut de son dos. « On en a assez entendu, reprit-il. Dites-nous plutôt quelles sont ses chances de s’en sortir et de reprendre une vie normale. » Il avait insisté sur les derniers mots de sa phrase, car c’était ce qui importait pour lui : envisager son avenir, penser au jour où elle serait guérie… C’est comme cela qu’il voulait la voir, l’imaginer… guérie… pour la retrouver vivante, à ses côtés. 

« Elle devrait s’en sortir, dit le professeur. Aujourd’hui, je n’ai plus de raison d’en douter, même si elle reste encore très faible. Mais quant à reprendre une vie normale… Il va lui falloir du temps, beaucoup de temps… Bien sûr, il ne sera plus question pour elle, de reprendre son travail au FBI. Elle va devoir se ménager. Il lui faudra beaucoup de repos. Elle devra faire de la rééducation pendant de longs mois… De plus, un suivi psychologique sera indispensable: on ne ressort pas indemne de ce genre d’expérience… Vous devez savoir qu’elle risque de ne plus être tout à fait la même qu’avant son enlèvement. L’agression qu’elle a subie a été d’une extrême violence et elle aura besoin d’énormément d’attention, de soin et de soutien pour arriver à surmonter cette épreuve … »

Le médecin continuait de parler, mais Mulder n’écoutait plus. Depuis quelques instants, une image était revenue le hanter… Une image où il voyait des bleus sur les faces internes des cuisses de Scully et où il ne savait plus ce qu’il devait penser… « Vous ne nous avez pas tout dit ! » lança Mulder, sans se rendre compte qu’il venait de couper la parole au professeur Morison. « En effet, acquiesça-t-il. J’allais y venir. » Skinner avait ramené sa main sur son front qu’il agrippait nerveusement. « Mulder ! dit-il en relevant la tête vers lui. Avant toute chose, je voudrais vous demander de garder votre calme ! Ce que le docteur va vous dire risque d’être particulièrement pénible à entendre mais…

- Quoi ? Qu’y-a-t-il encore ? Qu’est-ce que c’est ?... » gémit Margaret.

La mère de Scully craquait complètement et elle ne pouvait plus contenir les sanglots qui l’étouffaient. Elle avait porté son mouchoir sur ses lèvres pour maintenir fermée sa bouche, qui était prête à hurler, tant la douleur qu’elle ne cessait de réprimer était forte.

« Il l’a violée ! » lança Mulder, d’une voix qui se voulait maîtrisée mais qui portait en elle les germes d’une violente colère, sur le point d’exploser. Et rejetant brutalement sa chaise, qui se renversa sur le sol, il se redressa: « Il l’a violée parce qu’il ne pouvait l’avoir consentante… Et elle s’est défendue de toutes ses forces, jusqu’à ce que son corps ne se brise sous ses coups ! » Mulder criait maintenant, il était déchaîné et ne pouvait plus se contrôler. Il était submergé par une indescriptible douleur qui l’oppressait. Il se sentait devenir fou en imaginant le corps de Scully se débattre, sous celui de Padgett. Alors, il sentit monter en lui une rage profonde, une haine qui lui avait été jusqu’alors, inconnue. « Où est-il? hurla-t-il. Où est le corps de ce monstre, que je lui déchire la peau, que je lui arrache les membres !

- Mulder ! » s’écria Skinner.

Le directeur adjoint avait bondi vers son agent pour tenter de le maîtriser. Mais Mulder était incontrôlable. Margaret Scully s’était effondrée sur le bureau, les bras repliés sur sa tête, qu’elle agrippait. Mulder ne pouvait plus rien pour elle… il ne pouvait plus rien pour lui…

Il était sorti du bureau en courant et s’était précipité dans la chambre de Scully, où il s’était effondré, devant son lit. Secoué de sanglots, il s’était penché sur elle,  et alors qu’il laissait retomber sa tête contre le corps de son amie, il avait attrapé sa taille entre ses mains. « Scully… ma Scully…, gémissait-il, …qu’est-ce qu’il t’a fait… pourquoi ?... tout est ma faute… si seulement j’étais resté avec toi… pardonne-moi, Scully… pardonne-moi…» Il était en train de sombrer, envahi par un désespoir immense et un remord infini, qui commençaient lentement à ronger son esprit… Elle lui avait demandé de rester, ce soir-là… Mais il avait refusé… Il avait un rapport à finir pour le lendemain… Et son rapport était passé avant elle… Elle qui partageait son existence depuis sept ans ;  elle qui avait tout sacrifié pour sa quête impossible ; elle qui avait toujours été là, pour lui, et qui ne l’avait jamais trahi… Elle, la femme qu’il aimait… Et elle avait été enlevée cette nuit-là… Il était responsable… S’il était resté, peut-être aurait-il pu la sauver…

*


Il avait fallu des jours pour qu’elle ne lui revienne, pour qu’elle ouvre enfin ses paupières et ne l’appelle faiblement : « Mulder… » Il s’était vivement redressé sur son fauteuil, il somnolait à peine. « Scully, ma petite Scully… Comment te sens-tu ? » avait-il chuchoté, en caressant délicatement de ses doigts, ses joues qui s’empourpraient. Le réveil avait été long et pénible. Les douleurs, les images d’horreur qui revenaient peu à peu… Ce corps qui lui semblait si différent, gênant… Elle s’y sentait mal à l’aise, comme à l’étroit… Il lui semblait qu’elle ne le maîtrisait plus. « Ça va passer, lui disait Mulder, pour l’encourager. Tu vas voir, d’ici quelques temps, tout ira mieux. Je suis là, maintenant. Je serai toujours là, désormais. » Mais il savait que ce n’était pas vrai et qu’il faudrait des semaines, des mois… des années peut-être, pour qu’elle retrouve sa vie… une vie normale… si elle la retrouvait un jour...

Puis le temps avait passé, ses plaies s’étaient refermées. À force de rééducation elle avait retrouvé l’usage de ses jambes et elle avait enfin, pu rentrer. Mais l’histoire était loin d’être terminée… A peine avait-elle cessé d’être sous calmants qu’elle avait connu l’enfer des terreurs nocturnes, des crises d’angoisse et de panique… Elle se réveillait au milieu de la nuit en criant, le corps couvert de sueur et secoué de tremblements. Elle avait peur de dormir seule. Elle avait peur de fermer les yeux et ne parvenait plus à s’endormir, tant elle craignait de retourner dans ses cauchemars où elle revivait son calvaire. Mulder devait à chaque fois la prendre entre ses bras, la réconforter, pour qu’elle retrouve ses esprits et qu’elle s’apaise.

Le jour, il lui arrivait de se sentir devenir folle. Elle suffoquait, elle étouffait. Et elle cherchait alors avec effroi, à saisir de ses lèvres, qu’elle ouvrait et refermait convulsivement, le moindre millimètre cube d’air… pour respirer. Cesser de respirer était sa hantise… Pendant ses crises, elle se sentait étouffer, comme si des mains invisibles l’étranglaient ou comme si elle se noyait… Alors, elle se débattait, comme pour se défendre contre un corps ennemi qui aurait voulu la maîtriser, l’étouffer, la violer à nouveau. Ses mains s’agrippaient partout où elles le pouvaient : elle tirait une nappe, faisant tomber à terre tout ce qui s’y trouvait ; elle s’attrapait les cheveux… D’autres fois, repliée sur elle-même, en boule, elle se collait contre les murs, dans les coins de sa chambre, pour que son corps trouve un semblant de réconfort et de stabilité. Et elle se balançait alors, en prononçant des mots, incompréhensibles pour les autres, mais qui faisaient sens pour elle et auxquels elle se raccrochait, pour éloigner ses démons. 

Parfois, sa souffrance intérieure atteignait une telle intensité, qu’elle en venait à se cogner la tête contre les murs, pour ne plus l’entendre en elle. Il fallait une douleur plus forte, une douleur qui lui fasse oublier l’autre… Il lui arrivait aussi, de vouloir crier… Mais elle se retenait, pour ne pas qu’on l’entende… Alors, pour contenir le vagissement qui l’étouffait, elle allait jusqu’à mordre la chair de ses avant-bras, avec ses dents. Elle pouvait pleurer pendant des heures, sans arriver à contenir ses sanglots ; s’enfermer dans le mutisme le plus complet ; ou encore parler, sans pouvoir s’arrêter, pour épancher ce besoin intarissable de raconter… de raconter encore… Comme si elle voulait expulser hors de sa conscience les images qui l’obsédaient, et ainsi, mieux contrôler … ce qui s’était passé…

Elle était redevenue enfant, mais une enfant faible et fragile, une enfant terrorisée par la main de l’homme, qui s’était abattue sur elle avec tant de violence. Elle était redevenue animal, un animal sauvage dont le corps était traversé des spasmes des derniers sursauts de vie, comme lorsque la bête gît à terre et agonise. Elle n’était plus que l’ombre d’elle-même et ses yeux, recouverts d’un voile d’obscurité, avaient perdu leur éclat et leur vivacité. Scully se mourrait à l’intérieur d’elle-même et Mulder, impuissant, meurtri, déchiré par la détresse et le remord, ne pouvait que sombrer avec elle.

Alors, par un matin de printemps, alors qu’elle était étendue sur leur lit, emportée par le lourd sommeil que ne peut refuser parfois, un corps usé par l’insomnie, Mulder avait sorti son arme. Il faisait beau dehors, le soleil se levait… C’était une aube… l’aube d’un jour nouveau, d’une vie nouvelle qui serait celle de sa guérison, tant espérée…

Les deux détonations avaient retenti coup sur coup, si rapprochées qu’on aurait pu croire qu’une seule balle n’avait été tirée. Couché à côté de Scully, Mulder avait définitivement fermé ses yeux sur ceux de sa compagne, qui gisait morte, à ses côtés.  

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Message  Oiseaubleu Sam 30 Aoû 2014 - 20:45



II

Un cauchemar que l’on vit éveillé…


 
Les coudes posés sur la table de la salle à manger, il avait laissé tomber sa tête entre ses deux mains. Puis, il avait fermé un instant les yeux, comme pour chasser, d’un battement de paupières, la vision d’horreur dont il venait d’être le témoin. Prenant une profonde inspiration et reposant sur la table ses deux poings, qui venaient de se fermer, il se redressa et la regarda droit dans les yeux. « C’est terrifiant, dit-il gravement, et d’une violence extrême… une violence que j’ai du mal à soutenir. Cet homme est fou. Il est beaucoup plus atteint que  je ne le pensais. Il est impossible pour l’heure, de prévoir ce qu’il va faire mais une chose est sûre, tu n’es plus en sécurité ici. Il faut que tu sois placée sous protection, jusqu’à ce qu’il soit arrêté. Tant que cette histoire ne sera pas terminée, je ne veux plus que tu restes seule, ne serait-ce qu’une seconde. » Sa voix, ferme et posée, vibrait avec assurance. Et elle avait compris qu’il fallait faire ce qu’il disait.

Refermant le document qui était posé sur la table et qu’il venait de finir, il se leva et s’approcha d’elle. Posant ses deux mains sur ses épaules, il lui chuchota, en rapprochant ses lèvres de son oreille : « Je ne laisserai personne te faire du mal, Scully. Je tuerai ce Padgett, s’il le faut… Mais aucun homme ne te fera plus jamais souffrir, je te le promets. » Sa voix se voulait rassurante, malgré l’angoisse qu’il sentait monter en lui, depuis qu’il avait lu ces quelques pages. « Je sais Mulder, avait répondu Scully, je sais que tu es le seul sur qui je pourrai toujours compter. » Et ils s’étaient étreints, tendrement.

Scully était retournée dans sa chambre prendre quelques affaires... Elle n’avait pas besoin de grand-chose. Elle reviendrait surement le lendemain. Après avoir soigneusement fermé ses volets et sa porte, ils étaient partis tous les deux. Le trajet leur avait permis de faire le point sur ce qu’ils allaient faire : ils iraient le soir même exposer  l’affaire à leur supérieur, le directeur adjoint Skinner. L’enquête qui était restée non résolue devait être rouverte, et Philipp Padgett devait être arrêté, une bonne fois pour toute. 

« Agent Mulder, agent Scully ! s’exclama le directeur adjoint en ouvrant la porte. Cela faisait longtemps… Vous savez qu’il est vingt-deux heures et que je suis censé avoir terminé mon service…

- Monsieur, commença Mulder, il s’agit d’une affaire de la plus haute importance…»

Skinner avait fait entrer les deux agents et ils étaient à présent, installés sur la banquette d’un grand canapé. Skinner était assis dans un fauteuil, face à eux.  « Alors, de quoi s’agit-il cette fois ? » demanda-t-il.

Mulder lui raconta comment Scully, une fois rentrée du Bureau, avait trouvé une lettre qu’on avait glissée sous sa porte. Elle contenait un imprimé d’une dizaine de pages, racontant l’histoire de son enlèvement par Phillip Padgett. Il lui expliqua qu’ils avaient déjà eu affaire à ce Padgett, environ un an auparavant, lors d’une enquête concernant une série de meurtres qui étaient restaient inexpliqués. L’homme avait disparu et l’affaire, non résolue, avait été classée. Puis, Skinner prit le temps de lire attentivement le texte de Padgett. Et sa lecture le laissa aussi troublé que ne l’avait été Mulder, une heure auparavant.

« Tout ceci est extrêmement inquiétant, lança Skinner en refermant le document. Je ne me souviens que très vaguement de ce dossier, mais il est certain qu’il doit être rouvert au plus vite et que l’agent Scully doit être mise sous protection. Qu’en pensez-vous Mulder ? Avez-vous une idée sur les motivations de cet homme ? Un point de départ ?

- Non, répondit franchement Mulder. J’avoue que je suis encore sous l’effet de la surprise. Mais je pense que cette menace doit être prise très au sérieux. Les meurtres sur lesquels nous avons enquêté, et que Padgett était soupçonné d’avoir commis, étaient d’une très grande violence. Et l’on ne sait toujours pas quel rôle il jouait dans cette affaire… Je vais retourner au Bureau pour étudier son dossier et essayer de trouver quelques pistes possibles. Mon seul souci est que Scully soit en sécurité…

- Et vous, agent Scully ? Qu’en pensez-vous ? demanda Skinner en la dévisageant, comme s’il voulait sonder son âme, pénétrer au plus profond de sa conscience.

- Je dois admettre que la lecture de ce texte m’a profondément troublée, avoua la jeune femme. Mais c’est étrange, car je n’arrive pas à imaginer que cet homme veuille vraiment me faire du mal. J’ai eu l’occasion de lui parler à plusieurs reprises, durant notre enquête, et je ne me suis jamais sentie réellement en danger avec lui. Il s’est montré très correct à mon égard, et je ne m’explique pas ce qui a pu le pousser à imaginer de telles choses. Je me demande si son texte n’est pas à prendre au second degré, s’il n’a pas pour but de me faire passer un message… que je n’ai pas encore compris… »

Scully semblait rêveuse tout à coup, comme absorbée par des pensées qui échappaient à son coéquipier. Et celui-ci n’arrivait pas à comprendre ce qui poussait sa partenaire à défendre cet inconnu, qui avait écrit tant d’horreurs sur elle.

Mulder et Scully avaient finalement quitté le domicile de Skinner pour retourner à leur bureau. Ils voulaient étudier le dossier de plus près. Ils avaient travaillé durant de longues heures, puis, la fatigue se faisant ressentir, ils avaient décidé de dormir sur place. Le bâtiment principal du FBI semblait être l’endroit le plus sûr pour passer la nuit. Ils s’étaient donc installés dans une petite salle qui possédait deux canapés. Mulder était venu un moment près de Scully. Il avait besoin de lui montrer qu’il était là, qu’elle n’avait pas à avoir peur. « Je t’assure que je vais bien Mulder, l’avait-elle rassuré, en le fixant tendrement de ses yeux bleus. Ne t’en fais pas. Je suis certaine que nous allons le retrouver et l’arrêter. » Elle ne voulait pas qu’il s’inquiète pour elle. Elle se voulait sereine et s’accrochait à la confiance qu’elle avait en lui, et en elle. Ils le retrouveraient et le mettraient hors d’état de nuire ; elle en était convaincue.    

Le lendemain, Skinner était arrivé plus tôt que de coutume à son bureau. Une réunion d’urgence, faite à sa demande, avait réuni de hauts responsables du FBI. Skinner avait été chargé de superviser l’enquête dont Mulder était responsable. De nombreux agents allaient être mobilisés, pour l’aider dans sa tâche. Il avait également été décidé que Scully, trop impliquée dans l’affaire, serait placée sous protection dans une résidence surveillée du FBI. Elle participerait à l’enquête, à distance.

«  Agent Scully, je vous présente l’agent Bob Smith », lança Skinner à la jeune femme, alors qu’un grand gaillard d’une cinquantaine d’année entrait dans son bureau. « Enchantée », dit Scully en lui tendant la main. « Agent Smith, vous êtes chargé de la protection de l’agent Scully. Vous l’accompagnerez chez elle ce matin même, afin qu’elle puisse prendre quelques effets personnels. Puis, vous la conduirez ensuite dans la résidence protégée dont l’emplacement, qui doit rester secret, vous a déjà été communiqué. »

Mulder regardait Smith d’un air peu convaincu… Il aurait préféré se charger lui-même de la sécurité de Scully. Mais il fallait que l’enquête avance, et il était le seul à connaître véritablement le dossier concernant l’affaire Padgett. Dans l’ascenseur, Mulder avait discrètement glissé sa main sur celle de Scully. Leurs doigts s’étaient entrelacés alors que leurs yeux s’avouaient, en silence, l’amour et la confiance qu’ils avaient l’un pour l’autre. « Sois prudente », lui avait-il dit, alors qu’elle rentrait dans la voiture de Smith. « Je te tiens au courant par téléphone et je passerai te voir ce soir, pour qu’on fasse le point sur l’évolution de l’enquête », avait-il ajouté.

Le trajet en voiture avait laissé à Scully le loisir de repenser à toute cette affaire. Padgett… un jeune homme bien étrange… Il n’était pas dénué de talent, son roman aurait surement été un succès… Réservé, charmeur, intuitif, complexe… Sa vie marginale intriguait Scully. Qui était-il vraiment ? Quelles étaient ses motivations ?  Il lui avait avoué qu’elle lui plaisait, qu’il était attiré par elle… Dans ses pages, il l’avait décrite avec tant d’admiration et d’amour… C’était bien la première fois depuis longtemps, qu’un homme la regardait d’une telle manière… comme une femme… une femme belle, sensuelle, intelligente, sensible… Une femme qui cachait en elle une certaine fragilité que personne n’avait semblé remarquer. Il avait lu en elle, il avait perçu des sentiments qu’elle ignorait et dont elle n’avait pris conscience que bien plus tard… comme son amour pour Mulder… Oserait-elle s’avouer qu’il l’avait troublée … qu’elle aurait souhaité mieux le connaître, pour peut-être, mieux le comprendre ?… En son for intérieur, Scully n’arrivait pas à avoir peur de Padgett. Et son intuition la poussait à croire qu’un lien particulier l’unissait à cet inconnu. Mais la voiture venait de s’immobiliser, et sa réflexion s’était interrompue.

Ils étaient descendus du véhicule et elle s’apprêtait à ouvrir la porte de son immeuble, quand une vieille femme, qui marchait sur le trottoir, se mit à crier : « Au voleur, au voleur ! Mon sac ! Il a pris mon sac !» Puis d’un air suppliant, à l’intention de Smith qui s’était retourné vers elle : « Monsieur, s’il vous plaît… Je vous en prie… » Smith fit volte-face et lança à Scully : « Vous pensez pouvoir vous en sortir toute seule pendant dix minutes ? » Elle acquiesça d’un signe de tête. « Alors j’y vais ! Je reviens tout de suite ! » Et il se mit à courir en direction d’un jeune garçon qui s’éloignait à toute allure, un sac à la main.

Scully n’avait pas hésité à laisser partir son collègue. Elle n’avait aucune crainte. Il faisait jour, elle était à l’entrée de son immeuble et bien entendu, elle était armée… Que pouvait-il lui arriver ? Rien. Il ne pouvait rien lui arriver. Et puis, pour l’heure, sa seule préoccupation était de récupérer ses affaires au plus vite, afin d’entamer ses recherches sur Padgett. Elle devait aider Mulder dans cette enquête. Elle ne pouvait accepter l’idée de rester passive dans cette histoire, qui la touchait si intimement.

 Il avait fallu presque un quart d’heure à Smith pour arrêter le jeune garçon, le remettre à la police, déposer son témoignage et restituer le sac à la vieille femme. Et là, Il attendait en bas de l’immeuble, que Scully lui ouvre la porte… mais elle ne répondait pas. Il appuya encore sur le bouton de l’interphone, mais aucune réponse ne se fit entendre. Enfin, ce n’était pas possible… Où était-elle ? La voiture était toujours à la même place, garée dans la rue. De plus, c’était lui qui en avait les clefs… Il sonna chez une voisine… Arrivé devant son appartement, il tambourina à la porte avec une certaine nervosité… « Agent Scully, c’est Smith, vous êtes là ? Agent Scully, ouvrez !! »

Il commençait à être inquiet. On lui avait confié la surveillance de sa collègue, apparemment menacée par un malade, et voilà qu’en l’espace d’un quart d’heure, elle avait disparu… Quel idiot ! se dit-il. Je me suis fait avoir comme un débutant ! C’était surement un coup monté ! De quoi je vais avoir l’air, quand je vais annoncer ça au directeur adjoint! Ma carrière est foutue ! Sans parler de son coéquipier… il va me faire la peau si on ne la retrouve pas en vie…   

Avant d’alerter Skinner, Smith avait cru bon d’inspecter l’appartement de Scully. Il avait ouvert la porte sans trop de difficulté, elle n’était pas fermée à clef… Donc Scully était bien montée dans son appartement, elle y était rentrée… et après ? Dans les pièces qu’il parcourait, tout semblait parfaitement en ordre. Il ne relevait aucun signe qui aurait pu témoigner d’une lutte ou d’une quelconque agression. Il essaya de l’appeler sur son téléphone… Peut-être était-elle repartie, après tout… qui sait…Mais rien. Pas de réponse. Il était tombé sur son répondeur.

*



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Message  Oiseaubleu Sam 30 Aoû 2014 - 20:49

 
« Quoi ? Mais je vais le tuer ce Smith ! » Mulder avait violemment cogné son poing sur le bureau du directeur adjoint, avant de se relever d’un bond de sa chaise. « Je suis désolé, Mulder, reprit Skinner. C’est une grossière et grave erreur de la part de cet agent, et il sera sanctionné, croyez-moi ! Mais votre colère ne changera rien. Scully a disparu et tout ce qui compte est de la retrouver, au plus vite. Nous ne savons pas de quoi cet homme est capable et nous devons absolument concentrer tous nos efforts sur cette enquête. »

Mulder était fou de rage. Il aurait tué ce Smith, s’il l’avait eu sous la main. Comment avait-il pu la laisser seule, ne serait-ce qu’une seconde, alors qu’il savait qu’elle était menacée par un dangereux criminel ? Malade, incompétent, inconscient… Cet homme est un danger pour le Bureau, se disait-il… et dire que c’est moi qu’on envoie au sous-sol, pendant que des types pareils passent leurs journées tranquilles, derrière leur bureau, à passer des coups de fil bidon et à attendre le week-end… En effet, Smith n’était plus un agent de terrain depuis quelques temps… Mais peu d’hommes se trouvaient disponibles, ce matin-là… On avait fait appel à un  ancien, censé être aussi un des plus expérimentés…

« Mulder ! avait lancé Skinner, en haussant la voix, il faut vous ressaisir et décider le plus rapidement possible de la direction à donner à cette enquête ! Rien n’est perdu, mais il faut agir sur le champ. »  En quelques secondes, Mulder avait passé en revue toutes les hypothèses envisageables. Que  faire ? Par où commencer ? Le livre… sa voiture. « Est-ce que la voiture de Scully est toujours garée à proximité de son immeuble ? avait-il demandé, soudain.

- Non. Nos agents ne l’ont pas retrouvée.

- Alors il faut commencer par là… et lancer un avis de recherche… Il va probablement mettre à exécution tout ce qu’il a envisagé dans son histoire. Si on localise la voiture de Scully, on a une chance de trouver la maison où il va l’emmener… »

Mulder n’avait pas fini sa phrase. Soudainement, il avait pali… « Mulder, ça va ? » avait demandé Skinner, frappé par le brusque changement qui s’était opéré sur son visage. « Il faut absolument qu’on la retrouve, avant… avant qu’il ne la touche… » Et sa voix s’était brisée tout à coup, alors qu’il tournait les talons pour cacher à Skinner les larmes, qui lui montaient aux yeux. « Nous allons la retrouver Mulder !» avait affirmé Skinner, lui aussi visiblement troublé. Et il avait immédiatement lancé un appel d’urgence à toutes les équipes disponibles, afin de retrouver son agent.

Les heures qui suivirent semblèrent à Mulder interminables. Rongé par le remord d’avoir laissé Scully seule avec ce Smith, dévasté à l’idée que Padgett était peut-être en train de la maltraiter, il tournait en rond, cherchant désespérément une piste qui aurait pu le mettre sur la voie à suivre… Il relisait les pages qu’il avait lues la veille, à la recherche du moindre indice… Il consultait les fiches de renseignements qu’il avait réussi à se procurer sur cet homme… Mais le dossier ne contenait pas assez d’informations. On ne savait presque rien  de cet écrivain raté qui semblait avoir disparu de la circulation, depuis plus d’un an. L’appartement de Scully avait était méticuleusement fouillé, un peu plus tôt, dans l’après-midi, et tous ses voisins avaient été interrogés… Personne n’avait rien vu, ni entendu… Mulder avait également contacté la famille de Scully, en essayant au mieux, de minimiser la gravité de sa disparition. Mais rien… toujours rien. On aurait dit que Scully s’était volatilisée.

« Ça y est, on l’a trouvée ! » La voix de Skinner venait de sortir brutalement Mulder du flot de ses pensées. Le directeur adjoint avait couru jusqu’à son bureau pour lui annoncer la nouvelle. « Scully ? demanda Mulder avec inquiétude.

- Non, sa voiture. Mais les environs sont en train d’être ratissés. Si nous partons tout de suite, nous pouvons être sur les lieux dans moins d’une heure. Les équipes qui sont sur place nous tiendront au courant, par téléphone, de l’évolution de la situation. »

Les deux hommes étaient partis dans une précipitation qui trahissait leur crainte. Il était deux heures du matin et il s’était déjà écoulé dix-sept heures depuis l’enlèvement de Scully… Qu’avait-il bien pu se passer durant ces longues heures ?…

Dans la voiture, les deux hommes n’avaient échangé que peu de mots. Ils étaient constamment en lien avec les équipes en place. Ils suivaient à distance la progression des agents qui travaillaient d’arrache-pied, malgré la nuit, pour retrouver la trace de leur collègue… un morceau de sa chemise retrouvé accroché à un buisson de ronces, du sang, des traces de pas… La tension était extrême. Pour Mulder, l’épreuve était insoutenable. Il avait l’impression d’être revenu quelques années en arrière, quand elle lui avait été enlevée pour la première fois… Et il se souvenait… Duane Barry… Puis il y en avait eu d’autres… comme Donnie Pfaster… Et maintenant… Phillip Padgett… Le cauchemar se répétait inlassablement… comme un disque rayé qu’il ne semblait pouvoir arrêter. Et si Padgett mettait à exécution le plan qu’il avait échafaudé dans son livre ? Et s’il violentait Scully, s’il la battait à mort… s’il la violait ?… 

Le texte de Padgett avait fait naître en Mulder une foule d’images mentales, insoutenables, d’une Scully à moitié morte, au corps meurtri, défigurée… Et ces images se bousculaient dans sa tête sans qu’il ne puisse mettre fin à leur manège. Mais un brusque coup de volant l’arracha brutalement à ses pensées. « Mulder, réveillez-vous ! avait crié Skinner. On l’a peut-être trouvée ! » La voiture avait changé de direction et ils filaient à présent, vers une propriété où les traces de pas, suivies par les agents, semblaient mener.

Une fois sur place, Skinner, Mulder et une partie des agents s’étaient rapidement préparés à entrer dans la vieille bâtisse, tandis qu’un autre groupe ratissait les alentours. L’intervention fut rapide. Les agents étaient nombreux et d’autant plus investis qu’ils savaient que c’était une des leurs, qui avait été enlevée. Mais Mulder ne suivit pas l’équipe du FBI. Dès qu’il le put, il s’éclipsa discrètement. Il savait où il devait aller pour la retrouver… et il voulait y aller seul…

Au fond du jardin, il avait trouvé le piquet qui soutenait le cœur embrasé, ainsi que l’entrée de la salle souterraine… L’histoire se répétait… Il vivait dans son cauchemar… Une fois descendu dans la pièce, il la parcourue de sa lampe torche et c’est là, qu’il la vit… Ce corps étendu sur le sol, cette chevelure rousse… « Scully ! » hurla-t-il, en se précipitant dans sa direction.  Mais un homme jaillit de l’ombre, et lui barra le passage.  « Vous arrivez trop tard, agent Mulder. Je vous avais pourtant  prévenu... Mais vous êtes trop préoccupé par votre petite personne pour accorder aux autres toute l’attention qu’ils méritent. » Il avait prononcé ces mots calmement, un brin d’ironie dans la voix. Mulder s’était figé un instant, sous l’effet de la surprise. Mais après avoir repris ses esprits, il n’hésita pas une seconde. D’un geste, il releva son arme, et avant que l’inconnu n’ait pu réagir, il tira… L’homme s’était alors effondré, le corps transpercé de balles. Mulder venait de vider tout son chargeur sur Phillip Padgett, dont le corps, sans vie, gisait sur le sol.  

Mulder s’était ensuite jeté sur le corps inerte de Scully. Il l’avait relevé prestement et d’une  main crispée, avait tâté son cou. Elle respirait… Puis il avait parcouru son visage, ses avant-bras… Il cherchait avec horreur et angoisse le sang, les contusions, les traces de plaies… Mais… ce n’était pas croyable… Il n’en revenait pas… Rien… Il n’y avait rien… Absolument rien. Pas une trace de violence sur son visage, qui semblait paisiblement endormi. Elle portait la même tenue que le matin, une tenue légèrement froissée et à peine déchirée, sur le haut de son bras gauche. Quelques ronces s’étaient accrochées au tissu et l’avaient blessée. Un mince filet de sang avait coulé sur sa peau blanche… Mais ce n’était rien de grave.

Troublé, ne sachant que penser, Mulder avait défait les boutons du corsage de sa partenaire. Il avait inspecté avec attention l’état de sa peau, ses épaules, ses bras, son ventre… Mais c’était toujours le même constat… Qu’est-ce que tout cela signifiait ? Ça n’avait aucun sens… Padgett savait qu’il le tuerait, alors pourquoi avoir imaginé tout ça ? Pour qu’il le descende ? Lui, Mulder ? Qu’espérait-il ? Qu’on le mette en prison pour avoir tiré à bout portant sur un homme non armé mais qui avait menacé, enlevé et séquestré un agent fédéral ?  Pensait-il que cette histoire l’éloignerait de Scully ? Les séparer définitivement… c’était peut-être, ce qu’il cherchait… Mais quel intérêt, puisqu’il était mort, maintenant ?

Une fois assis par terre, Mulder avait refermé précautionneusement le corsage de Scully, puis il avait déposé un baiser sur ses lèvres et l’avait calée contre lui. Interdit, il était toujours en pleine réflexion, le corps de son amie serré entre ses bras, quand Skinner et d’autres agents avaient pénétré à leur tour dans la pièce. Les détonations avaient donné l’alerte mais dans l’obscurité, il avait fallu plusieurs minutes avant qu’ils ne trouvent l’entrée de la cave. « Mulder ! avait crié Skinner avec effroi, vous l’avez trouvée ? Elle est en vie ?

- Elle respire ! Elle est sans connaissance mais je crois qu’elle n’a rien ! Il faut qu’elle soit examinée au plus vite par un médecin ! »

L’équipe médicale était déjà sur place et Scully fut examinée avec soin avant d’être évacuée vers un hôpital. Le premier constat qui avait été fait, était rassurant. A première vue, elle n’avait subi aucuns sévices. Hormis une petite plaie au bras gauche, son corps ne portait aucune trace de violence. Son pouls et sa tension étaient normaux. L’hypothèse la plus probable était qu’elle avait dû être droguée.

Arrivée à l’hôpital, elle avait subi de nombreux examens. Mais, malgré les doutes et les interrogations insistantes de Mulder, les médecins avaient été formels : elle ne présentait aucun signe témoignant qu’une quelconque violence lui avait été faite. Elle avait été droguée mais le produit utilisé était sans danger et grâce au traitement qu’on lui avait administré, il serait vite éliminé de son organisme. Elle se réveillerait probablement dans la journée mais le médecin la garderait quand même vingt-quatre heures en observation, par précaution. Elle pourrait reprendre son travail dès que son état émotionnel le lui permettrait.



Oiseaubleu
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