CONCOURS DECEMBRE 2010 - FIC N°3 de Noisette
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CONCOURS DECEMBRE 2010 - FIC N°3 de Noisette
FIC N°3 de Noisette
Poppys
Poppys
- On va passer la nuit ici, assura-t-elle finalement d’un ton définitif en regardant la neige tomber inlassablement derrière les vitres de la voiture.
- Tu ne sais pas. Peut-être que…
- Je t’en prie, Mulder ! Nous avons fait trois mètres en trois heures et on est à plus de vingt kilomètres des portes de Washington. Nous allons passer la nuit de Noël dehors comme ces milliers d’automobilistes, soutint-elle en lui désignant les voitures à perte de vue devant, derrière et à côté d’eux.
Il se tourna vers elle.
- Ca n’a pas l’air de te déranger plus que ça, nota-t-il avec une lueur amusée au fond des yeux.
Elle hésita une courte seconde puis un sourire franc se dessina sur son visage.
- Je suis mortifiée à l’idée de rater la dinde si digeste, les remarques si fines de Bill et l’enthousiasme tellement démonstratif du nouveau curé de la paroisse de Maman…
Il rit.
- Qu’est-ce que tu lui reproches au curé ?
- Voyons… - elle fit mine de chercher -, en fait, j’ai l’embarras du choix : son incapacité à sourire, ses sermons aux relents traditionalistes, sa passion pour les thématiques autour de l’enfer et du pêché… Oh, et… par-dessus tout, je lui reproche de ne pas savoir prononcer le mot « amour »…
- Mais Noël sans la messe, c’est pêché non ? provoqua Mulder.
- L’un de mes meilleurs souvenirs de Noël, je l’ai passé sans messe et avec des personnes que je ne connaissais ni d’Eve ni d’Adam si tu veux tout savoir.
- Tout ! la coupa Fox avec un entrain à peine forcé. Je veux tout savoir ! Même le menu ! Il va bien falloir occuper les heures qui viennent, railla-t-il en coupant le moteur et en se frottant les mains pour les réchauffer plus par réflexe conditionné que par réel besoin.
Elle sourit, saisit la manette à droite de son siège et le bascula légèrement vers l’arrière.
- Je prends mes aises, tu permets ?
- Mais je vous en prie, allongez-vous ! Laissez-vous aller ! singea Mulder avec un air docte de psy et en formant une pyramide avec ses doigts. Imaginez que vous êtes dans un endroit où il fait bon, où il fait chaud… Que vous êtes entourée de votre famille… Et, racontez-moi tout !
- Et bien… d’abord, il n’y a presque pas eu de menu, gloussa Dana en se remémorant le passé un sourire aux lèvres. Ni même de cadeaux. Nous nous étions retrouvés coincés dans un hangar de l’armée. En fait, il servait de salle d’attente pour les familles attendant d’embarquer dans un transporteur. Nous devions rejoindre Papa qui avait été réquisitionné d’office le soir du 24. Nous sommes arrivés sur place vers 15 heures avec une autre famille et nous n’avons finalement jamais pu décoller. Il y a eu une tempête de neige telle que le vol a été annulé mais que nous ne pouvions même plus rejoindre la base. Du coup, nous avons passé la nuit de Noël dans ce hangar à jouer au milieu des avions de combats, presque livrés à nous-mêmes !
- Ca avait l’air sympa ! murmura Mulder pour lui-même.
- « Sympa » ?! Tu plaisantes ? C’était le paradis ! Elle éclata de rire. Pas de messe, les adultes en train… je ne sais plus… d’essayer de trouver comment nous sortir de là probablement… Nous les enfants, nous étions libres comme l’air. Et toute la nuit, j’ai exploré cet endroit incroyable avec un garçon de l’autre famille…
- Ah ah ! On y vient !
Elle rougit et se tortilla sur son siège.
- J’ai faim. Tu peux attraper mon sac derrière ? J’avais prévu quelque chose à partager tout à l’heure, mais puisqu’on en est là…
Il attrapa le sac et le tendit à sa partenaire d’un air curieux.
- Il était comment le garçon ?
- C’était un grand ! lâcha Scully, qui se remit à rire comme si elle redevenait cette petite fille de sept ans éperdue d’admiration pour le grand brun de trois ans son aîné.
Elle ouvrit son sac et en sortit un paquet enroulé de papier d’aluminium. Elle écarta délicatement les feuilles et porta le paquet aux narines de Mulder. Il huma les senteurs épicées qui montaient et ferma les yeux envahi soudain par une délicieuse sensation de chaleur.
- Cette odeur… ! souffla-t-il le cœur chamboulé.
- Une merveille, non ?
Le visage de Dana s’éclaira.
- C’est une recette de ma grand-mère. Le gâteau d’épices aux fruits secs. On le fait pour chaque réveillon… Ca te dit ?
- Et comment ! Mais ne t’imagines pas que ça va me détourner de mon objectif. Parle-moi de ce garçon !
Elle lui offrit une part et se réinstalla, à demi-allongée sur son siège en soupirant.
- Je ne me souviens plus de tout. C’est loin. J’étais petite…
- Menteuse ! postillonna-t-il la bouche pleine.
- Je n’avais pas sept ans !
- Ce genre de choses, ça ne s’oublie pas. J’en suis sûr. Alors ?
- Ok, ok, abdiqua-t-elle. Il devait avoir une dizaine d’année, il était grand, du genre … intrépide et il débordait d’imagination.
- Beau mec ?
- Oui, je crois, s’empourpra-t-elle derechef en riant doucement pour dissimuler sa gêne. Il avait… beaucoup de charme, d’assurance. Il faisait tourner en bourrique sa petite sœur…
Il la vit réprimer un nouveau rire. L’évocation de ces souvenirs semblait la replonger littéralement en enfance. Et elle apparaissait soudain sous un jour terriblement différent…
Terriblement attirant, apprécia-t-il frappé de la résonance que cela créait en lui.
Dana poursuivait, le regard perdu dans ces réminiscences joyeuses.
- … Pour avoir moins froid, nos mères avaient étendu des cartons sur le sol. Avec un des pilotes, elles avaient réussi à dégotter des vieilles couvertures qui sentaient l’essence et on se serrait les uns contre les autres pour se tenir chaud... Il s’était mis à côté de moi et on s’est raconté des histoires abracadabrantes pendant des heures… Bill était fou furieux ! Et moi, j’ai passé une nuit merveilleuse !
Elle se tut un instant. Elle avait fermé ses paupières et souriait encore béatement.
- Et les cadeaux ? Tu as été privée de cadeaux alors…, demanda-t-il les yeux brillants.
- Non, triompha-t-elle. Neil m’a offert un totem !
Neil… Il la regarda avec une furieuse envie de l’embrasser tant elle semblait encore sous le charme de ce jeune prince en culotte courte.
- Un totem ? relança-t-il d’un air dubitatif.
- Ne te moque pas ! Sinon, je sors !
- Je voudrais voir ça ! éclata-t-il de rire en lui montrant les flocons qui recouvraient maintenant véhicules, routes et végétation tout autour.
- Il l’avait taillé lui-même dans un morceau de bois mort. C’était un totem magique, figure-toi !
- Je vois ! Encore un qui raconte des craques aux filles ! Tu l’as encore ce totem ? provoqua-t-il.
- C’était vraiment un beau cadeau ! Et… oui ! Absolument. Je l’ai encore si tu veux tout savoir !
- Je te l’ai déjà dit. Je veux tout savoir…
Il avança son visage un peu plus près d’elle d’un air inquisiteur.
- Avoue, Scully, qu’est-ce que tu ne m’as pas encore dit sur cette si mémorable nuit de Noël ?
Elle se rembrunit légèrement et croisa les bras en le défiant.
- Je t’ai tout dit.
- Tu l’as embrassé !
- Hey ! Je ne vois pas ce qui te permet de -…
- Tu rougis ! J’ai raison alors ? !
Elle inspira profondément.
- Je crois, cher partenaire, que ce genre de souvenir ne regarde que les principaux intéressés ! posa-t-elle avec fermeté.
- Je suis d’accord ! approuva-t-il avec au moins autant de vigueur, ce qui provoqua un regard surpris et tout d’un coup suspicieux de sa voisine.
Elle parut toutefois se radoucir devant la déclaration.
- Mais je peux te dire ce que moi, je lui ai offert, sourit-elle plus conciliante. C’est… drôle, en fait…
- Un morceau de ce pain d’épice ? coupa-t-il avec un air angélique.
Elle sursauta.
- Comment as-tu… ?
Il la dévisagea longuement, plein de tendresse. Elle sentit un léger trouble s’emparer d’elle.
- J’ai été coincé dans un hangar militaire moi aussi…, lâcha-t-il doucement.
- Tous les gosses de militaires ont connu ça, Mulder.
- Vraiment ? La nuit de Noël ?
Elle hésita. Non… Ce genre d’histoires n’arrive jamais… en vrai.
- C’est… un hasard…
- Ca s’est passé en 1970…
Là, elle manqua de s’étouffer avec un morceau de gâteau.
- Oui, et bien… il y a eu beaucoup de neige cette année là, se défendit-elle encore. Un peu partout aux Etats-Unis, je suppose…
- Cette nuit là, poursuivit-il imperturbable, j’ai rencontré une petite fille qui avait de longs cheveux roux qui brillaient même dans l’obscurité…
Il passa délicatement ses doigts fins dans les mèches flamboyantes de Dana.
- …
- Nous avons joué pendant des heures au milieu des avions. Nous étions des enfants seuls pendant la guerre et les Russes - qui ressemblaient étrangement à deux femmes emmitouflées dans des gros manteaux d’hiver - nous poursuivaient… Oui, ajouta-t-il avec un clin d’œil à Scully qui le dévisageait bouche bée, j’avais 10 ans. Je me souviens bien, moi !
- …
- Et il y a un moment qui me revient… parfaitement… C’est lorsque pour leur échapper, j’ai trouvé ce cockpit où nous réfugier…
Elle retint sa respiration. Il plongea ses yeux clairs en elle.
- Je l’ai aidée à monter dans ce F-4. Elle avait froid. Nous nous sommes serrés l’un contre l’autre, ce n’était pas très confortable. Mais… je me souviens que je l’ai enroulée dans mon blouson… et là… je l’ai embrassée…
Un ange passa…
- Mais... il s’appelait Neil, protesta-t-elle d’une voix éraillée.
- Tu ne devines vraiment pas ? répondit-il sur le même ton.
- Apollo 11 ! comprit-elle à l’instant même où il avait ouvert la bouche.
Ca paraissait tellement évident maintenant ! Armstrong avait marché sur la lune une année plus tôt. Tous les gamins rêvaient de devenir astronautes. Comment n’y avait-elle pas pensé ? !
Il hocha la tête.
- Neil Armstrong. Le premier homme sur la lune. L’homme que j’admirais par-dessus tout…, avoua-t-il en rosissant. Et puisqu’on en est aux aveux, il faut que je te dise…
- Tu as été mon premier ! lâcha-t-elle d’une voix sourde en le devançant.
Elle n’avait pas lutté contre son élan. C’était le cœur qui s’exprimait !
- Tu as été ma première, reconnut-il à son tour en riant.
Puis il ravala son rire saisi par le regard lumineux, pénétrant qu’elle lui renvoyait.
Pendant quelques secondes interminables, ils se dévisagèrent ainsi, pétris d’un mélange d’émotions aussi juvéniles que furieusement… adultes.
Elle rompit la grâce du moment.
Elle se redressa, attrapa le cake de sa grand-mère et ouvrit grand la portière d’un geste décidé.
- Scully ? ! s’écria-t-il en se penchant pour suivre la silhouette qui s’était extraite de la voiture plus vite qu’un korrigan se cachant de la lueur du jour.
Il la vit se précipiter vers un break familial, parlementer quelques instants sous la neige qui sifflait à ses oreilles telle une furie et revenir finalement en courant vers lui. Elle avait les mains vides.
Elle s’engouffra à l’intérieur de la berline avec un grognement satisfait et se tourna à nouveau vers lui.
- Voila ! Maintenant, on peut dire que c’est Noël !
Elle tremblait mais son visage était rose et serein.
- Tu as froid ? s’enquit-il avec prévenance.
Elle lui sourit sans répondre et il sut ce qui allait arriver. Lentement, il ôta sa veste. Il se rapprocha d’elle et lui passa le vêtement autour des épaules tout en l’enlaçant avec mille précautions.
Elle leva des yeux rieurs vers lui. Il la dévisagea avec une drôle de sensation. C’était comme si une troupe entière de lutins lilliputiens s’était donnée rendez-vous pour danser la gigue dans son ventre.
- Et maintenant ? demanda-t-elle, malicieuse. Tu crois que les russes…
- Ils ne nous trouveront pas ici.
Entrer dans son jeu. Se souvenir.
- Je sais.
- Vraiment ? Tu sais pourquoi ils ne nous trouveront pas ?
- Tu as… un truc magique ?
Elle tendit imperceptiblement ses lèvres entrouvertes vers sa mâchoire carrée. Une mâchoire d’homme maintenant.
- C’est… quelque chose pour nous rendre invisible ? chuchota-t-elle d’un ton de conspirateur.
- Exactement !... Quelque chose qui fait tout disparaitre autour de nous…
- Et tu es sûr que ça marche ? murmura-t-elle dans un souffle à son oreille.
- Il faut essayer je crois…
De sa main, il souleva délicatement le menton de Scully vers lui.
- Joyeux Noël, Dana.
- Joyeux Noël… Neil !
FIN.
noisette- Doodle de Gillian
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Date d'inscription : 29/04/2009
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